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STYLE DE JEU; L'OM sable le foot champagne; En attirant dans ses filets Roberto De Zerbi, l'Olympique va s'offrir l'un des meilleurs tacticiens d'Europe, dont le travail est vanté par le maître, Pep Guardiola. Sur le terrain, à quoi doivent s'attendre les supporters marseillais ?
Mai 2023, la Premier League referme l'un de ses plus palpitants chapitres. Quoi retenir ? Un énième sacre pour City, une bataille épique avec Arsenal et un roi sans couronne... Roberto De Zerbi. Nouvelle saison sans titre, certes, pour le jeune chef d'orchestre (45 ans). L'argument favori de ses rares détracteurs (français), qui citent avec sarcasme la Supercoupe d'Ukraine (2021), unique ligne à son palmarès. Mais l'Italien, apôtre du jeu, a encore marqué au fer rouge le sport qui dicte de sa vie. Cette fois, outre-Manche, au sein du championnat le plus relevé au monde, parmi les sommités de sa profession.
Brighton, son budget taillé pour le maintien, au mieux le ventre mou, De Zerbi en a fait, pour la première fois de son histoire un club européen (la C3, via la 6e place). Les Seagulls, un surnom placé sur la carte du football. Comment ? En leur faisant jouer une partition "unique au monde". "Je suis sûr que Roberto De Zerbi est l'un des managers les plus influents des vingt dernières années, adoubait alors le maître, sa référence, Pep Guardiola. Son équipe est comme un restaurant trois étoiles, qui change complètement la façon de percevoir la cuisine. Lui, réalise la même chose dans le foot."
En fera-t-il de même en Provence, où, à la surprise générale, celui que l'on attendait plutôt sur le banc du Bayern, Manchester United ou Liverpool, va bientôt signer un contrat de trois ans (lire ci-contre) ? "Dans ce style de jeu, il y a mon histoire, mon caractère, ma folie. Je n'en dévirai jamais", promettait l'intéressé lors d'un cours magistral, accordé aux médias du championnat anglais. Et l'ancien tacticien de Sassuolo de dévoiler ce menu dont salive le peuple marseillais depuis qu'il a dit "oui" à l'OM. "Balancer devant, chercher le coup de tête et aller récupérer le ballon sur un rebond, c'est un pari ! Et moi, je préfère le travail aux paris. Alors on travaille la relance courte depuis notre surface, les circuits de passes, les déplacements, pour ressortir à terre", insiste ce chantre de la possession et du jeu de position.
Si les fidèles du Vel' ont été récemment biberonnés aux longues conservations sous Jorge Sampaoli, ils devraient découvrir, grâce au 4-2-3-1 (modulable) cher à "RDZ", une autre façon de monopoliser la balle. Moins ronronnante, plus exaltante ou stressante (selon votre sensibilité). "Avec De Zerbi, on est à la limite du danger. Il va demander au gardien, à ses centraux de beaucoup participer, et même au double pivot de redescendre au niveau de sa surface, détaille Jean-Luc Arribart, consultant pour Canal + pour les rencontres de Premier League. L'idée est d'aspirer l'adversaire, de l'éliminer par des petites combinaisons, avant d'attaquer l'espace. Ça demande beaucoup de sang-froid, de sûreté technique. C'est risqué, mais lorsque ça tourne bien... c'est un régal à regarder."
L'une des obsessions du coach lombard est la recherche du fameux "troisième homme". Comprenez, en grossissant le trait, un jeu en triangle, en quête du joueur face au jeu, capable d'attaquer l'espace après un relais avec un pivot. Un système répété à l'envi sur toutes les zones du terrain, mais qui nécessite une coordination et une condition physique parfaites. "C'est un jeu très énergivore. Il y a du mouvement partout autour du porteur, des courses en profondeur... Et c'est aussi pour ça que Brighton a été moins performant cette saison, au-delà des départs de Mac Allister et Caicedo. Avec la Ligue Europa, ils étaient cuits. Attendez-vous à voir l'OM beaucoup, beaucoup courir, poursuit le Breton. Et pas forcément pour presser. De Zerbi est adepte du contre-pressing à la perte de balle. À fond pendant 5, 7 secondes. Mais le reste du temps, en phase défensive, il va proposer un bloc médian structuré."
"Tout est codifié. Tu n'as pas peur de prendre des risques"
Comptez sur lui pour ne rien laisser au hasard, entre la répétition à outrance des circuits aux entraînements, de longues séances vidéos et une étude minutieuse des rivaux. "Vu qu'il t'explique exactement comment l'adversaire se comporte, tu sais ce qu'il faut faire avec et sans ballon, salue Guillaume Gigliotti, son ex-protégé à Foggia (2014-2016). Tout est codifié. C'est rassurant et tu n'as pas peur de prendre des risques." "Par contre, il veut que ses joueurs s'expriment librement au sein de sa structure, précise Arribart. Il ne va brider personne." Certainement pas dans "les petits espaces" et "la surface adverse", où "le talent individuel est le seul à faire la différence", dixit De Zerbi. "D'où l'importance d'avoir un bon directeur sportif et un bon président, pour choisir les bons joueurs", glissait-il, jadis, sur un live Twitch en compagnie de Christian Vieri et Antonio Cassano.
Après avoir mis la main sur son bâtisseur, le tandem Longoria-Benatia devra lui fournir les bons outils. À commencer par "le gardien, les centraux et les deux milieux défensifs", qui sont à la base de son projet de jeu. Si l'on imagine aisément Leonardo Balerdi dans ses petits souliers, des réserves demeurent sur l'habileté, balle au pied, de Pau Lopez et celle des garçons amenés à faire battre le coeur du jeu. "Si l'OM n'est pas serein techniquement, ni prêt à faire les efforts, sur certains matches ça peut vite dégénérer parce que De Zerbi va insister..., alerte Jean-Luc Arribart. Le club va devoir recruter, c'est certain. Mais, une chose est sûre, il y aura du spectacle chaque week-end."
La Provence