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« J’ai envie de revenir en Ligue 1 »
L’attaquant Bilal Boutobba espère retrouver la France deux ans après avoir quitté Marseille pour le Séville FC. Une expérience qui a modifié sa perception de son métier. BILEL GHAZI
« Comment votre aventure au Séville FC se déroule-t-elle ? Au moment de mon arrivée, j’ai pu effectuer la reprise estivale avec le groupe professionnel. Le club m’a ensuite invité à rejoindre la réserve, le temps notamment d’apprendre la langue. Mais la situation n’a pas évolué depuis. J’ai donc évolué avec la réserve, en D 2 (reléguée en D 3 cet été). Cela m’a quand même permis de jouer à un niveau relevé, face à de bonnes équipes. J’ai vraiment appris beaucoup de choses.
Lesquelles ? J’ai grandi, j’ai pris en maturité et j’ai compris ce que c’était d’être exigeant dans l’exercice de mon métier. Lorsque j’étais plus jeune, sincèrement, je ne travaillais pas assez. Et pour réussir, il faut bosser sans cesse et être vigilant dans le travail invisible. J’ai aussi appris sur la vie, la vraie. Je me suis retrouvé seul, loin de tout le monde. Et j’ai très rapidement compris que tout allait très vite dans le football.
Avez-vous le sentiment d’avoir été oublié ? Il y a trois ans et demi, à l’OM, j’étais considéré comme un grand espoir du club. Au même titre que Maxime Lopez, qui est de ma génération. Mais comme je l’ai dit, tout va vite. À Séville, j’ai continué à progresser, mais je n’ai pas eu ma chance avec les professionnels. Donc, j’ai été un peu oublié. Et là, c’est un truc de malade. Les gens ne parlent plus de toi, beaucoup d’amis partent. Il y a seulement trois vrais amis qui restent à tes côtés. C’est tout. Alors qu’avant, j’étais une petite attraction du côté de Marseille et il y avait toujours beaucoup de monde autour de moi.
Qu’est-ce que cela vous inspire ? Je sais que pour réussir il faut que je travaille et que je ne me focalise que sur moi-même. Même si le football reste un sport collectif. C’est plus dans le sens où je dois travailler pour moi-même et ne pas me soucier de ce que peuvent penser les gens.
Du coup, regrettez-vous d’avoir quitté Marseille aussi tôt ? (Rires.) Tout le monde me pose la question et, non, pas du tout. Ici, j’ai vraiment grandi dans ma tête, j’ai progressé en étant confronté à une autre culture. À Séville, ça ne rigole pas. Les séances sont particulièrement longues et il y a beaucoup de vidéos. Si j’étais resté à l’OM, j’aurais probablement continué à faire des choses, au niveau du sérieux, que je ne répète plus depuis que je suis en Espagne. Je n’ai pas perdu deux ans, j’en ai gagné deux. Et je n’ai que dix-neuf ans. Je ne regrette rien. Même si j’ai envie de revenir en France, jouer en Ligue 1.
Quand vous parlez de sérieux, à quoi faites-vous référence ? Le football, c’est un plaisir, une passion. Mais c’est aussi mon métier. Avant, je n’avais tendance qu’à voir le côté jeu. Alors que chaque matin, lorsque je me lève, j’ai un contrat à respecter. À Marseille, j’allais surtout à l’entraînement pour rigoler avec des potes. Lorsque je montais avec les pros, je m’en foutais de tout. Je prenais le ballon, je dribblais tout le monde, je ne calculais personne et je n’écoutais pas ce que me disaient les cadres. Je pense que c’est ce côté insouciant qui plaisait à Marcelo Bielsa (qui l’a lancé en L 1 à seize ans, en décembre 2014) et j’en profitais. Aujourd’hui, je sais que, dans un groupe, il y a un cadre à respecter. »
L'Equipe