À quarante-huit heures de la fin du mercato estival, l’Olympique de Marseille a officialisé l’arrivée du défenseur central tunisien, Aymen Abdennour. Il s’agit d’un prêt annuel incluant l’option d’une deuxième saison. Avec ce transfert, les dirigeants ont mis un terme au chantier de la défense. Jusqu’à cet hiver, au moins…
Humour divin
Personne ne sait si Dieu existe. Ni, si tel est le cas, quel camp il choisirait parmi tous ceux qui s’opposent sur Terre, mais s’il nous observe depuis les cieux ou d’ailleurs, une chose est sûre : il doit bien se fendre la poire avec les matches de l’Olympique de Marseille !
Comme ça, pour se détendre entre deux créations de civilisations.
Et Dieu créa Dória…
De fait, Franck McCourt, le nouvel actionnaire et les hommes qu’il a désignés pour mener à bien l’OM Champion’s Project ont hérité d’un club et d’un effectif en piteux état.
Et pour cause ! Les rats qui manœuvraient le navire jusque-là avaient décidé de tout vendre avant de partir. Des planches au gouvernail, ne laissant que des clous et quelques factures à régler…
Or, l’américain n’est pas Dieu. Du reste, on l’imagine plus avec un casque de chef de chantier et un portefeuille qu’il hésitera à sortir à tour de bras qu’avec une longue barbe blanche et des pouvoirs dépassant l’entendement…
Faire table rase du passé
Il a donc fallu tout retaper patiemment du sol jusqu’au plafond en passant par le grenier et les caves infestés de parasites, et ce, dans le cadre de contraintes budgétaires strictes. Puis, il a fallu rebâtir une équipe, car le véritable étalon de la bonne santé d’un club de foot reste le fonds de jeu. Et plus exactement, son équilibre.
Quand on construit une maison, on s’occupe d’abord des fondations. Au football, c’est la solidité du socle défensif qui prévaut. Toutefois, au moment où Rudi Garcia a pris les rênes de du groupe, ce secteur était de loin le plus inquiétant.
En effet, les joueurs qui s’étaient succédé lors des deux dernières saisons ressemblaient plus à des parodies de footballeurs chères à Benny Hill qu’à des professionnels dignes de ce nom…
Un principe de réalité
Malheureusement, à l’instar de moules collées à leur rocher, certains s’accrochent fermement à leur contrat et il est bien difficile de déterminer s’ils reçoivent des offres qu’ils se permettent de refuser ou s’ils n’ont d’autre choix que celui de prolonger leur séjour olympien…
Les plus optimistes des supporteurs pensaient d’ailleurs qu’un bon coup de balai serait légitimement donné afin de favoriser l’arrivée de nouvelles recrues, mais parmi les joueurs décevants, seul Karim Rekik a été vendu.
Dória demeure une énigme dont Rudi Garcia détient la clé. Henri Bedimo et Rod Fanni ne font clairement pas partie de ses plans et on peine à imaginer quels clubs pourraient s’intéresser à eux.
Quant à Tomáš Hubočan, le pompier pyromane incapable d’éteindre les incendies fréquemment provoqués par ses soins et ceux de ses comparses, Dória ou Sertic, il a finalement trouvé grâce aux yeux du Trabzonspor Kulübü, ce qui tendrait à prouver que Dieu n’est pas si inexistant que ça !
« Il est flou Afflelou, il est flou… »
Une recrue déterminée et attendue
Malgré l’impossibilité d’accélérer les ventes, recruter devenait urgent et l’arrivée d’Abdennour a coïncidé avec la blessure d’Adil Rami. Un fait de jeu mettant une nouvelle fois en exergue l’extrême fragilité de la défense de l’OM et contraignant ses dirigeants à faire le forcing auprès de Valence pour arracher le défenseur tunisien au nez et à la barbe du Zénith Saint-Pétersbourg !
De son côté, le joueur n’attendait que ça et n’a pas longtemps hésité pour poser un lapin aux Russes. Il avait même déjà passé le rituel de la visite médicale avant de se raviser !
Sa motivation fait plaisir et confirme qu’avec Adil Rami, Rudi Garcia va pouvoir compter sur deux défenseurs combatifs ayant à cœur de mouiller le maillot et d’empêcher les attaquants les plus téméraires de trop s’approcher du but de Steve Mandanda.
