MA PRÉSENTATION DU TOURNOIVoilà. On y est ! Début du 8e tournoi olympique de football féminin dès ce jeudi. Compétition qui s’annonce très relevée une fois encore.
Dans son format restreint – 12 nations qualifiées seulement (3 UEFA, dont le pays hôte, 2 CONCACAF, 2 CONMEBOL, 2 CAF, 2 AFC, 1 OFC) – ne manquent parmi les « grosses nations » que la Grande-Bretagne (aucune de ses composantes, à savoir Angleterre, Écosse, Irlande du Nord, Galles, n’est autorisée à concourir sous ses propres couleurs) et la Suède.
Je rappelle que la Suède était finaliste et médaillée d’argent aux jeux de Tokyo 2020, mais aussi 3e de la Coupe du monde 2023, et demi-finaliste de l’Euro 2022. Ceci venant après des 3es places aux Coupes du monde 2011 et 2019, une demi-finale à l’Euro 2013 et une finale olympique (médaille d’argent) en 2016…
Quant à l’Angleterre, qui aurait formé comme à l’habitude 80 à 90% d’une sélection britannique, elle est championne d’Europe en titre (2022) et vice-championne du monde (2023), après une 3e et 4e place aux mondiaux 2015 et 2019, et une demi-finale à l’Euro2017.
Deux grosses absences, donc. Et qui par conséquent libèrent des espaces sur le chemin des médailles, tant on le voit ces deux nations en ont trusté beaucoup depuis quelques années…
Douze nations, donc, réparties en
trois poules d’où sortiront directement
six qualifiées – les deux premiers de chaque groupe –
plus les trois meilleurs troisièmes.
A l’issue de ce tour de chauffe, quatre sélections seulement seront donc éliminées. Mais vu le niveau, on peut s’attendre à ce qu’un gros (ou prétendant l’être/le devenir) passe à la trappe.
Je vous présente en
trois posts les trois groupes et les 12 formations. Des posts pour celles et ceux aimant lire des mots, pas regarder des images. Vous êtes prévenu/es !
GROUPE A : FRANCE, CANADA, COLOMBIE, NOUVELLE-ZÉLANDELe groupe du « déjà vu », puisque France, Colombie et N-Z étaient regroupées en 2016 à Rio, les USA faisant office de quatrième larron.
A priori, et sauf énorme surprise, la dernière place et l’élimination qui lui est liée devraient être pour les Football Ferns venues de
NOUVELLE-ZÉLANDE.
En quatre participations, elles ne sont parvenues qu’une fois en QF, en 2012 à Londres, grâce à un succès en poule face au Cameroun (3-1). L’une de leurs deux victoires en 13 matchs olympiques, la seconde ayant été obtenue quatre ans plus tard, à Rio 2016, face à… tiens, tiens… la Colombie (1-0).
Lors de « leur » Coupe du Monde (conjointement avec l’Australie) l’an passé, les Néo-Zeds avaient créé l'exploit en battant d’entrée la Norvège et toutes ses stars (1-0), obtenant ainsi une première victoire historique en phase finale de mondial. Réussiront-elles aussi bien en 2024 ? La Nouvelle-Zélande, si elle pêche par un déficit offensif constant, entend compter sur sa défense de fer. Elle prend très peu de buts.
Pour
Las Cafeteras de
COLOMBIE, il s’agit d’une troisième présence olympique après 2012 et 2016. Deux fois sorties en poule, aucune victoire en 6 rencontres, juste un nul notable contre les USA (2-2, 2016).
Mais ne nous arrêtons pas à ce piteux et réduit palmarès, car aujourd’hui la Colombie semble d’un tout autre niveau. La preuve, son QF — le premier de son histoire — l’an passé à la Coupe du monde pour une troisième participation, après avoir battu et éliminé Allemagne (2-1) et Corée du Sud (2-0) en poule, puis la Jamaïque en 8es (1-0), ne s’inclinant en quart que de justesse face aux championnes d’Europe anglaises (1-2).
Avec plusieurs joueuses de grand talent dans son effectif, la Colombie se pose en outsider possible pour une médaille. La sélection a considérablement progressé, s'avère complète dans toutes ses lignes et sait alterner un jeu (parfois trop) physique et une finesse technique typiquement latina.
