par Baioko » 02 Déc 2003, 13:05
voila l'interview
Une Interview recueillie par Patrick FANCELLO
9 heures, hier matin. La pluie frappe sur les vitres du Sofitel Vieux-Port. Dans la tête de Robert
Louis-Dreyfus, c'est le tir assassin de Fiorese qui revient taper avec la même insistance. Ça martèle dur.
L'actionnaire majoritaire de l'OM n'a pas encore avalé le petit déjeuner et le voilà cueilli à l'entrée de la
salle par la Une de La Provence barrée du titre : "L'OM ne méritait vraiment pas ça. "
- Bonjour monsieur. Dans la foulée du Real, nous voilà forcément répétitifs..."
"En effet. Mais le Real en avait encore pas mal sous le pied. Hier, en plus, on n'a pas été vernis. Il y avait quand même penalty sur Vachousek. L'an dernier, nous avions la chance avec nous. Maintenant, elle nous fuit.
Même Runje est malheureux d'avoir repoussé le ballon sur Fiorese."
- Peut-être est-il aussi perturbé ?
"C'est possible. Les conditions étaient difficiles et on n'a pas été mal globalement. Seul Sytchev a été inexistant. J'ai l'impression que les adversaires l'ont étudié à la video et qu'il ne surprend plus."
- Vous semblez avoir mal dormi...
"Très mal. Et pratiquement pas. Nous avons mal joué les dix premières minutes, mais après, Paris a réussi à marquer à la dernière minute sur sa seule occasion. Perdre, cela arrive mais de cette manière !"
- Justement, il y a encore une défaite au bout. Cela doit-il inciter au pessimisme ?
"Non. Je trouve par exemple que nous prenons peu de buts quand Christanval est là. Et le foot c'est d'abord la défense, même si les paillettes sont importantes. Christanval rayonne sur les autres défenseurs dont les prestations sont bien meilleures. J'espère que nous récupérerons Dos Santos en janvier car il est lui aussi un élément important, y compris dans le vestiaires. Les satisfactions viennent aussi de Meriem et de Vachousek même si celui-ci peut mieux faire.
Drogba et Mido ont montré qu'on ne pouvait plus hésiter à les mettre ensemble au moment de bâtir l'équipe. Je dois dire aussi que devant Paris, l'OM a pris peu à peu l'ascendant grâce au travail de Celestini et Hemdani qu'il est également difficile de dissocier."
- En clair, il faut continuer à travailler dans le même sens. Mais le moral n'est-il pas atteint ?
"Dans le vestiaire, les joueurs étaient détruits. Je suis repassé une heure après la fin du match et Brahim Hemdani était toujours là !"
- Que lui avez-vous dit ?
"Je lui ai simplement tapé amicalement sur l'épaule. Je ne peux pas intervenir, ce n'est pas mon rôle mais celui de Bouchet et Perrin."
- Les joueurs doivent quand même sentir que vous êtes proche d'eux !
"Je pense qu'ils s'en rendent compte. Je vais toujours dans le vestiaire avant et après le match. Mais je m'abstiens d'y aller à la mi-temps quand ça ne va pas, comme par le passé."Pour en revenir à votre question précédente, je dirai que si je dois avoir une petite crainte, c'est que les joueurs perdent confiance à cause des résultats "
- Deux défaites dans la semaine au Vélodrome, c'est lourd...
"Contre le Real, les joueurs ont tout donné. Je crois qu'il s'agissait de la bonne photo entre Marseille et un super club. Même si nous avions égalisé une deuxième fois, je ne suis pas sûr que nous aurions pu obtenir le nul. Le Real est au-dessus. Paris non.
"La qualification en Ligue des champions, c'est contre les Portugais que nous l'avons loupée. A domicile et surtout chez eux, privés de Deco. Je n'ai jamais vu une aussi mauvaise première mi-temps que ce soir-là. J'ai suivi le match à la télévision et c'était encore pire qu'au stade. Parce que j'ai revu au moins dix fois le
ralenti de ce but idiot où l'on ne sait pas si Alenitchev veut tirer ou centrer. Ça fait râler. "
- Tout ceci mis bout à bout, il n'y a pas de quoi être rassuré avant la venue de Monaco !
