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Le journal des 13 heurts
Lors de sa précédente participation en Ligue des champions, en 2020-2021, l’OM avait battu le record du nombre de défaites d’affilée – treize – dans la compétition. Une édition au cours de laquelle l’entraîneur André Villas-Boas avait fini par perdre le fil et ses nerfs. BAPTISTE CHAUMIER
Cinq victoires en six matches de Ligue 1, une place de leader partagée avec le PSG : l’OM réalise un début de saison qui a étouffé, au moins provisoirement, les crispations estivales liées à l’arrivée d’un nouvel entraîneur, Igor Tudor, dont le management a parfois interpellé le vestiaire. Mais les résultats sont là, les idées de jeu identifiées et l’effectif a beaucoup changé. Avec les arrivées de joueurs expérimentés comme Alexis Sanchez, Chancel Mbemba ou Éric Bailly, l’OM semble armé pour voyager dans ce groupe de Ligue des champions abordable où figurent Tottenham, l’Eintracht Francfort et le Sporting Lisbonne.
Il y a deux ans, déjà, le groupe de l’OM semblait à sa portée malgré la présence du favori Manchester City, aux côtés du FC Porto et d’Olympiakos. Mais les prévisions initiales étaient trompeuses et, malgré la victoire au Parc des Princes en L1 (0-1, 13 septembre) – la première face au PSG depuis neuf ans – le début de saison marseillais était tout juste correct, l’état de forme de Florian Thauvin ou Dimitri Payet très incertain. Le retour du club olympien en Ligue des champions était scruté avec un interminable décompte, un peu honteux, qui avait pollué l’atmosphère du vestiaire pendant de longues semaines.
Après une campagne catastrophique, sept ans plus tôt, soldée par un zéro pointé – six matches, six défaites face à Dortmund, Arsenal et Naples –, les Marseillais avaient entamé la compétition avec l’envie de ne plus entendre parler de ces revers à répétition et de leur incapacité à se hisser au niveau requis.
Des lacunes très vite étalées au grand jour
Payet, comme Valentin Rongier, Pape Gueye ou encore Leonardo Balerdi, sont aujourd’hui les derniers rescapés de cette édition. Ils pourraient témoigner de l’ambiance totalement différente à l’époque, avec le spectre d’un triste record qui planait au-dessus de leurs têtes : ils en étaient déjà à neuf défaites d’affilée, en comptant la dernière saison de l’ère Didier Deschamps, avant de s’envoler pour Athènes le 21 octobre. Premier match face à l’Olympiakos et première défaite (0-1). La dixième d’affilée dans la compétition... L’entraîneur André Villas-Boas avait décidé de protéger son groupe et de prendre le résultat pour lui, mais il fulminait en privé sur l’échec du recrutement d’un nouvel attaquant (il rêvait de Darwin Nunez, parti à Benfica) et critiquait les choix du nouveau directeur sportif, un certain Pablo Longoria, parti chercher un Brésilien inconnu, plus ailier qu’attaquant axial, Luis Henrique.
Le deuxième match, le 27 octobre, dans un Vélodrome à huis clos, à cause de la crise sanitaire, face au favori du groupe, Manchester City, avait brutalement éclairé les lacunes immenses de cette équipe. Villas-Boas avait tenté un coup en passant à cinq en défense et sans aucun avant-centre de métier dans l’équipe de départ. Payet, lui, était sur le banc au coup d’envoi, comme déclassé, ce qui peut rappeler sa condition actuelle depuis l’arrivée de Tudor. Mais, à l’époque, l’OM était terriblement Payet-dépendant et le Réunionnais était méconnaissable, entre ses kilos en trop difficiles à dissimuler et son attitude ostensiblement boudeuse. Les Marseillais avaient alors été balayés par les Citizens (0-3). Interrogé sur ses choix tactiques après le match, AVB avait tenté un second degré amer (« Marseille n’a pas d’argent pour faire venir Guardiola, ici, malheureusement vous avez “AVB” »), qui masquait mal son irritation grandissante. La onzième défaite d’affilée... La double confrontation face au FC Porto s’annonçait déjà décisive. Pour un fiasco à l’arrivée. Les Marseillais avaient encore pris une volée (0-3, 3 novembre), Payet avait manqué le penalty du 1-1 et AVB avait dit sa « honte », à la fin du match en parlant d’une « équipe qui a fait de la merde ». La douzième défaite d’affilée...
Contre Olympiakos, une victoire anecdotique
Puisqu’il n’aimait pas les explications à chaud dans le vestiaire après les matches, le technicien portugais avait organisé une réunion avec ses joueurs deux jours plus tard à La Commanderie. Le ton avait changé : il avait exhorté ses hommes à montrer un peu d’amour-propre et à se réveiller au retour face à l’une des pires équipes de Porto de la décennie, comme il l’avait dit, mais le fil de la confiance semblait être rompu avec certains d’entre eux à commencer par Payet, qui fustigeait en privé les doubles discours de son entraîneur. La réception de Porto, le 25 novembre, avait sonné la fin des illusions marseillaises. Sans même y croire, les Olympiens s’étaient inclinés (0-2), Balerdi avait été expulsé, Thauvin transparent comme souvent en C1 et Payet encore une fois sur le banc au coup d’envoi. AVB, lui, avait mal vécu les banderoles laissées par les supporters pour habiller les virages, notamment celle qui évoquait « des chèvres ». Treizième défaite d’affilée, nouveau record de la compétition...
Le succès face à l’Olympiakos (2-1, 1er décembre), sur deux penalties de Payet pour ses deux premiers buts en carrière en C1, avait finalement été anecdotique. Les Marseillais avaient été éliminés de toute compétition européenne après une énième défaite dans le dernier match à City (0-3, 9 décembre).
Deux ans plus tard, les souvenirs de cette triste campagne en C1 sont encore vivaces mais l’effectif a changé et Tudor a insisté sur la nécessité de prendre du plaisir dans une compétition que tous les clubs aimeraient jouer. Il faudra un peu de cette légèreté, certainement, mais aussi beaucoup plus d’exigence aux Marseillais pour espérer exister dans un groupe a priori abordable. Premier test à Tottenham, demain soir.
L'Equipe