Elle possède au moins
quatre joueuses de classe internationale : la pépite du Real Madrid,
Linda Caecido (19 ans seulement) qui après avoir illuminé les CdM U17 et U20, ainsi que la Copa America (perdue en finale par la Colombie face au Brésil 0-1), a confirmé lors du mondial l’an passé. Sur son côté gauche, avec sa magnifique technique hors norme, l’incroyable élégance de son toucher de balle et de ses dribbles chaloupés, ses frappes calibrées, mais aussi son attitude générale sur le terrain (elle reçoit beaucoup de coups, ne se plaint et ne se rebelle jamais), elle tranche avec le reste de l’équipe lorsque celle-ci est en mode « destroyer » (ce qui, reconnaissons-le, ne fut pas le cas au mondial où la Colombie a toujours offert un visage respectueux des règles).
À la pointe de l’attaque,
Mayra Ramirez est son exacte opposée. Grande (178 cm) et puissante, à l’allure tout sauf élégante, Ramirez évoque davantage une Abby Wambach andine qu’une Alex Morgan. Qu’on ne s’y trompe cependant pas : si celle qui est arrivée en cours de saison à Chelsea pour y remplacer la superstar locale Sam Kerr (croisés), entraîne de la peur physique chez les défenseures adverses, elle brille aussi par sa très fine technique, son intelligence et un sérieux sens du collectif. Elle marque peu, mais aide surtout à marquer…
La vraie buteuse est également la figure la plus emblématique de la sélection :
Catalina Usme (34 ans, 93 sélections et 72 buts). L'attaquante de Pachuca (Mexique) a tous les talents. Redoutable sur coups de pied arrêté ou devant les cages, elle est dotée d’un caractère de guerrière comme on en voit peu. Gare à qui décide de lui frotter les chevilles ! Sa parfaite technique peut faire basculer n’importe quel match. Renard et Le Sommer ne diront pas le contraire, ayant sans doute en mémoire l’imprévisible défaite des Bleues en poule du mondial 2015 face à la Colombie d’Usme qui leur marqua ce jour-là le but du 2-0 (score final)… Elle marqua à nouveau face aux Bleues lors du match inaugural d’Hervé Renard dans ses fonctions le 7 avril 2023 à Clermont-Ferrand. Rappelez-vous de ces Cafeteras menant 2-0 (deux coups francs de Usme, le premier pour la tête d’Arias, le second direct comme un corner ouvert en lob dans le petit filet opposé), avant que les Bleues ne renversent tout (5-2).
La quatrième Colombienne à signaler est la petite (159 cm) meneuse de jeu du Washington Spirit qu’elle vient de rejoindre après 5 années passées à l’Atlético Madrid :
Leicy Santos. Elle aussi a tous les dons, à preuve le but devenu culte inscrit contre l’Angleterre en QF de CdM 2014. Comme Usme, un lob excentré en lucarne opposée dont Mary Earps, la nouvelle gardienne du PSG, ne s’est toujours pas remise, et qui fut immédiatement comparé au but quasi identique du Brésilien Ronaldinho contre… l’Angleterre, lors de la CdM 2002. Pauline Peyraud-Magnin est prévenue. Espérons qu’elle soit vaccinée…
Pour moi, la Colombie représente clairement un gros danger pour les Bleues. Est-ce une bonne ou une mauvaise chose de l’affronter en premier, avec l’inévitable pression, pour ne pas dire le stress de devoir réussir son entrée dans « son » tournoi ? En 2019, les Françaises avaient parfaitement maîtrisé l’événement, se débarrassant sans coup férir de la Corée du Sud (4-0)… Réponse jeudi soir…
Si la Colombie représente un piège et un danger, il en va de même avec le
CANADA, tenant du titre, puisque médaillé d’or à Tokyo 2020 après avoir vaincu successivement le Brésil en QF (0-0, 4-3 tab), les USA en DF (1-0) et enfin la Suède en finale (1-1, 3-2 tab). Une médaille d’or, après deux consécutives en bronze (2012, face à la France 1-0, un cauchemar pour les Bleues qui avaient dominé 100 % du temps et battues sur un contre à la dernière minute… 2016 face au Brésil chez celui-ci [2-1]… après avoir éliminé la France en QF 1-0)…
Les J.O. devenus une spécialité
canuck ? On dirait…
En matchs ou tournois amicaux (Tournoi de France, de Chypre…), le Canada n’a plus battu la France depuis 2006. 6 victoires bleues et 3 nuls. Et trois succès pour les trois dernières confrontations depuis les J.O. de 2016.
