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Geoffrey Kondogbia, nouveau milieu de l'OM : « Je suis plus armé, je suis un joueur plus construit »
Le milieu Geoffrey Kondogbia revient sur son choix de signer à l'OM, cet été. Et sur toutes les expériences à l'étranger qui l'ont forgé.
Entre deux séances d'entraînement rythmées par le fourmillement de Marcelino et ses adjoints aux quatre coins du terrain, Geoffrey Kondogbia s'est posé près d'une mi-temps pour expliquer son retour en Ligue 1, lundi. Le champion du monde des moins de 20 ans de 2013, génération Pogba - Veretout, devenu international centrafricain depuis, revient en France, huit ans après l'avoir quittée, avec un statut renforcé et un appétit toujours aussi grand. De son choix en passant par sa relation avec Marcelino, connu à Valence, ou ses expériences chez des grands d'Europe, le milieu (30 ans) a parlé avec son phrasé minutieux.
« Vous êtes parti de France il y a près de huit ans maintenant, pourquoi avez-vous choisi de revenir en Ligue 1 ?
(Il sourit.) Le temps passe très vite. En fait, je n'ai pas pris ma décision par rapport au pays mais plutôt par rapport au club. Ce qui m'a attiré, c'est l'OM. J'avais déjà des opportunités pour partir en Premier League, c'était une destination qui me plaisait beaucoup, mais quand l'OM s'est présenté, disons que cela a changé mes convictions.
Pourquoi ?
C'est la passion de ce club, de cette ville, qui m'ont attiré. Quand on jouait au ballon dans le quartier, en bas de chez moi, à côté de Nandy (Seine-et-Marne), je me rappelle de beaucoup de maillots de l'OM, même si c'était l'époque de la domination de Lyon. On joue au foot pour les émotions, pour la passion, alors quand l'OM te contacte, ça résonne en toi.
Votre arrivée a été concomitante avec celle de Marcelino, en quoi cela a-t-il joué dans votre décision ?
Je l'ai su, pour le coach, bien après dans les discussions que j'avais avec Pablo (Longoria). On a commencé à parler relativement tôt avec le président. Sur le volet émotion, j'avais un grand sourire par rapport à tout ce que l'OM représentait, par rapport à ma relation avec le président. Mais j'avais besoin de ne pas rester que sur le sentimental, je voulais savoir quelle était exactement la vision. Je ne voulais pas que ce ne soit qu'un mariage sur les sentiments.
C'est-à-dire ?
J'avais besoin de prendre du temps pour mieux comprendre le concept. Au-delà des hommes, que ce soit le coach, le président, ce qui m'intéressait, c'était de pouvoir être dans une équipe compétitive.
Vous retrouvez Marcelino, connu à Valence (2017-2019) et qui semble beaucoup vous apprécier. Quelle relation entretenez-vous avec lui ?
Au-delà de l'aspect professionnel, c'est quelqu'un que j'apprécie parce qu'il est franc, direct. Il est également très humain, c'est toujours agréable. C'est une pression supplémentaire aussi pour moi parce qu'il ne va pas hésiter à me rentrer dedans et à me dire les choses.
Pouvez-vous nous expliquer un peu plus sa méthode ?
C'est un coach qui a quatre ou cinq idées de jeu très claires et il va faire en sorte que le joueur soit convaincu dans un premier temps. Il est très exigeant bien évidemment. C'est indispensable au haut niveau, sinon tu ne peux pas obtenir ce qu'il a obtenu au niveau du palmarès. Il aime le jeu dynamique, que ses équipes explosent vite vers l'avant. Mais la base de tout, pour lui, c'est d'avoir une bonne organisation, d'être bien en place. Il part du principe que c'est la meilleure façon de bien pouvoir attaquer une fois le ballon récupéré.
Qu'attend-il des milieux en particulier ?
Ça dépend des caractéristiques de chacun. Qui est à côté de toi ? Quel type de joueur est-il ? Tu dois t'adapter à ton partenaire. Et puis, ça dépend aussi des situations de jeu : si le ballon est à droite, à gauche... C'est très variable mais ce qui est sûr, c'est qu'il veut deux milieux de position (il mime avec ses deux poings).
Vous avez la faculté de pouvoir vous projeter, aussi.
J'ai eu la chance dans ma carrière de pouvoir jouer dans différentes situations : en 4-4-2 avec lui ; à l'Inter, j'ai joué dans un 4-4-2 en losange, plutôt sur le côté gauche, et à l'Atlético, en 3-5-2, j'ai évolué devant la défense. Toutes ces expériences m'ont donné un bagage supplémentaire. Ça me permet de savoir mieux m'adapter, je crois. C'est super important dans le foot aujourd'hui : savoir s'adapter aux idées d'un nouveau coach et mieux comprendre ce qu'il se passe autour de toi sur le terrain.
Justement, vous n'avez connu quasiment que des grands clubs dans votre carrière, du Séville FC à l'Inter Milan, en passant par Valence ou l'Atlético de Madrid. En quoi ces expériences vous ont-elles changé ?
