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Combattant, buteur régulier, polyvalent... Mbemba s'occupe de tout à l'OM
A la fois solide défenseur et régulièrement buteur, comme il l'a encore prouvé lors de la demi-finale aller de Ligue Europa contre l'Atalanta Bergame jeudi dernier (1-1), le Congolais s'affirme à l'OM dans des registres différents.
Tant pis pour ceux qui veulent la paix : Chancel Mbemba, c'est la « guerre », le terme qui revient dans tous ses discours, suggérant qu'il vit par et pour le combat. Trompeur, car la palette du défenseur est infiniment plus variée. Arrivé à Anderlecht en 2011, il est apparu en équipe première deux ans plus tard, freiné par une controverse sur son âge réel. Il affiche 29 ans aujourd'hui et présente un bagage de joueur expérimenté, qui n'a pas seulement travaillé sa force physique.
À Bruxelles, il sortait de son appartement le soir pour enchaîner les sprints en côte dans une rue voisine, la tête cachée sous une capuche. « Leader silencieux du vestiaire », selon Igor Tudor, son entraîneur à l'OM la saison dernière, il n'a pas besoin de mots pour donner l'exemple et son influence parle pour lui : avec Mbemba, Marseille gagne 53 % de ses matches. Sans le Congolais (83 sélections, 6 buts), le ratio tombe à 20 %. Heureusement, il sera ce jeudi soir à Bergame pour disputer la demi-finale retour de Ligue Europa.
Le combattant
« Si vous êtes attaquant, vous avez peur de vous approcher »
Il est plus facile d'aller au contact avec un physique qui inspire la crainte, et Mbemba est bien outillé de ce côté-là. « Tout est costaud chez lui. Si vous êtes un attaquant, vous avez peur de vous approcher ! Waouh, il faisait très mal dans les duels, s'exclame John van den Brom, l'entraîneur qui l'a lancé à Anderlecht. Il était si fort, sautait si haut. Il était toujours là pour mettre sa tête. »
À Marseille, sa proportion de duels gagnés, au sol ou dans les airs, est pourtant inférieure aux chiffres de Leonardo Balerdi et Samuel Gigot. Mais l'ancien joueur de Newcastle (2015-2018) sait s'arracher pour compenser un placement parfois aléatoire, en commettant moins de fautes que ses collègues. Il n'a reçu que trois avertissements cette saison avec l'OM, même si cela n'empêche pas Jean-Louis Gasset de filer la métaphore guerrière. « C'est un soldat, un homme sur qui vous pouvez compter, souffle le technicien marseillais. Même diminué, il va au bout des choses. »
Ses douleurs au genou gauche n'ont pas altéré son explosivité. « C'est son truc le plus impressionnant, lié à sa détente et à sa vitesse sur les premiers pas, observe Alexandre Teklak, ancien défenseur belge qui le suit comme consultant TV. Il était extrêmement engagé, aimait les défis, avait été excellent face à Zlatan Ibrahimovic contre le PSG en C1 (1-1, le 5 novembre 2013). Et il a grandi au contact de Pepe à Porto (2018-2022). Il a structuré son jeu, plus serein, moins fougueux. » Mais encore rugueux.
Le buteur
« Avec sa détente et son timing, il était un fantastique joueur offensif »
C'est flatteur pour Mbemba et inquiétant pour les attaquants marseillais : avec 7 buts toutes compétitions confondues en 2022-2023, il était le meilleur buteur de l'effectif derrière Alexis Sanchez (18), et il se place cette saison juste derrière Pierre-Emerick Aubameyang. Il a marqué treize fois depuis qu'il est à l'OM et son dernier but était aussi crucial que magnifique, car il a égalisé d'une frappe enroulée du droit contre l'Atalanta (1-1, jeudi dernier).
D'ordinaire, il brille à l'intérieur de la surface, autant du droit que de la tête même s'il mesure seulement 1,82 m. « Il a beaucoup plus de détermination que quiconque dans les zones dangereuses, et attire naturellement le ballon, estime Sébastien Desabre, le sélectionneur du Congo. Comme il est aussi adroit devant le but, il est récompensé avec un jeu de tête au-dessus de la moyenne. » À Anderlecht, ses caractéristiques en avaient fait une cible privilégiée sur coups de pied arrêtés. « Avec sa détente, son timing, il était un fantastique joueur offensif. On ne l'a pas travaillé, c'est un talent qu'il avait en lui et j'ai vu qu'il ne l'a pas perdu », sourit Van den Brom, pas surpris quand on lui dit que Mbemba est devenu, avec six buts, le défenseur marseillais le plus prolifique de l'histoire en C1, C2, C3 et C4.
« Il casse des lignes par la passe ou en se projetant »
Mbemba est le défenseur de l'OM qui porte le plus le ballon vers l'avant, et il a fait gagner 3, 214 km à son équipe depuis le début de saison. Seul le milieu Amine Harit fait mieux. « Il est capable de faire du lancement de jeu en conduite de balle, analyse Desabre. On utilise cet aspect de son jeu, notamment quand il joue à trois défenseurs, sur son côté droit préférentiel, car il sait apporter le surnombre à l'intérieur. Avec son exceptionnelle vision du jeu, il casse des lignes par la passe ou en se projetant. »
Ce n'était pas acquis à Anderlecht. « Il avait une capacité naturelle d'infiltration, il poussait son ballon mais c'était rudimentaire. Il a dû améliorer sa conduite mais c'est normal car il a fait sa postformation chez les pros, note Teklak. Il a aussi travaillé ses diagonales, son jeu long. »« Techniquement, il n'était pas top, confirme Van den Brom. Il était parfois nonchalant avec le ballon et je vois là qu'il est bien plus concentré. »
« Il a aussi joué au début de sa carrière en numéro 6 »
Luis Enrique n'est pas le seul entraîneur qui aime dépayser ses joueurs. À Anderlecht, Van den Brom a vite fait visiter le couloir droit à Mbemba. « Tout le monde savait qu'il était un vrai central, se souvient le Néerlandais. Il était plus précieux dans l'axe, il n'y a pas de débat, mais ça lui a servi pour son développement. »
Cela a été aussi utile à Gasset, qui l'a placé plusieurs fois sur le côté pour pallier la pénurie de latéraux. « Il fallait trouver quelqu'un de très intelligent et qui allait se sacrifier, expliquait-il après la victoire contre Montpellier (4-1, le 25 février). On a trouvé l'homme idéal, parce que dans le sacrifice, c'est un client. »
En Belgique, Mbemba avait volontiers peaufiné ses centres. « Il s'appliquait du mieux qu'il pouvait mais la flexion de son pied d'appui montrait que ce n'était pas naturel pour lui, se rappelle Teklak. À trois, il est parfait en axial droit pour accompagner un mec moins à l'aise dans les grands espaces, mais je préfère le voir à quatre car il compense énormément de coups. »« À trois, il participe plus au jeu offensif, appuie Desabre. Il est intéressant dans les animations car il a aussi joué au début de sa carrière en numéro 6, avec un abattage important. » Tourné vers le collectif, il est prêt à être aligné partout, et c'est d'abord un état d'esprit.