Information
Fernandez et Olmeta, déjà chauds avant OM-PSG : « Ce clasico, c’est le match du titre »
Avant le clasico dimanche, nous avons réuni deux immenses figures de chaque club : le Parisien Luis Fernandez et le Marseillais Pascal Olmeta. Ils défendent leurs couleurs avec passion et complicité.
Dès qu’on leur a proposé le principe d’un échange autour de leur attachement respectif à Marseille et Paris, Pascal Olmeta, 61 ans, l’ancien gardien de but de l’OM (aujourd’hui consultant pour RMC), et Luis Fernandez, 63 ans, l’ex-milieu puis entraîneur du PSG (désormais consultant pour BeIN Sport), ont dit « oui » sans hésiter. Jeudi 23 février, les anciens partenaires du Matra Racing (entre 1986 et 1989) se sont ainsi retrouvés en visio pour une discussion passionnée d’une quarantaine de minutes avant le clasico, dimanche soir.
Auriez-vous pu porter les couleurs du club adverse ?
PASCAL OLMETA. Rassure-moi Luis, Marseille n’est jamais venu frapper à ta porte ?
LUIS FERNANDEZ. Si, trois fois ! Paix à son âme, c’est Bernard Tapie qui a essayé le premier après la Coupe du monde 86. Il a réessayé en 92, à l’issue du Championnat d’Europe. À l’époque, je finissais ma carrière de joueur et il était venu me demander de rejoindre Marseille. Et puis, il y a aussi eu le président Robert Louis-Dreyfus, que j’ai rencontré à Paris. Lui voulait me faire venir à l’OM comme entraîneur. Mais mon club, c’est le PSG.
Et vous Pascal, le PSG ne vous a jamais approché ?
P.O. Si, j’ai été approché par le PSG et notre ami le président Francis Borelli. Avec mes yeux de gamin j’avais l’image de lui avec sa fameuse sacoche… Je l’avais eu plusieurs fois au téléphone et on s’était rencontré à Paris. Mais Rolland Courbis et Delio Onnis m’avaient dit : « Pascal, ce que Paris te donne, on te le donne… » Du coup, je suis resté à Toulon (rires) ! Mais si c’est la question, bien sûr que j’aurais pu porter le maillot du PSG. Ça n’aurait pas été « mon » club de cœur, mais tu ne peux pas cracher sur des couleurs et tu dois avoir le respect de ce que les gens font. Vous imaginez le bonheur pour les mômes d’aujourd’hui de pouvoir voir jouer Messi, Mbappé, qui est pour moi le meilleur joueur du monde, et même Neymar avec sa tête de folie, sous le même maillot ? C’est quelque chose de fabuleux.
Un duel Olmeta-Fernandez lors d’un clasico, ça aurait donné quoi ?
P.O. Je l’aurais cassé en deux (rires)…
L.F. Le pire, c’est qu’il donne l’impression de rigoler là, mais en réalité il a essayé ! Quand on faisait des toros à l’entraînement au Matra, Pascal se retrouvait parfois au milieu. Il ne supportait pas de se faire balader. La seule façon qu’il avait trouvée de récupérer le ballon, c’était de nous découper (rires). Plus sérieusement, on ne s’est pas croisé sur un terrain, mais ça aurait été sympa de jouer contre Pascal !
Si vous deviez garder une image d’un clasico, quelle serait-elle ?
P.O. Je me souviens de ce Marseille - Paris où le bus était parti en m’oubliant à l’hôtel (rires). J’ai été obligé d’arrêter une voiture pour rejoindre le Vélodrome et jouer le match. La pression et la folie étaient telles que Goethals ne s’était pas aperçu que je n’étais pas là, alors que j’étais tout le temps assis à côté de lui (rires). Je suis arrivé dans le vestiaire tout seul !