Amen ! Enfin Aymen surtout !
À la relance
Faute de pouvoir attirer un défenseur incontournable comme Laurent Koscielny, l’Olympique de Marseille va devoir remettre sur pied un joueur qui a déjà prouvé sa valeur en Ligue 1, mais n’a pas réussi à s’imposer comme titulaire à Valence, surclassé notamment par l’Argentin, Ezequiel Garay.
Après deux saisons difficiles en Liga, l’ancien pensionnaire de Toulouse et de Monaco est de toute évidence en perte de vitesse et aura fort à faire pour reprendre le fil de sa carrière en attendant de retrouver Adil Rami.
» Si quelqu’un te frappe sur la joue droite, tends-lui aussi l’autre. »
Correspond-il exactement aux besoins actuels de l’Olympique de Marseille ? Rien n’est moins sûr, car son principal atout est la puissance alors que la défense marseillaise souffre surtout d’une carence collective de technique et de vivacité… Néanmoins, au vu de la situation, on ne va pas se plaindre !
Au contraire, on pourrait presque applaudir les dirigeants : ils ont réussi à rendre appréciables des choix qui paraissaient presque incongrus il y a quelques mois !
Par ailleurs, Aymen Abdennour devrait aisément grimper dans la hiérarchie et en duo avec Adil Rami, aider à remplir l’objectif fixé avant même le début du mercato : terminer dans les quatre premiers.
Du reste, Andoni Zubizarreta est convaincu de la complémentarité entre Abdennour et Rami. C’est rassurant !
Aymen, « le golgoth »
Porteur de principes et reconnu pour ses qualités humaines dans les clubs où il a évolué, Aymen Abdennour s’est également démarqué en sélection avec la Tunisie si l’on en croit les propos de Georges Leekens, sélectionneur des Aigles de Carthage d’avril 2014 à juillet 2015 :
» Je garde un très bon souvenir de lui. C’est un grand monsieur, avec des valeurs, quelqu’un d’extrêmement professionnel, un élément fantastique pour le groupe. »
Cela étant, le technicien n’a pas non plus oublié ses talents de footballeur :
» C’était l’un de nos meilleurs joueurs. Physiquement, il est très fort dans les duels. C’est un gagneur, une bête. Il donne tout pour son équipe, lit bien le jeu et fait preuve d’un engagement total. Il est précieux sur les coups de pied arrêtés, aussi bien défensifs qu’offensifs. »
Aymen Abdennour : la science du tacle.
Aymen Abdennour semble sortir d’une phase difficile à Valence, mais il faut éviter les conclusions hâtives et Marseille pourrait bien constituer l’écrin idéal pour un retour au plus haut niveau.
On peut d’ailleurs rappeler qu’à Monaco, les statistiques plaidaient en sa faveur puisqu’il avait le meilleur taux de tacles réussis en Ligue 1 lors de la saison 2014/2015, et n’était pas en reste quant au nombre de duels gagnés avec un bilan de 74 %.
Il possède également une caractéristique intéressante, qui contrastera notamment avec le brésilien Luiz Gustavo : il commet très peu de fautes ; à peine 0,6/match en 2014-2015 avec Monaco et 0,9/match avec Valence en 2015-2016.
Ses tacles sont propres, ses interventions nettes et sans bavure. Un talent précieux pour un défenseur et rare au sein de l’effectif actuel…
« Roudi m’a dit en mai : ‘Yé veux oun définseur avec des grosses cojones.’ Yé té raconte pas lé boulot ! »
L’erreur est – ponctuellement – humaine !
Aymen ne comblera pas à lui tout seul les manques actuels. Néanmoins, son arrivée pourrait s’avérer cruciale et servir de leçon à Jacques-Henri Eyraud qui a réagi précipitamment en le recrutant, à défaut d’avoir réellement anticipé les carences de l’équipe.
L’avenir nous dira si la blessure d’Adil Rami a été un bien pour un mal, sachant que la prochaine fois, le club n’aura peut-être pas l’opportunité de se tourner vers un défenseur de qualité, disponible et prêt à prendre le premier avion pour Marseille, à deux jours de la fin du mercato…
La messe est dite pour cet été et c’est les bras ouverts que nous accueillons Aymen Abdennour : bon courage à lui et, surtout, bonne chance !