Coup d’envoi, jeudi 4 avril, des auditions de la commission d’enquête du Sénat sur les nouveaux circuits de financements du « beautiful game ». Les sénateurs essaieront de « comprendre la place que prennent les fonds d’investissement dans l’économie du football » depuis des années, et commencer leur travail en interrogeant Luc Arrondel et Richard Duhautois, auteurs d’une somme en trois volumes, L’Argent du football (Editions Rue d’Ulm, 2022-2023). Le Sénat voulait se focaliser sur la vente, en 2023, de droits (TV…) par la Ligue de football professionnel à CVC Capital Partners. En échange du versement à vie de 13 % des revenus de la ligue, le fonds d’investissement a injecté 1,5 milliard d’euros dans un secteur essoré par la crise liée au Covid-19 et le retrait de Mediapro en 2020. Mais le Parquet national financier a été saisi d’un aspect litigieux de l’accord, et les sénateurs ont dû élargir le périmètre de leur enquête pour ne pas empiéter sur le domaine judiciaire.
Quel rôle joue le private equity, au-delà d’un apport de fonds au club ? L’attrait des fonds pour le football tricolore remonte au début des années 2010. Après avoir investi aux Etats-Unis et en Angleterre, il s’est intéressé à la France (PSG, Lyon, Marseille, Nice, Lorient…), doublant leurs budgets jusqu’à en représenter les trois quarts. Ces financiers sont souvent là pour optimiserla marque des clubs et la valeur des joueurs, avant de les revendre avec une plus-value, comme dans leurs autres investissements.
« Accord mortifère »
Le sénateur Michel Savin (Les Républicains, Isère), rapporteur de la commission, se demande « si cette nouvelle tendance ne portera pas préjudice à l’avenir économique des clubs ». Une certitude, pour l’ex-président de l’Olympique de Marseille Christophe Bouchet, dans le « deal » avec CVC : « C’est un accord mortifère pour le foot français », déclarait-il à So Foot en novembre 2023, rappelant que la Bundesliga allemande avait repoussé les fonds sous la pression des supporteurs et que la Liga espagnole n’avait pas signé le temps du contrat (cinquante ans), pour une commission moindre (8 %) et sans l’accord du Real Madridet du FC Barcelone.
Baptisés les « barbares » il y a dix ans, les fonds vont encore jouer un rôle… capital. «
A l’exception du PSG, tous les clubs français sont potentiellement à vendre », affirme Jean-Philippe Bescond, associé gérant de la banque Lazard, interrogé par Le Monde en janvier. Un club parisien qui, avec plus de 801 millions d’euros de chiffre d’affaires, s’est hissé surle podium des poids lourds européens en 2023, derrière le Real Madrid et Manchester City.
Le Monde