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Les grands perdants de l'OM avec l'élimination
Éliminé de toutes les Coupes d'Europe, mardi soir, après un scénario cruel face à Tottenham (1-2), l'OM a vu ses certitudes s'étioler. Ce revers aura des conséquences au sein du club phocéen.
Ce contre éclair sans personne pour s'y opposer, cette frappe superbe de Pierre-Emile Höjbjerg puis, dans la foulée, le coup de sifflet de M. Marciniak : en quelques secondes, les Marseillais ont perdu un match qui les conditionnera pendant des mois, mardi soir face à Tottenham (1-2). Ils rêvaient d'Europe, ils ne verront plus que la France, et le choc face à Lyon, dès dimanche au Vélodrome, dessine déjà un virage serré, alors qu'ils n'ont plus gagné en Ligue 1 depuis quatre journées (3-0 à Angers, le 30 septembre).Le podium en fin de saison est la seule issue vers une nouvelle Ligue des champions, désormais, mais l'OM devra vite retrouver de l'élan et ce ne sera pas si simple, après la claque face aux Anglais. Une élimination qui a mis en lumière quelques erreurs et limites actuelles du club, des dirigeants aux joueurs, en passant par l'entraîneur.
Tudor, un crédit qui s'épuise
Il y a un monde entre le Hellas Vérone et l'OM, et Igor Tudor le mesure un peu mieux chaque jour. La météo change nettement plus vite dans les clubs les plus exposés, et Marseille en est un bon exemple : arrivé dans le scepticisme général, début juillet, en froid avec une partie de son vestiaire à peine un mois plus tard, sifflé par son propre stade puis finalement conforté par d'excellents résultats en début de Championnat, l'entraîneur croate a constaté que le crédit acquis un jour peut fondre dès le lendemain, ou presque.lire aussiIgor Tudor : « On voulait que les joueurs restent dans le match » C'est la règle, quand l'équipe perd, et son OM perd souvent, en ce moment : après deux défaites en douze matches entre août et début octobre, l'équipe reste sur cinq défaites sur les sept dernières rencontres, et les premiers « Tudor dehors » commencent à fleurir au Vélodrome, forcément.
Le Croate, droit dans ses bottes et sûr de ses idées, a les défauts de ses qualités.
Un plan de jeu bien établi mais qui manque de variété et d'alternative, d'abord, dans ce 3-4-3 où les joueurs de côté doivent allumer les étincelles, une force désormais mieux contrée par les adversaires. Et un management rigide, où les efforts et la discipline sont des indispensables, mais qui manque peut-être de souplesse dans un vestiaire plus sensible que celui de ses clubs précédents.S'il veut retourner les vents contraires, il lui faudra l'appui de tous, par exemple celui de Dimitri Payet, déclassé sans ménagement depuis le début de la saison, mais dont le talent n'a jamais fait de mal à l'OM. Le Réunionnais n'est pas entré en jeu, mardi, et son visage fermé disait sa frustration, comme celle de Gerson à côté de lui.Les deux joueurs ont pourtant le profil technique pour éclairer l'animation offensive.
L'OM de Tudor n'est pas assez souvent dangereux, devant.
Et le coaching du Croate en cours de match fait débat à chaque fois. Même si, sur ce point, cela se joue parfois à presque rien : si Sead Kolasinac avait marqué sur le centre de Cengiz Ünder, mardi en fin de match, on aurait loué les changements victorieux de l'entraîneur...
Des dirigeants qui perdent gros
L'impatience qui enfle autour de Tudor est aussi, par ricochet, une petite pierre dans le jardin de son président, Pablo Longoria, parce que c'est l'Espagnol qui a fait le pari d'un entraîneur encore novice à ce niveau, pour son caractère et son identité de jeu.Il est trop tôt pour dresser le bilan et il n'est pas complètement étonnant, non plus, que le Croate montre des limites en Ligue des champions, lui qui découvrait la compétition en tant que coach. L'effectif, lui, avait été construit pour disputer l'Europe, si l'on se souvient des discours estivaux des dirigeants marseillais, qui voulaient doubler les postes et insuffler de l'expérience. Et, aujourd'hui, certains choix de mercato se révèlent discutables.Pourquoi avoir prêté Arkadiusz Milik, qui aurait eu le profil pour être associé à Alexis Sanchez ? Était-il judicieux de débourser 10 M€ pour acheter Luis Suarez, qui montrent des limites quand le niveau s'élève ? Ou même de recruter Isaak Touré, encore en apprentissage au Havre (L2), et qui ne va pas progresser beaucoup s'il joue aussi peu ? Le duo Ribalta-Longoria a aussi connu quelques réussites, dont l'arrivée, libre, de Chancel Mbemba, ou celle de Jonathan Clauss. Mais cette élimination de toutes les Coupes d'Europe sera une pilule difficile à avaler, et notamment pour Frank McCourt.Ce n'est pas un secret, le propriétaire américain se lasse de voir des comptes déficitaires, saison après saison, et ce sont plusieurs millions d'euros qui se sont envolés en recettes UEFA, mardi soir : en se qualifiant en Ligue des champions, l'OM aurait même été assuré d'engranger 17 M€ minimum. Cette entrée d'argent aurait pu donner un peu d'air aux finances, mais elle n'arrivera pas, et McCourt ne risque pas de sauter au plafond. Va-t-il finir par s'agacer ? Le Bostonien est moins complice de Longoria, très axé football, qu'il ne l'était de Jacques-Henri Eyraud, son prédécesseur.
Des joueurs qui montrent leurs limites
Comme touchés par la foudre au coup de sifflet final, mardi, les joueurs marseillais se sont figés, quelques-uns, à l'image d'Amine Harit, ne parvenant pas à contenir les larmes. La cruauté du scénario de cette dernière journée les hantera longtemps, mais cette élimination dit aussi les limites d'un groupe où certains plafonnent quand le niveau s'élève. Ce fut le cas pour Valentin Rongier au long de cette campagne de Ligue des champions, qui n'a pas franchi le palier espéré, pour sa deuxième expérience dans la compétition.Harit, lui aussi, a alterné l'encourageant et le moins bon, trop inconstant encore pour peser sur la scène exigeante de la C1. Suarez a traversé l'Europe comme une ombre, et Nuno Tavares s'y est montré moins à son aise qu'en Ligue 1, parce que les défenses y sont plus robustes et les attaquants plus dangereux, et parce qu'il a parfois manqué de clairvoyance et de personnalité. Le caractère, ce n'est pas un reproche que l'on peut faire à Mattéo Guendouzi, mais lui non plus n'a pas toujours impressionné. Il a l'excuse, tout à fait valable, de ne pas évoluer à son poste : au soutien de l'attaquant, comme Tudor l'aligne désormais, il n'a pas la vivacité ni la justesse technique pour créer du liant avec l'avant-centre.Ce qui, du coup, ne favorise pas l'efficacité de Sanchez : l'arrivée du Chilien était porteuse d'espoirs pour la scène européenne, mais il aurait fallu, sans doute, qu'il soit davantage entouré, d'autant qu'il n'évolue pas à un poste facile pour lui, seul en pointe. Lui aussi recruté pour apporter son expérience en C1, Eric Bailly, très bon quand il est apte à jouer, a confirmé les craintes sur sa fragilité physique.
L'Equipe