Les deux formations se connaissent bien. Le fait que près d’un tiers de l’effectif (cinq sur 18 joueuses retenues) joue (Gilles) ou ont joué (Lawrence, Buchanan, Huitema, Viens) en D1 à l’OL, au PSG, au PFC, donnera une fois de plus un aspect « réunion de cousines » entre nos Bleues et les Canucks…
Après son fiasco de la Coupe du Monde 2024 dû à sa sortie dès les matchs de poule, le Canada s’est repris et a enchaîné 12 victoires — dont trois face à l’Australie qui l’avait écrasé 4-0 au Mondial —, 4 nuls dont deux face aux USA, et une seule défaite face au Brésil (également battu et tenu en échec lors de deux autres rencontres).
L’efficacité retrouvée et remarquée en attaque d’Adriana Leon, auteure de 10 buts sur les 13 derniers matchs du Canada, a redonné du punch à une formation auparavant en manque de buts. Avec elle, et les Lacasse, Huitema, Viens, Prince, Rose et le retour de Beckie, absente à la CdM sur blessure, voilà les Canadiennes pourvues d’une armada offensive conséquente et pouvant compter sur leur capitaine Jessie Fleming, héroïne de l’édition victorieuse de 2020, pour les fournir en bonnes munitions.
Si la « super héroïne » de la finale de Tokyo, la gardienne Stéphanie Labbé a pris sa retraite, Kailen Sheridan est une excellente remplaçante avec ses 50 sélections, et la défense formée de Rivière, Gilles, Buchanan, Lawrence est extrêmement solide et très expérimentée…
Bref, une équipe qui se montrera encore difficile à bouger.
Le Canada réussira-t-il la passe de quatre ? Une quatrième médaille consécutive sur les poitrines à la fin des Jeux ? Allez savoir…
On l’a compris, le groupe ne sera pas si aisé que ça — même si on doit le juger franchement moins « impossible » que les deux autres — pour nos Bleues. La
FRANCE, qui vient d’accéder à la 2e place mondiale au classement FIFA et pour la première fois de son histoire, sera forcément l’une des favorites de l’épreuve. Disputant à nouveau un grand tournoi majeur à la maison cinq ans après la Coupe du Monde 2019, n’ayant toujours pas décroché la moindre finale (en dehors de la plus ou moins anecdotique Ligue des nations cette année), ni la plus petite médaille, elle se doit de performer et de combler enfin ce vide.
En a-t-elle les moyens ?
La réponse ne peut être que : oui. Comme toujours depuis quinze ans.
Mais...
10 tournois (4 CdM, 4 Euros, 2 J.O.) = zéro finale, 3 demies, 7 éliminations en quart.
Zéro médaille. Ça pique quand même...
Et le patron du football féminin hexagonal Jean-Michel Aulas a beau nous proclamer (et pas qu’une fois) que « les meilleures joueuses au monde sont françaises », il reste un décalage têtu entre les paroles et les actes.
À chaque fois, on le sait, « il s’en faut de si peu »… Un tir au but raté en 2009, 2013, 2015, 2023… La faute (à qui d'autre ?) au sélectionneur ou à la sélectionneuse en 2016, 2017, 2019…
Les Bleues avaient vaincu le signe indien à l’Euro 2022 en passant une bonne fois pour toutes ce cap maudit des QF (5 adieux consécutifs à ce stade TCC), grâce à un penalty de Périsset en prolongations contre les Pays-Bas. Mais le plafond de verre des demi-finales s’était ensuite abattu sur elles, tatoué de la tête d’Alexandra Popp (1-2 face à l’Allemagne).
