Information
SIFFLETS; Comment Elye Wahi peut s'en relever; Le rêve s'est transformé en cauchemar pour le nouvel avant-centre olympien. Sa première au stade Vélodrome a été marquée par de nombreux ratés et une bronca à sa sortie. Encore très jeune (21 ans), le Francilien ne devra pas cogiter.
Le poncif préféré de votre joueur bien-aimé. "Tout va très vite dans le football"... et encore plus sur la planète Mars. Dernier exemple en date, dimanche soir, pour la grande rentrée au boulevard Michelet. Le Vel' en fut le théâtre, Elye Wahi la victime. Deux heures, si ce n'est moins, séparent les scènes. La première, en préambule de l'échauffement, quand André Fournel a exhibé le flambant neuf numéro 9, devant une foule en délire. En écho à son accueil triomphal à Marignane, treize jours plus tôt, mêlant fumigènes et chants à sa gloire, l'ancien Lensois a fait trembler les murs de sa nouvelle demeure... à défaut, plus tard, des filets. Le Vélodrome, ou une bonne partie, qui l'a acclamé presque aussi fort que Mason Greenwood (c'est dire), allait très vite lui en vouloir. Sonné par les Rémois, qui filaient vers la victoire (1-2), le stade retrouvait soudain son souffle à la 67e minute.
Jonathan Rowe pénétrait dans l'arène, tandis qu'une copieuse bronca déferlait des tribunes pour escorter, jusqu'au banc, Elye Wahi. De héros à zéro, bienvenue à Marseille.
Entre les deux ? Au moins trois occasions franches gâchées (1,27 but attendu, au total) par le très jeune, mais prometteur, buteur (21 ans), cible des premiers débats enflammés cette saison. Aux alentours de minuit dans les entrailles du Vel', alors que le coupable de ce nul au goût de revers était tout trouvé, l'OM est parti en mission. Sauver le soldat Wahi. "Le plus important, c'est de se procurer les situations, et il en a eu plusieurs. C'est encourageant pour la suite", insistait le vieux briscard Geoffrey Kondogbia. "Je le traite comme mon fils. À la fin du match, je l'ai pris dans mes bras, j'ai essayé de l'encourager. Il a commis des erreurs, doit faire mieux et s'améliorer... Mais c'est quelqu'un qui a vraiment voulu venir à l'OM, un grand club avec beaucoup d'attentes", ajoutait Roberto De Zerbi, tandis que Lilian Brassier jouait la carte de l'optimisme : "Il a déjà marqué pour son premier match (un penalty à Brest), je suis rassuré. Je sais qu'il en a dans la tête, il est fort mentalement. Ça va tourner dans le bon sens." Encore faut-il le prouver.
Le doute est permis, d'autant que l'intéressé a déjà dû affronter pareille hostilité... avec un résultat plutôt mitigé à la clef. Fin avril, après une nouvelle prestation en deçà des attentes, vis-à-vis de la recrue la plus chère de l'histoire du RC Lens (30M), le public Sang et Or, pourtant très patient, l'avait copieusement chahuté. Un léger psychodrame avait alors rythmé les jours suivant, obligeant nombre de ses partenaires, son entraîneur et même les ultras à monter au créneau. Le Francilien, présenté comme un jeune homme sensible, avait très mal vécu l'épisode. À Marseille, dès son baptême, il doit déjà retourner la veste de quelque 65 000 personnes, même si nombre d'entre elles ont accusé les aoûtiens, en tourisme au Vel', de cette sévérité prématurée, voire déplacée.
"C'est bête de répéter nos erreurs. L'an passé, on a fracassé 'Auba', qui nous a finalement portés à bout de bras. Certes il a été maladroit, il s'est souvent précipité en voulant bien faire, mais vous n'imaginez pas le poids de ce maillot sur les épaules d'un buteur, encore plus pour sa première au Vélodrome. Siffler comme ça, c'est la loi du foot et ses supporters modernes. Mais les vrais savent qu'il est talentueux et lui laisseront plus de temps pour faire ses preuves, soulève l'ancien attaquant olympien, Marc Libbra (149 apparitions, 41 buts). C'est contre productif de lui rentrer dedans. Aubameyang a su s'en relever parce que c'est un immense joueur, plein d'expérience. Wahi, lui, est un jeune en apprentissage, il découvre le plus haut niveau et sa pression. Par rapport à Sanchez ou 'Auba', les supporters doivent changer leur grille de lecture. Wahi est ici pour progresser, Il faut être patient, le laisser travailler et faire un bilan dans six mois. On ne doit pas attendre de lui qu'il porte seul l'attaque de l'OM, même si je suis persuadé qu'il a le potentiel pour le faire à l'avenir. Sil marque entre 12 et 15 buts ce sera déjà une saison très réussie."
"Il faut faire profil bas, s'arracher à l'entraînement"
Si plusieurs de ses prédécesseurs, si ce n'est l'immense majorité, ont coulé à pic après un tel départ, les exemples à suivre ne manquent pas. Récemment, de Mamadou Niang à André-Pierre Gignac, en passant évidemment par Pierre-Emerick Aubameyang, quelques-uns ont réussi à transformer la haine en amour. Sur les hauteurs de La Commanderie, personne ne doute de la réussite d'Elye Wahi à l'OM, en premier lieu Medhi Benatia, qui a fait des pieds et des mains pour le rapatrier en Provence (contre 25M, hors bonus).
"Bien sûr qu'il doit être triste, touché, autant par ses ratés que par la bronca. Mais il doit garder la tête froide, dédramatiser. Au fond, ce n'est pas grave. Il faut faire profil bas, s'arracher à l'entraînement. Sur ce point, je n'ai pas de doute sur son implication, il est plein de bonne volonté. À Lens, malgré des périodes difficiles, il a réussi de grands matches, surtout en Ligue des champions. Ce n'est pas anodin, appuie Libbra. Aujourd'hui, il a la chance d'être entouré par Greenwood qui est capable de prendre le relais à la finition. Bien sûr qu'il devra marquer pour se vider l'esprit et satisfaire le public, mais il peut retrouver petit à petit confiance en continuant à jouer son rôle de soutien, qu'il a, par exemple, très bien fait contre Reims. Ses décrochages, ses appels en profondeur, ses remises... Et puis, si l'OM marque le premier but, c'est aussi grâce à son appel au premier poteau qui libère l'espace à Harit." Après les sifflets, la parole est à Wahi. Première réponse à Toulouse, samedi.
La Provence