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Si l'OM est à la peine avec ses gardiens de but, le Stade de Reims ne se plaindra pas des performances de son portier, le surprenant Édouard Mendy (26 ans, 1,97 m, 86 kg). Avec 13 buts encaissés en 14 journées de championnat (dont 8 en deux matches : 4 contre le PSG et 4 contre Amiens), le promu champenois s'appuie en effet sur la quatrième défense de L1.
Les arabesques et les parades du Franco-Sénégalais, qui a gardé ses cages inviolées par huit fois (72 ballons captés et 24 détournés selon la LFP), n'y sont pas étrangères. Cet après-midi, le public du stade Vélodrome le découvrira grandeur nature. Pas l'OM. Car c'est à Marseille que Mendy a vu le bout du tunnel pour reprendre le cours d'une carrière au parcours sinueux. Cela ne tombait pas sous le sens quand cet escogriffe a posé sa carcasse dans la cité phocéenne en tant que quatrième gardien, à l'été 2015. Il sortait à l'époque d'une année de chômage après trois saisons à Cherbourg (en National, puis en CFA) et un lapin posé par un agent peu scrupuleux.
Un an de chômage avant l'OM
Bac et BTS de commerce en poche, mais sans club, le natif de Montivilliers, près du Havre, avait toutefois trouvé refuge au HAC pour garder le cap. Là où il avait intégré la fameuse école des gardiens du club doyen quelques années auparavant, sans pour autant y percer. Plus qu'un symbole pour celui qui avait fait ses premières gammes à Caucriauville, le club du quartier éponyme d'où sont sortis, notamment, Mamadou Niang et Souleymane Diawara. "Il est revenu vers moi et j'ai accepté de le prendre sans licence pour qu'il s'entraîne avec l'équipe en CFA. Quand il est revenu, on voyait clairement son potentiel", rembobine Michel Courel, le grand manitou de la pouponnière des portiers depuis 20 ans, qui a accompagné l'éclosion de Steve Mandanda, Brice Samba et Zacharie Boucher.
Il aura ensuite fallu l'appel de Ted Lavie, son ex-coéquipier à Cherbourg, pour l'orienter vers l'OM. Et son essai, effectué sous la direction de Stéphane Cassard, l'actuel entraîneur des gardiens, s'est avéré concluant.
Arrivé à Marseille quelques semaines avant le départ fracassant de Marcelo Bielsa, Mendy a appris dans l'ombre d'Il Fenomeno, son premier modèle, tout en suivant les conseils avisés de Yohann Pelé. Sur le terrain, en revanche, il n'a pas ou peu joué ; Thomas Fernandez, coach de la réserve, lui préférait souvent Florian Escales, qui est toujours le troisième portier de l'effectif. Titularisé sept fois en CFA et laissé sur le banc à huit reprises durant cette "saison de réalisation", dixit Courel, Édouard Mendy y a côtoyé Maxime Lopez, Boubacar Kamara ou encore Christopher Rocchia. Il avait aussi été retenu dans le groupe de Franck Passi pour la finale de coupe de France contre le PSG (photo ci-dessus). "Ça reste une très belle expérience pour lui, poursuit l'éducateur havrais. S'y voir lui a apporté une source de motivation."
L'OM, où son talent n'est pas passé totalement inaperçu durant les oppositions, aurait pu le conserver dans ses rangs. Mais Reims, qui lui offrait d'autres perspectives, a remporté la mise en lui faisant parapher son premier contrat professionnel. Un autre club historique dans lequel le cousin de Ferland (OL) s'est affirmé comme un titulaire indiscutable la saison dernière (avec pas moins de 18 clean-sheets en 34 rencontres), glanant au passage le titre de champion de France de L2.
Pour sa première expérience en L1, il brille de mille feux et surprend tous les observateurs, non sans écoeurer ses adversaires. Si bien que le pur produit haut-normand aux origines bissao-guinéennes par son père et sénégalaises par sa mère a connu sa première cape avec les Lions de la Teranga, voilà deux semaines. Pas surpris, Courel, qui loue son humilité exemplaire et son entourage, énumère : "Édouard a une très grosse explosivité, il est très coordonné, s'allonge bien, il a de bonnes mains, une bonne lecture du jeu aérien, un jeu au pied propre et, surtout, une vraie volonté de ne pas prendre de buts. Derrière sa défense, il dégage quelque chose !"
Mandanda, Mendy... "On pourrait faire un parallèle entre les deux sur leurs qualités, mais ils n'ont pas le même parcours. Steve avait un gros potentiel très jeune alors qu'Édouard a galéré. Mais il en avait besoin pour se forger", note le Havrais, qui insiste : "Il a d'énormes qualités humaines, il est sérieux, droit, loyal, travailleur. Je suis heureux qu'un garçon comme lui y arrive". Cet après-midi, Michel Courel aura une double satisfaction avec deux de ses poulains face à face. "Ils se sont connus à Marseille, mais ils ont un fil commun qui les relie au Havre. Humainement, c'est beau de voir ces garçons passés par la maison se réaliser."
Et tant pis si Steve Mandanda carbure à la soupe à la grimace ; Édouard Mendy, lui, tourne au champagne !
La Provence