Et voilà que l’année suivante, un pas en arrière, nouvelle sortie en QF, encore aux tirs au but, face à l’Australie en CdM au bout d’une série invivable, interminable, et insupportablement cruelle de tirs au but (0-0, 6-7 tab)…
Alors bien sûr, on se rassure. Depuis, il y a eu cette demi-finale (non précédée de quart) de Ligue des nations remportée devant cette même Allemagne (2-1). Une réelle performance. Hélas suivie d’une déroute en finale contre des championnes du monde espagnoles très largement au-dessus (0-2). Lors des qualifications à l’Euro 2025 qui ont enchaîné et servi à la fois de Ligue des nations et de préparations à ces J.O., les Bleues ont proposé un peu tout et son contraire : deux belles victoires lors des affrontements avec la Suède (1-0 et 2-1), une victoire spectaculaire en Angleterre (2-1), mais aussi deux naufrages, l’un face à ces mêmes Anglaises à Saint-Étienne (1-2), l’autre en Irlande (1-3).
Les Bleues s’appuient sur un collectif qui a l’habitude d’évoluer ensemble, que ce soit en club (OL et PSG principalement), ou en sélection (des U17 championnes du monde de 2012 aux A d’aujourd’hui, en passant par les championnes d'Europe U19 2013, 2017, 2019, les U20 2014, 2018…).
La vélocité et la percussion de ses latérales (Diani, Cascarino, Karchaoui, Bacha) et le sens du but létal de Katoto apparaissent comme des garanties offensives. Ou plutôt, devraient. Car force est de constater que la France n’arrive pas à marquer dans le jeu. À combien en est-on désormais ? 14 buts sur coups de pied arrêté pour les 17 derniers inscrits ? Vision positive : la France s'affiche l'une des équipes les plus redoutées au monde dans cet exercice. Oui. Très bien ! Tant mieux. Aucun doute. Mais la vision négative… Combien de temps cela durera-t-il ?
La capacité à presser haut l’adversaire, une des autres qualités des Bleues. Elles l’ont démontré ces derniers mois contre la Suède et en Angleterre. Mais si une ou deux filles défaillent, c’est l’équipe entière qui lâche. On l’a vu face à cette même Angleterre et l’Irlande…
Au milieu, si Kenza Dali est une très bonne et intelligente milieu offensive, la présence d’une véritable créatrice fait défaut. Il fut un temps où la sélection nationale alignait trois numéros 10 : Nécib, Thiney, Abily. Cette équipe n’a certes jamais rien gagné, mais le jeu offensif était souvent flamboyant et régalait les mirettes.
Notre milieu actuel ne paraît pas toujours certain de son positionnement, voire de son rôle. Joue-t-on avec une sentinelle (Toletti ou Henry) ou pas ? Geyoro est-elle libre de ses mouvements (comme au PSG) ou pas ? La qualité des filles n’est pas à mettre en question ici, elles ont assez fait leurs preuves. Sont-ce les consignes qui manquent de clarté ou de constance ?
Derrière, le retour de M’Bock en DC aux côtés de Renard est un plus évident. L’éclosion de Lakrar qui se poursuit après ses brillants débuts à la Coupe du monde l’an passé, une assurance. Maintenir de Almeida sur le côté droit après avoir écarté Périsset, la seule spécialiste du poste et maintenue dans les « réservistes » est néanmoins susceptible d'ouvrir une faille dans une défense à la sérénité parfois vagabonde...
Dans les buts, Peyraud-Magnin, elle, a démontré récemment qu’elle assurait le job.
La France n’a peut-être pas « les meilleures joueuses au monde », mais certainement à plusieurs postes des joueuses parmi les meilleures de la planète (Renard, M’Bock, Karchaoui, Geyoro, Bacha, Diani, Katoto, Cascarino). Pas mal d’autres formations s’en revendiquent de même, à commencer par l’Espagne, mais aussi l’Allemagne, les USA, le Japon, le Brésil, l’Australie… le Canada et la Colombie.
Si les Bleues terminent en tête de leur groupe, premier objectif annoncé, elles affronteront en quart de finale un 3e de groupe, qui pourrait être USA/Allemagne/Australie ou Japon/Brésil/Nigéria (peu probable pour l’Espagne)… Forcément du lourd... avant peut-être l'Espagne en demie... Tout autre résultat qu'une médaille, incontestablement atteignable, serait vécu comme un nouvel échec... Les joueuses savent donc ce qu'elles ont à faire...
La suite demain avec le
groupe B (si la maladie veut bien m’offrir un petit répit, ce n'est pas gagné).