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Adepte de possession, gros travailleur et fort caractère : Gattuso, la gueule de l'emploi pour entraîner l'OM
Pour remplacer Marcelino, l'OM a choisi en Gennaro Gattuso un entraîneur au caractère affirmé et à l'expérience éprouvée, qui sait où il met les pieds.
Une immense carrière de joueur ne garantit pas la réussite d'un entraîneur et Gennaro Gattuso a vite compris l'importance et la difficulté de la reconversion. C'était même le sujet de sa thèse, quand il avait obtenu le diplôme à Coverciano, en 2014 : le passage d'une carrière de joueur à un rôle d'entraîneur. Pour l'instant, l'ancien milieu de terrain n'a pas atteint les mêmes hauteurs dans sa deuxième vie que dans la première, mais il a déjà affirmé un style et une méthode.
Le style de jeu : pas seulement italien
Pour avoir une idée du football selon l'entraîneur Gennaro Gattuso, il faut dépasser les clichés bien connus sur les entraîneurs italiens, qui seraient tellement obsédés par la défense qu'ils en oublieraient tout le reste. Le mieux est peut-être d'écouter Luis Enrique, un connaisseur.
Interrogé sur son équipe de Liga préférée au fil d'une des mémorables sessions Twitch qui ont occupé son séjour à Doha, pendant la dernière Coupe du monde, l'ex-sélectionneur espagnol n'hésitait pas : « J'adore regarder le Valence de Gattuso. Il vient du football italien et on pourrait penser que c'est un entraîneur défensif mais c'est tout le contraire. Il a changé la mentalité de ses joueurs. J'aime voir évoluer cette équipe parce qu'elle a des mécanismes pour jouer au ballon et attaquer depuis l'arrière. Ils arrivent à trouver les espaces avec facilité, et j'aime aussi l'énergie de Gattuso, un animal de compétition. »
Au cours d'une carrière d'entraîneur entamée tôt, quand une maladie neuromusculaire au niveau de l'oeil l'a obligé à raccrocher les crampons, en 2013, l'ancien Milanais a évolué. D'abord focalisé sur les couvertures et les équilibres, comme tout bon Italien, il privilégie aujourd'hui la construction depuis l'arrière et la capacité de son équipe à faire circuler le ballon, avec une participation du gardien, sollicité dans le jeu au pied. Il préfère le 4-3-3, et aime que ses équipes attirent l'adversaire sur un côté pour mieux renverser ensuite et profiter de la supériorité numérique.
Le quotidien : du travail et du caractère
Personne n'a oublié « Ringhio » Gattuso, le milieu de terrain grognard et travailleur du Milan des années 2000, qui n'avait pas les pieds les plus fins ni le caractère le plus doux de l'équipe. Mais, devenu entraîneur, le champion du monde 2006 s'est lassé, au fil du temps, d'être sans cesse ramené à cette image, pour lui trop réductrice.
Au quotidien, Gattuso est d'abord un gros travailleur, qui passe ses journées au centre d'entraînement, du matin au soir. « Je comprends qu'il en ait marre qu'on le compare encore au joueur qu'il était parce que, comme entraîneur, il met tellement d'autres choses, témoigne le dirigeant italien Walter Sabatini, qui avait repéré Gattuso à Pérouse, au milieu des années 1990, et en est resté proche. Il a le tempérament, bien sûr, c'est un homme courageux et sincère, mais il est surtout très préparé tactiquement. »
Son Napoli, par exemple, a été capable de matches spectaculaires, notamment à l'automne 2020, quand il avait volé sur l'Atalanta (4-1) ou l'AS Rome (4-0), mais il a aussi connu de vraies périodes creuses, ce qui est souvent le cas avec ses équipes, comme avec l'AC Milan ou le Valence CF récemment. Un manque de turnover, pas assez d'options quand l'adversaire trouve la parade, un essoufflement des joueurs : les arguments avancés diffèrent mais le constat demeure de trous d'air en cours de saison qui peuvent faire mal à l'heure du bilan, comme quand il avait manqué la qualification à la Ligue des champions à la dernière journée, avec le Napoli en 2020-2021, après une très bonne deuxième partie de saison.
Le management : dialogues et coups de gueule
Dans les clubs où il est passé et notamment à Milan, sans doute là où on le connaît le mieux, il a laissé l'image d'un caractère fort mais qui s'est posé au fil du temps, moins impétueux et plus raisonnable. Comme beaucoup de ses coéquipiers de l'époque, Gattuso s'est inspiré de Carlo Ancelotti, qui sait manier le dialogue avec tout le monde, à tous les étages. « Il discute avec tout le monde, joueurs, staff, dirigeants, c'est quelqu'un d'ouvert et de très honnête », estime un salarié qui l'a connu à Milan.
Certains en gardent un souvenir amer, en général ceux qui ne jouaient pas beaucoup, d'autres évoquent un entraîneur « attentif et humain » qui, là encore, a évolué avec le temps. D'abord jeune et très proche de son vestiaire, il a peu à peu compris l'importance d'une certaine distance, mais veut rester dans l'échange. Le tempérament est mieux maîtrisé, mais il est toujours là : « Quand il s'énerve, il s'énerve vraiment », sourit un ancien collaborateur.
Très démonstratif pendant les matches, l'Italien a une personnalité affirmée, ce qui peut poser problème avec ses dirigeants, au fil du temps. Mais c'est aussi ce qui lui permet de ne pas trembler face à des défis compliqués, comme à son arrivée à Naples, juste après une mutinerie des joueurs et le départ d'Ancelotti, en décembre 2019. « À l'époque, les joueurs baissaient les yeux à la sortie du centre d'entraînement pour ne pas croiser le regard des supporters, l'ambiance était très lourde », se souvient l'un de ses proches. La récente actualité de l'OM ne devrait donc pas le faire vaciller, et c'est au moins un début.