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Tudor a perdu de sa superbe; L'entraîneur n'arrive pas à redresser la barre d'un OM qui avance au ralenti. Il voit les critiques ressurgir
L'heure est loin d'être grave. Pas encore, en tout cas. À huit rendez-vous de la fin de la saison, l'OM demeure dans les objectifs fixés l'été dernier : terminer sur le podium. Si le rideau tombait aujourd'hui sur cet exercice 2022-23, il aurait deux tours de barrages à franchir en août (*) avant d'entendre la musique entêtante de la Ligue des champions pour la deuxième année d'affilée, ce qui ne lui est plus arrivé depuis plus d'une décennie (2010-11 et 2011-12), à l'époque de Didier Deschamps. Des obstacles toujours piégeux, mais un tel classement offrirait une perspective toujours plus réjouissante que les poules de Ligue Europa, promises au 4e de Ligue 1. Pour en arriver là, voire viser un peu plus haut avec la 2e place toujours dans leurs cordes, les Olympiens vont devoir se réveiller rapidement et remettre de l'ordre dans leurs idées autant que dans leur jeu.
Ils ne sont plus que l'ombre du rouleau compresseur qui écrasait - presque - tout sur son passage il y a quelques semaines encore. Ces résultats fades, qui ont provoqué la colère des supporters présents à Lorient, (re) placent Igor Tudor en première ligne de la contestation et des interrogations. Une habitude pour le technicien croate qui a remplacé Jorge Sampaoli au pied levé en juillet et s'est attiré les huées du Vélodrome avant même les trois coups de la saison. Il leur a rapidement coupé le sifflet ; puis les lazzis ont encore dégringolé des travées de l'arène marseillaise à l'automne, après le couac en Ligue des champions contre Tottenham.
Encore une fois, Pablo Longoria a fait front, soutenant le Dalmate contre vents et marées. Le dirigeant espagnol imagine la suite avec le natif de Split au-delà de l'actuel exercice et, signe de la confiance qui l'habite, il lui a récemment adjoint les services d'un fidèle, le préparateur physique Gianni Brignardello. Mais Longoria doit voir les problèmes qui s'amoncellent, les doutes qui se multiplient et entendre les voix qui s'élèvent, en dehors du club mais aussi en interne.
Tudor a perdu de sa superbe. Il a égaré le mojo qui l'accompagnait. Il s'enferme dans ses choix récurrents sans jamais modifier, par exemple, son système. À Vérone, déjà, il déployait ses troupes dans le même dispositif. Il n'a rien changé depuis son arrivée en Provence et ses adversaires le contrent d'autant plus facilement, surtout au Vélodrome où les points perdus (20) attisent déjà les regrets. Il a récemment insisté sur la nécessité de maîtriser un schéma. "Tactiquement, le plan B n'existe pas", martelait-il avant le déplacement victorieux à Reims. "On a appris de l'expérience du match aller (victoire de l'OM 4-1, ndlr) et on en a fait la démonstration, défensivement et sur les sorties de balle face à leur pression", se félicitait Régis Le Bris après le nul de dimanche.
Tudor apporte plus volontiers des retouches dans ses compositions d'équipe, sans tout révolutionner pour autant comme le faisait Sampaoli, adepte du chamboule tout. Mais l'Argentin avait la Ligue Conférence à gérer, au contraire du Croate. Ce dernier n'a pas, non plus, l'expérience d'El Pelado et il semble rattrapé par un manque de vécu dans les moments chauds où tout se décide.
Son coaching ne fait pas l'unanimité et souligne un peu plus ses tâtonnements. Contre Strasbourg (2-2), la sortie d'Alexis Sanchez remplacé par Éric Bailly a déséquilibré l'ensemble olympien et renvoyé un mauvais signal à ses ouailles, celui qu'elles allaient plus souffrir et reculer qu'essayer de conserver leur avance de deux buts en continuant à jouer. La titularisation de Vitinha en pointe contre Montpellier, avec Sanchez en soutien, n'était pas l'idée du siècle, les deux hommes n'ayant pas eu le temps de travailler ensemble. Le passage sur le banc de Chancel Mbemba interpelle également. Autant il se comprenait contre les Héraultais alors qu'il était rentré tardivement de sélection, autant il paraissait saugrenu contre Lorient où Leonardo Balerdi, en manque de confiance, lui a été préféré. Au stade du Moustoir, alors que l'OM pataugeait et que certaines modifications auraient pu apporter un souffle nouveau, il a attendu les dix dernières minutes pour agir enfin. Comble de la malchance qui colle aux basques olympiennes, ses trois changements ont eu l'effet inverse et été contre-productifs puisque les Merlus ont fini en trombe.
Comme souvent en pareilles circonstances où les victoires ne parviennent plus à cimenter totalement le vestiaire, des reproches émergent sur le fonctionnement prôné par le Croate. Tout sauf nouveau pour ce dernier qui avait déjà vécu semblables moments de rébellion au cours de la préparation et repris le dessus, bien épaulé par Longoria. Mais pour l'instant, c'est le spectre de la saison 2014-15, finie au pied du podium sous la houlette de Marcelo Bielsa, qui ressurgit, alors que les récentes sorties médiatiques de Tudor commencent à rappeler celles de Rudi Garcia et sa litanie d'excuses. Dans les deux cas, ce n'est pas bon signe...
Mais il est encore temps de se ressaisir et de faire pencher le destin du bon côté.
(*) Si le vainqueur de la Ligue Europa se qualifie directement pour la Ligue des champions à travers son classement en championnat, le 3e de Ligue 1 sera directement qualifié pour les poules de la C1.
La Provence