"Ce match sera importantissime. Pour les points et le moral. Jusqu'à la trêve, il faudrait réaliser un carton plein. La chance va finir par tourner."
- Ne trouvez-vous pas curieuse la coïncidence du revirement de tendance au moment de ce que l'on a appelé l'affaire Barthez?
"Ce que je constate, c'est que depuis cette histoire, Runje ne réalise plus d'arrêts déterminants. "
- Quel est votre avis sur la négociation de cette transaction par les dirigeants de l'OM ?
"Je suis convaincu que des assurances leur ont été données. Mais peut-être n'ont-ils pas tapé aux bonnes portes."
- Ne pouviez-vous pas le faire vous-même ?
"Seulement si on me l'avait demandé. J'aurais pu appeler Sepp Blatter (le président de la FIFA, ndlr). Je ne l'aurais pas fait pour régler le problème, mais pour avoir une réponse claire, oui ou non Barthez pouvait-il venir à Marseille. Au moins, il n'y aurait pas eu ce cafouillage. "
- L'avez vous dit à Christophe Bouchet ?
"Oui. Il faut être juste avec Bouchet et Perrin. En dix-huit mois, ils ont accompli un super boulot.
Christophe s'est séparé des gens qu'il fallait et l'entourage a changé. Perrin a fait du bon travail au niveau recrutement, tactique... Peut-être y-a-t-il eu un excès de confiance comme cela arrive parfois quand tout va bien. On se croit arrivé et puis...
"Cette histoire est minus dans un bilan très positif mais elle a, semble-t-il, produit un grand effet.
(Il réfléchit) Ferguson m'avait appelé cet été pour Barthez. Christophe et Perrin m'avaient alors dit non.
- Peut-être à cause du tarif ?
"Non. C'était le même deal."
- Cela montre, en tout cas, qu'Alain Perrin ne nourrit pas de rancune envers Runje depuis l'an dernier ?
"Peut-être cela a-t-il changé après l'article paru dans France Football (numéro du 16 septembre 2003, ndlr)."
- Vous discutez souvent avec Bouchet et Perrin ? "
J'ai Christophe tous les jours au téléphone. Mais je suggère plus que je ne dis. Perrin, ce n'est pas mon rayon."
- Il vous arrive quand même de lui donner votre avis ! Par exemple dimanche soir...
"J'ai trouvé que son choix offensif du départ était bon. Mais je n'ai pas compris pourquoi il avait autant tardé à sortir Sytchev. Après coup, évidemment, la remarque était facile..."
- D'autant plus facile qu'on lui avait reproché l'inverse à Madrid, pour avoir trop vite condamné Marlet...
"C'est vrai. "
- Tous les arguments sportifs peuvent être plaidés. En revanche, au niveau financier, une seule ligne semble prévaloir : équilibre et Indépendance...
"Ce n'est pas devenu une obsession mais une nécessité pour limiter les risques de dérives. Aujourd'hui, tout le monde est raisonnable."
- Tant mieux si le club n'a plus besoin de taper dans votre p o r t efeuille. Mais dans le cas où une vraie opportunité se présente..?
"Le transfert est une chose. Mais il faut ensuite pouvoir assurer le salaire du joueur. "
- Si par exemple au mercato, vous pouviez rattraper un loupé...
(II coupe) Gallardo ? On ne le ratera pas une deuxième fois. "Récemment, je me suis rendu deux fois en Argentine pour le boulot et j'ai assisté à des matches. Un pote m'a parlé de l'avant-centre d'Independiente dont nous n'avons d'ailleurs plus besoin. Cet été, il nous avait été proposé pour un prix multiplié par dix ! Quand ils'agit de l'OM, les prix flambent."
- Ils doivent aussi flamber pour les autres clubs réputés fortunés ?
"C'est pourquoi il y a beaucoup de joueurs surcotés et surpayés. Elber vaut-il encore 5 millions d'euros ?"
- Il reste la formation...
"Il paraît que nous avons trois nouveaux jeunes prometteurs. L'important, c'est aussi de pouvoir les faire jouer. "
- Christophe Bouchet dit qu'il faudrait des clubs filiales comme en Espagne pour aguerrir ces jeunes...
"S'ils ont le niveau, on peut les prêter une saison au Standard de Liège."
