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Bien sûr, à trente ans, rien n'est vraiment fichu. Camel Meriem peut renaître au foot de très haut niveau pour une poignée de saisons. Mais à son âge, Zidane avait déjà tout connu. L'homme auquel le comparait la rumeur claquait une volée mythique en finale de C1. Meriem, né en 1979, a dû rater une marche, vu l'itinéraire de ses partenaires finalistes de l'Euro Espoirs 2002, moins talentueux, et qui poursuivent pour la plupart une carrière honorable en L1 ou ailleurs. Escudé fait même partie de Bleus. Meriem, lui, n'a finalement jamais éclos. Au point de se rendre transparent aux yeux de la L1 dans la foulée de sa fin de contrat à Monaco en 2009. En raison de ses propres refus et d'offres jamais venues, il n'a signé nulle part cet été et a attendu huit mois avant de filer à l'Aris Salonique, fin janvier. « C'est un garçon qui est passé à côté d'une belle carrière et c'est dommage, constate Elie Baup, son ex-entraîneur à Bordeaux (2002-2003). Un gâchis. Je me pose les mêmes questions que vous, et je le regrette pour lui car c'est quelqu'un d'attachant. »
Alain Perrin, qui l'a dirigé à Marseille au top de sa carrière (2003-2004), et qui le voulait à Saint-Etienne l'été dernier, cerne « un problème de gestion de carrière, du niveau de club auquel il aspire et de prétentions financières ». Lens s'y est heurté aussi. « Ce qu'il a montré ne suffisait pas pour attirer un club européen, mais il a évidemment un bon niveau L1 » rassure Perrin sur la valeur "réelle" du joueur, pour lequel personne en France n'a consenti d'effort. Les pistes pour expliquer ce déclin sont nombreuses. Dans le cas de l'ex-prodige sochalien, tous les facteurs se sont additionnés. Aucun n'a rattrapé l'autre.
A la racine, un très mauvais choix de carrière en août 2005. Après une rude saison à Bordeaux, il quitte le club à l'arrivée de Ricardo. Meriem a deux pistes : Monaco, finaliste de la C1 quinze mois plus tôt, et le FC Séville, un ambitieux d'Espagne qui remportera les deux prochaines coupes de l'UEFA. Il ne flaire pas l'équipe en éclosion et s'engage sur le Rocher pour quatre saisons de médiocrité collective et de promesses individuelles rarement tenues, avec entre autres une grave blessure au genou. Mais la fragilité physique n'explique pas la réserve des clubs à l'égard de Meriem. Depuis 2001, il n'a jamais joué moins de 25 matches par saison. A plusieurs postes, ce qui a pu le desservir... « C'est un joueur qui a un très grand registre offensif, mais n'est pas assez finisseur, souligne Perrin. Dans la concurrence avec les autres, certains étaient plus buteurs que lui. » Mais l'ex-Stéphanois nie que son poste ait été introuvable. « C'est un 8/10, relayeur ou offensif, axial. »
Son mental était-il au niveau ? Perrin encore : « Il y avait chez lui une forme de réserve, de timidité. Cela dit, j'étais très satisfait de lui. Ce n'est pas un garçon agressif mais c'est un compétiteur. Dans un groupe, il n'est pas compliqué. Il pense moins à lui qu'à la collectivité. Peut-être manque-t-il un petit peu de personnalité. » « On le poussait pour aller plus loin, confirme Baup. Dans les discussions avec lui, on sentait une volonté, mais il faut le traduire sur le terrain. » De fait, Meriem a décroché à Bordeaux quand Feindouno et Savio sont arrivés dans le groupe. Camel Meriem, ou l'énième preuve que le talent n'est qu'une base nécessaire pour faire carrière, en aucun cas une dotation suffisante. « Juste une anecdote, nous propose Baup. A son arrivée, après les premiers entraînements, on lui a demande : mais tu es droitier ou gaucher ? Lui-même ne savait pas. Il jouait aussi bien des deux pieds. Je ne parle pas des gestes de bases mais d'une véritable adresse sur le plan technique. » Salonique a sûrement fait une très belle affaire.