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UNE HISTOIRE À RÉÉCRIRE
Deux ans après une campagne de Ligue des champions glaciale et ratée, dans des coquilles vides, l’OM va tenter de se racheter. Le sentier de la rédemption débute au Tottenham Hotspur Stadium. DE NOTRE ENVOYé SPéCIAL
MATHIEU GRÉGOIRE LONDRES – Moins de deux semaines après les promesses d’un tirage au sort favorable, l’OM va tenter ce soir d’exaucer les vœux de ses supporters dans le vaisseau spatial qui sert de stade à Tottenham. Ils sont sans doute plus abordables qu’une qualification pour les huitièmes de la Ligue des champions, ils ont plutôt à voir avec les notions de respect, de dignité. Traversés par la simple idée de faire bonne figure, enfin, pour balayer les deux dernières campagnes de C1 catastrophiques du club, à l’automne 2013 (six défaites dans un groupe indécent) puis à l’automne 2020 (une petite victoire en poule, et cinq nouvelles déroutes).
Entre-temps, les naufragés d’André Villas-Boas ont vogué vers d’autres cieux. De l’équipe d’alors, il ne reste plus que Valentin Rongier sur le terrain de jeu bâti par Igor Tudor, ainsi que Pape Gueye et Dimitri Payet sur le banc. En octobre 2020, dans une salle de conférences du Karaïskakis, l’antre de l’Olympiakos, AVB racontait son excitation de mener sa troupe à la bataille dans des stades à huis clos, cette bande si valeureuse la saison précédente. Démissionnaire en mai, il était finalement resté pour toucher cette récompense sportive avec eux, « un choix du cœur plutôt que de la raison », selon ses propres mots. Cette saison, le processus a été inversé. La plupart des acteurs de la qualification ne sont plus là, à commencer par Jorge Sampaoli, ceux qui ont ramené l’OM en Ligue des champions ont plutôt été invités à quitter le club et à faire de la place. Têtes fraîches, balles neuves pour une stratégie plus efficace ? Les premiers éléments de réponse tomberont ce soir, face à « l’une des meilleures équipes d’Europe », dixit Pablo Longoria.
« La dernière campagne n’a pas été bonne, on n’a pas été à la hauteur, a témoigné le survivant Payet, sans s’appesantir sur les errements du passé. On avait une équipe plutôt jeune, avec des joueurs ayant besoin d’apprendre. Il n’y a pas de message particulier. Avec des renforts non négligeables, on aspire à faire beaucoup mieux, le groupe est homogène, on a nos chances. Si on est à notre meilleur niveau, on pourra viser mieux que la troisième ou quatrième place. »
L’époque a changé. En 2020, en pleine crise du Covid, le groupe, restreint, avait été peu amélioré à l’intersaison, le propriétaire décrétant une cure d’austérité. En 2022, un OM gourmand a multiplié les transferts et donné des salaires copieux, rappelant les débuts de l’ère McCourt, ou les premiers mercatos de la parenthèse Deschamps (2009-2012). « On a recruté des joueurs pour cette Ligue des champions, on veut être à la hauteur des attentes », a dit le président Pablo Longoria, fier d’avoir embauché pour les joutes continentales Chancel Mbemba, Éric Bailly, Jordan Veretout ou Alexis Sanchez, suspendu ce soir.
Quelques briscards, et un technicien novice à ce niveau sur le banc. Face à son ancien coéquipier Antonio Conte (voir pages 14-15), un des plus fins amateurs de la défense centrale à trois éléments, Igor Tudor dirigera sa première rencontre de Ligue des champions. Comme on pouvait le deviner, il l’a relevé sans émotion, le colosse est là pour faire ses preuves, il laisse l’enrobage et l’art consommé du storytelling à ses dirigeants. « Bien sûr, ta famille t’appelle, tes amis te regardent, c’est chouette de prendre part à ça, mais je vais préparer cette rencontre comme les autres, a-t-il dit. Je vois la motivation, la concentration dans le regard de mes joueurs, ils veulent tous jouer dans la plus belle épreuve du monde, et c’est ça l’essentiel. On ne viendra pas pour contempler les tribunes. »
Sur les six premières journées de L1, son équipe a pris ses marques pendant trois rencontres, avant de rouler sur ses adversaires lors des trois suivantes en étalant son style direct et puissant. « C’est une équipe très performante, très compétitive, qui viendra dans notre stade pour afficher son ambition », a prévenu Hugo Lloris, le portier de Tottenham. Également invaincu en Premier League, avec quatre victoires et deux nuls, le finaliste de l’édition 2019 offrira une opposition d’une tout autre dimension et, devant près de 60 000 spectateurs dont 1 500 Marseillais attendus, l’intensité promet d’être remarquable. La tentative de rédemption olympienne commencera dans ce bain bouillonnant.
L'Equipe