- Les grands clubs ont quasiment tous des soucis financiers. Quelle est la règle à respecter pour ne pas sombrer ?
"On ne peut pas équilibrer un budget si la masse salariale dépasse la moitié du chiffre d'affaires. A l'époque où je n'avais pas encore compris ça, les salaires représentaient à l'OM 75 % du chiffre d'affaires.
"La DNCG, c'est bien, mais elle doit être européenne. Sinon, ça ne sert à rien. Il y a deux poids et deux mesures.
"Arsenal va être obligé de vendre Thierry Henry car le club est à la rue. Les salaires dépassent probablement les 50 % du CA et il y a le projet de construction d'un stade. A ce niveau, la Champions League fait la différence. Arsenal passe péniblement le premier tour... "
- Les clubs sont-ils condamnés à attendre l'arrivée hypothétique de milliardaires comme Abramovich à Chelsea ?
"Avec une politique inverse, c'est-à-dire concentrée sur les jeunes, Stuttgart est en tête du championnat d'Allemagne.Il y a donc d'autres formules. Le tout est de savoir combien de temps Stuttgart sera capable de garder son équipe.
"A mon avis, si Auxerre a connu un mauvais début de saison, c'est que la plupart de ses éléments se voyaient déjà ailleurs, Il est logique qu'un joueur ait le moral dans les chaussettes quand on lui a fait miroiter un salaire multiplié par vingt. Je suis convaincu que Cissé était persuadé de partir. Boumsong aussi.
- Abramovich peut donc déréguler un marché redevenu, plus sage...
"Non, parce que ça ne concerne que les super joueurs. Globalement, on va quand même vers le raisonnable. Des gars aussi riches que Roman Abramovich. ou le cheikh intéressé par le rachat de Leeds, il doit y en avoir cinq dans le monde. A Fulham, Mohamed Al-Fayed n'a pas l'argent pour suivre."
- Et ça marche pour Chelsea, leader du champlonnat !
"Oui. Je suis étonné que çà prenne aussi vite."
- Aimeriez vous copier quelque chose à Manchester United ou au Real Madrid ?
"Le système des socios me parait assez intelligent. A Manchester, ils sont propriétaires de leur fauteuil qu'ils se transmettent. A Madrid, 120 000 membres paient 1000 euros par an.
J'y ai réfléchi pour l'OM mais on se heurte à un problème de législation. "
- Vendredi, l'AS Monaco sera au Vélodrome. Encore un sacré client...
"En trois ans, Monaco a réussi à avoir une équipe qui survole, le championnat. Deschamps est un bon entraîneur, Perrin aussi. Bernardi était à Marseille; Squillaci vient d'Ajaccio...
- Justement, qu'est-ce qui fait la différence entre l'OM et Monaco ?
"C'est Giuly ! Il marque quand il faut. Avec Courbis, en l998, nous étions sur lui quand il a été transféré de Lyon. Les deux premières années, il n'a pas été transcendant et il s'est ensuite blessé. Quand on est sûr de la qualité des gens, il faut de la patience et ça finit par payer."
- A l'OM il faut donc de la patience avec des garçons comme Meriem; Mido, Drogba... L'échéance de ce vendredi n'en demeure pas moins déterminante...
"C'est pourquoi je qualifie ce match d'importantissime. Pour moi, c'est le tournant de la saison. Sinon, on sera relégués à douze points et c'est énorme."
- On vous prête l'intention de racheter "Sportfive", la société de commercialisation de droits sportifs de Jean-Claude Darmon...
"C'est possible en effet, avec lui. C'est en rapport avec d'autres droits dans le foot comme ceux de la Coupe du monde 2006. Un business à part de l'OM. Quoique, l'OM, ce n'est pas le business."
- Une dernière question. Vous qui vivez en Suisse, pas très loin d'Ernesto Bertarelli, avez-vous été surpris que Marseille ne soit pas retenue pour la Coupe de l'America ?
"Non. Marseille a présenté un bon dossier mais la ville n'a pas été soutenue et mise en valeur, au niveau national comme a pu le faire le roi d'Espagne avec Valence. Et puis, Marseille a eu la malchance que les Suisses arrivent pendant la grève des éboueurs.
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