Séville, c'était la découverte du très haut niveau à l'époque du grand Barcelone, du grand Real. J'étais un gamin de 18-19 ans avec des étoiles dans les yeux et je voulais montrer au monde entier ce que je savais faire. Il y avait un côté euphorique. Il y a eu ensuite la transition de Monaco (2013) avant le départ à Milan (2015). À l'Inter, ça a été le grand saut. J'avais un rôle complètement différent, j'étais l'un des transferts les plus chers de l'histoire du club, à l'époque
(36 M€). À cet âge-là, je pense que je n'étais pas encore assez armé pour supporter ce statut mais c'est là que j'ai le plus progressé. Mentalement, j'ai complètement changé.
C'est en Espagne que vous avez le plus joué dans votre carrière. Qu'avez-vous retenu de cette culture de jeu ?
À Valence ou à l'Atlético, ça a été la confirmation de tout ce que j'avais appris avant. Je suis arrivé dans des très grands clubs qui jouaient la Ligue des champions avec beaucoup plus de bagage. Je me suis nourri de mes expériences à l'Inter notamment, au niveau de la discipline, de l'ambition, pour tout mettre en pratique.
En quoi êtes-vous devenu un joueur différent grâce à toutes ces aventures
à l'étranger ?
Je suis plus armé, je suis un joueur plus construit. Disons, que les fondations ont été posées à Lens dès le centre de formation. Ensuite, je me suis construit comme une maison, en fait, le sol, puis les murs, le toit. Aujourd'hui, je connais ma maison, je sais où est ma chambre, ma cuisine, quand il faut faire des travaux, je sais ce qu'il faut faire.
Vous êtes plus bricoleur, en fait.
On peut toujours changer la déco ! Mais je suis plus aguerri, je crois. Je sais qu'il me reste encore des années d'apprentissage, même si j'ai 30 ans. Mais ce que j'ai retenu de tous ces clubs, c'est que tu peux toujours t'améliorer.
Dans tous ces clubs, vous avez découvert de grands coaches : Diego Simeone, le plus récemment, Roberto Mancini, Stefano Pioli, Unai Emery ou encore Marcelino. Lequel vous a le plus marqué ?
Je ne veux pas faire de jaloux (il sourit). Chacun avait sa personnalité. D'une certaine façon, ils m'ont tous prévenu sur le travail à accomplir, sur les faits de jeu, sur la nécessité de vouloir toujours faire plus, toujours progresser. Ils m'ont éveillé sur plein de choses et aujourd'hui, je me souviens des phrases que me disait (Claudio) Ranieri (son coach à Monaco) : "Attention, tu ne seras bientôt plus un jeune ! À 23 ans, c'est fini !" Il voulait me faire comprendre que l'indulgence serait vite terminée. Mancini me parlait beaucoup de situations de jeu, des choses simples, sur le coup, quand tu es jeune, tu te dis que c'est évident, tu prends ça à la légère parfois, mais les conseils te reviennent ensuite.
C'est avec Diego Simeone que vous avez travaillé le plus longtemps.
"Cholo", l'énergie qu'il dégage, c'est incroyable. C'est quelqu'un qui croit toujours en lui, qui te transmet ça. C'est un passionné. Chaque match, chaque entraînement, même un lundi après une victoire 3-0, il est encore derrière toi. C'est un "bousillé" du foot, on le voit dans sa façon de vivre le match sur son banc de touche. Mais tactiquement aussi, il est très fort.
Joueur, il évoluait au même poste que vous. Vous donnait-il des conseils particuliers ?
Oui, forcément. Il me disait comment ça se passait quand il était joueur, les sensations qu'il avait. Il me conseillait beaucoup par rapport à mon placement, par rapport aux situations de jeu, quand tu as le ballon, quand tu ne l'as pas, quand tu es dans ton camp, quand tu es de l'autre côté.
Avec Rongier, Veretout ou Guendouzi, vous allez retrouver la concurrence des grands clubs dans votre secteur de jeu. Comment l'appréhendez-vous ?
Si je n'ai pas cette concurrence, je ne me sens pas vivant. C'est ce qui nous permet à tous d'avancer, d'être meilleur chaque jour. C'est aussi pour cela que je suis venu à l'OM, cette passion, cette pression. J'ai toujours été habitué à ça, j'ai besoin de cette dose d'adrénaline. Quand je suis arrivé à Séville, j'ai dû vivre cette concurrence face à (Ivan) Rakitic qui était dans la force de l'âge, (Hedwiges) Maduro qui était international néerlandais, (Gary) Medel qui était international chilien. À 18 ans, j'ai dû m'habituer à ce genre de situation.
Il faudra aussi s'habituer à jouer tous les trois jours dès le mois d'août, avec possiblement un barrage de Ligue des champions à la fin du mois. Comment appréhendez-vous ce calendrier ?
On va être honnête, ce n'est pas l'idéal. On aurait tous aimé avoir ce temps de préparation supplémentaire. Mais le côté positif, c'est qu'on sait ce qui nous attend, on se prépare en conséquence. Notre premier match officiel (troisième tour de qualification de C1, contre le vainqueur entre le Dnipro, UKR, et le Panathinaïkos, GRE), c'est le 8 ou le 9, on répartit notre charge de travail différemment. Ça change aussi la composition de l'équipe, le club essaye de constituer l'effectif le plus vite possible. Mais on doit s'adapter, c'est la qualité principale d'un footballeur. »