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Aulas s'alarme après les incidents d'OM-OL : « La prochaine fois, il y aura des morts »
L'ex-président de l'OL Jean-Michel Aulas ne décolère pas contre la grave attaque subie par le car lyonnais. Et veut notamment des sanctions contre l'OM.
Toujours attentif à la situation de l'OL, dont il a été le président emblématique entre 1987 et cet été, Jean-Michel Aulas, 74 ans et actuellement à l'étranger, a donné mardi son point de vue pendant une demi-heure sur les événements qui se sont produits à Marseille, dimanche.
« Comment avez-vous vécu les incidents graves de dimanche soir en marge du match Marseille-Lyon ?
Avec beaucoup de tristesse, mais aussi beaucoup d'énervement. Malheureusement, ce sont des débordements qui se renouvellent souvent. J'ai comptabilisé au moins quatre à cinq histoires un peu identiques, sans blessé important, à part des coupures. On se rend compte que l'on a frôlé le drame avec des conséquences graves pour l'Olympique Lyonnais. Il y a la situation sportive, celle du club en général et cette blessure très grave de Fabio (Grosso) et de son adjoint. On a l'impression qu'on laisse faire les choses. Moi, je me souviens que, dans le car, j'étais auprès du délégué avec qui j'avais de bonnes relations. Il est important d'être au plus près de l'équipe quand on sait qu'il peut y avoir des incidents (John Textor n'y était pas). Le délégué me disait à chaque fois : "Il n'y a pas eu de blessé. On va faire un rapport. La commission va traiter le sujet pour que ça ne se renouvelle pas."
Je me souviens de l'époque de Mathieu Valbuena qui était pendu (sa marionnette) dans les tribunes... Et de plusieurs matches où l'on pensait que ça n'allait pas démarrer ou que ça n'aillait pas reprendre... Et à chaque fois, dans les commissions de discipline qui avaient lieu derrière, l'affaire était minimisée. Là, je suis un peu en auditeur libre, mais avec une certitude : cette fois-ci, il y a un blessé grave et la prochaine, il y aura des morts. Je suis ulcéré de voir qu'on ne prend pas toutes les précautions pour que ça n'arrive pas. Il y avait un certain nombre d'infos selon lesquelles les attaques étaient prévues.
Au vu des antécédents, comment le car de l'OL a-t-il pu être si mal protégé ?
Je ne veux pas être en porte-à-faux. J'ai envoyé un message à John (Textor) pour le soutenir. Je ne veux pas que mes prises de position puissent être interprétées dans un mauvais sens. Mais c'est vrai que c'est incompréhensible. Si on va rechercher l'ensemble des rapports établis pour les derniers matches à Marseille, on voit bien que le parcours et la protection du car de l'OL faisaient l'objet d'une attention très particulière. Là, on voit que l'escorte policière est très réduite. Elle est même arrêtée à un moment donné quand on arrive devant le fameux bar où les supporters sont regroupés. Je ne suis pas au courant du détail, mais je ne peux que constater que l'escorte est très inférieure à celle que j'ai connue à Marseille ou même à Saint-Étienne, où les forces de police prenaient toujours beaucoup de précautions pour éviter ce genre d'incidents.
Pour vous, même si les attaques ont lieu sur la voie publique, l'OM porte une part de responsabilité ?
Je suis membre du comex de la Fédé, du conseil d'administration de la Ligue, j'ai trente-six ans de présence dans le foot. Tout en prenant les précautions d'usage, je peux dire que l'on ne peut pas s'exonérer de toute responsabilité quand on est en charge d'un club ou de la force publique. Encore une fois, de la même manière qu'on ne peut pas s'exonérer des gens qui s'assimilent à des supporters de l'OL avec des attitudes fascistes, il y a une part de responsabilité du foot, du club (de l'OM) et bien sûr de la sécurité publique dans cette affaire. D'autant plus que c'était prévisible. Quand il y a eu des incidents par le passé à Lyon, les dirigeants ne se sont pas cachés derrière des événements qu'on ne maîtrisait pas. Les gens qui attaquent avec des boules de pétanque ou de pierres le car de l'OL, ce n'est pas par rapport à des idées politiques. C'est par rapport à un engagement sportif pour affaiblir l'équipe qui arrive en lui faisant peur. Les gens étaient terrorisés à l'intérieur du car.
Vous avez commencé à évoquer certains supporters de l'OL qui ont fait des saluts nazis, poussé des cris de singe et proféré des insultes racistes. Comment réagissez-vous à cela ?
C'est inadmissible. La plupart des 600 supporters lyonnais se sont révoltés contre ce groupuscule d'une quinzaine de personnes qui s'est inséré dans le dispositif à l'insu des organisateurs. C'est insupportable. C'est facile de retrouver les auteurs. Il y a des caméras. Il faut qu'ils soient jugés et exclus.
Ces dérapages graves ont existé quand vous étiez président de l'OL. Pourquoi le club n'a pas encore réglé ce problème ?
Au début de ma présidence, j'ai fait radier une association. Plus tard, on a procédé à des interdictions de stade. Vous savez, les sanctions que prend l'Olympique Lyonnais sont toujours supérieures à celles de la justice.
Estimez-vous normal que le match soit reporté ?
Il ne faut pas que le match soit reporté mais que les sanctions tombent, cette fois-ci, de manière définitive. Si on reporte le match, on donne la possibilité aux auteurs et à ceux qui les regardent, de recommencer.
Vous souhaiteriez que l'OM ait match perdu ? (Une hypothèse qui n'est pas envisagée puisque c'est la commission des compétitions et non celle de discipline qui va traiter le dossier cette semaine. Or, cette instance n'a pas de pouvoir de sanction et doit juste se prononcer sur la reprogrammation du match. )
Je laisse aux gens qui en ont la responsabilité de décider de le faire en leur âme et conscience. Mais il faut une sanction très lourde. Sinon, la prochaine fois, il y aura des morts. Fabio aurait pu perdre un oeil. »