L.F. Moi je garde trois souvenirs du Vélodrome. Le premier, c’est une frappe que je fais de loin qui ricoche sur une motte de terre et qui passe par-dessus le gardien. Le lendemain, dans la Provence, c’était titré : Fernandez peut remercier le jardinier (rires). Le deuxième est cette ambiance et ce match inoubliables en demi-finale de l’Euro 84 où le public nous a donné la force de remonter le résultat pour nous qualifier alors que nous étions menés 2-1. Et le troisième est le Clasico que l’on gagne avec Ronaldinho et où Jérôme Leroy marque en faisant mine de centrer. Il fallait le faire !
Luis, vous avez dansé lors d’un clasico…
L.F. Oui, mais rappelez-vous les images. J’ai dansé en direction des supporters du PSG, pas de ceux de Marseille. Je ne me serais pas permis de chambrer les supporters adverses. Je les respecte trop pour aller me moquer d’eux. Regardez de nouveau les images…
P.O. Luis, ils t’en ont voulu parce que tu ne savais pas danser… (rires)
Il y a eu quelques légendes dans les deux clubs. Mais si on doit comparer le passé et le présent, qui est le plus fort, JPP ou Mbappé ?
P.O. J’ai connu Jean-Pierre, sa force de travail, sa simplicité, mec extraordinaire… Mais Mbappé, c’est le summum !
L.F. : Ah je pensais que vous alliez me demander de choisir entre Ronaldinho et Mbappé (rires). Ronnie, quand je vois ce qu’il a fait, c’était un génie. Mais aujourd’hui Mbappé est en train de frapper fort, il fait des choses qui vont peut-être l’amener tout en haut de la hiérarchie des grands joueurs.
Entre les deux coachs actuels, lequel vous inspire le plus ? Galtier ou Tudor ?
P.O. Moi je connais la Galette. Après, et Luis peut en parler mieux que moi, mais aller entraîner au PSG, ce n’est pas donné à tout le monde. C’est ne pas dormir, ne pas voir sa famille… Tu as une pression telle que tu dois perdre dix ans de ta vie ! A Marseille ça va tellement vite que si tu as une victoire et que tu sais faire se transcender tes joueurs et bien tu es le roi. Tudor avait été sifflé au début, mais aujourd’hui on parle de lui faire une statue ! Après, on a la chance d’avoir des entraîneurs français comme Génésio, comme la Galette, mais ils ne sont pas nombreux alors il faut qu’on soit avec eux à 200 %. Parce que les autres ils arrivent avec leur staff, ils prennent et repartent. Nous anciens footballeurs on n’a plus droit à rien. Tenez : dimanche je ne peux pas aller au stade, parce que je n’ai pas réservé mes places. Ben je resterai à la maison, je crierai, je sortirai le calibre, je tirerai parce qu’on va gagner et voilà ! (rires)
L.F. Tudor, quand tu vois ce personnage avec cette envie de mettre en place un système, une animation et qu’il y arrive… On sent que c’est un fervent. Il est vraiment dans l’engagement. Il me fait penser à Marcelo Bielsa ! Ce sont des entraîneurs qui ont un respect par rapport à leurs supporters. Si tu perds, tu perds mais avec les honneurs et ça c’est déjà pas mal. Maintenant, du côté de monsieur Galtier, je constate qu’il est l’adjoint de Campos puisque Campos est venu au bord du terrain contre Lille (4-3) et on me dit que c’est ça qui a fait changer le résultat. Alors on va remettre Campos au bord du terrain à Marseille avec Galtier derrière lui comme ça on verra le PSG gagner !
Pourquoi a-t-on l’impression que l’envie est une vertu toujours marseillaise et pas parisienne ?
P.O. Quand tu vas à Marseille à l’entraînement, c’est simple, il y a le soleil, il y a le sourire, le public, que tu pars de chez toi ou que tu arrives à l’entraînement. C’est toujours le bonjour et la bonne boutade… Quand je jouais à Paris et que je partais de Louveciennes pour aller m’entraîner à Colombes, je passais mon temps à klaxonner et vouloir mettre des coups de poing à certaines personnes parce qu’elles m’insultaient… Ben voilà, tout est là. C’est l’âme. Quand tu mets un maillot, que tu te régales à l’entraînement, que tu restes pour l’apéro, que tu fais le barbecue, et bien, après, tu t’entraînes et tu joues de la même manière. La vérité, elle est là. Et quand tu vois que Campos descend sur le terrain pour gueuler après l’arbitre, c’est qu’il y a un problème.
Vous l’enviez aux Marseillais, ça, Luis ?
P.O. Mais oui, dis-le Luis, dis-le !
L.F. Non, ce n’est pas une question d’être admiratif. Par rapport à ce que dit Pascal, dans chaque club quand on met le maillot, on a envie de jouer. C’est aux joueurs de donner le maximum parce qu’il va y avoir beaucoup de monde qui va regarder le match dimanche. Marseille peut encore espérer aller chercher le titre et si Paris gagne ils mettront définitivement un adversaire de côté.
Le match de Coupe de France remporté par l’OM (2-1) a-t-il changé la donne ?
L.F. Ben on va faire entrer Mbappé comme ça, il va leur faire peur. Pascal, tu leur diras qu’ils ne se loupent pas dans le pressing ! Parce que ça sort vite, il faudra mettre la quatrième vitesse pour le rattraper Kylian !
P.O. Non mais on a perdu ce truc de l’époque où tout se passait dans le couloir (rires) ! Aujourd’hui, bon, ils sont tellement contents de se rencontrer les uns les autres qu’ils se font la bise… Avant ce n’était pas possible ! Moi si j’en voyais un faire la bise à un adversaire… Oh putain ! Je lui disais de tout ! À la fin on peut s’embrasser… Si on a gagné ! Non, mais après c’est vrai que le retour de Mbappé peut faire beaucoup de mal. Mais je pense que les Marseillais vont savoir le bloquer. Ça va le faire si on fait le pressing et qu’on ne tombe pas dans un piège.
L.F. Vous avez compris pourquoi on les a laissés gagner en Coupe de France (rires) ? Comme ça, ils vont être sûrs d’eux. Ils vont diminuer l’intensité.
Le titre pour l’OM vous y croyez ?
P.O. Mais les gars, c’est qu’on va le prendre, ce titre ! Vous allez voir : on va le prendre ! Vu comment les Marseillais jouent, si ça continue comme ça, et ça ne peut que continuer, et bien à un moment donné qui va avoir le doute ? Les Parisiens.
L.F. Ce clasico, c’est le match du titre. Parce que si l’OM venait à s’imposer il mettrait effectivement un doute énorme du côté du PSG. Ça risquerait d’être chaud pour Paris.
Paris n’a toujours pas gagné la Ligue des champions. Ça va rester comme ça ou ça peut changer ?
P.O. Mais ça ne va changer rien du tout oh !
L.F. Disons que ça se complique. Marseille l’a déjà gagnée… (NDLR : à cet instant, Olmeta soulève son sweat et dévoile un tee-shirt de la finale remportée contre l’AC Milan) Mais c’est la coupe de Corse ça Pascal ! (rires) Quand on est supporter on veut que les clubs français aillent le plus loin possible. Le PSG s’est donné les moyens mais à chaque fois on n’y arrive pas. Il y a des problèmes de gestion sportive. Là, il va leur falloir sortir un gros match retour à Munich. J’essaie d’y croire.
P.O. Quand tu ne gagnes pas chez-toi c’est compliqué d’aller gagner la Coupe. Et quand tu as du mal sur les matchs de championnat qui suivent c’est qu’il y a un problème.
L.F. Il y a un problème, exactement.
Qui est favori dimanche ?
P.O. Marseille !
L.F. Moi je dis Paris. C’est tout. Chacun de son côté.