Méconnu en France, mais considéré en Italie comme un entraîneur prometteur après sa belle saison avec le Hellas Vérone, le Croate Igor Tudor est la priorité de Pablo Longoria pour succéder à Jorge Sampaoli sur le banc de l'OM - qui a d'ailleurs trouvé un accord avec lui. Présentation de sa méthode.
C’est lui que Pablo Longoria a ciblé. Comme expliqué par RMC Sport, Igor Tudor est le grand favori pour prendre la succession de Jorge Sampaoli sur le banc de l’OM. En interne, la confiance règne pour le faire signer, à tel point que les discussions pourraient aboutir très rapidement, peut-être même dès lundi. Séduit par leurs échanges et ce qu’il a réussi cette saison du côté du Hellas Vérone en Italie, Longoria est convaincu qu’il est l’homme de la situation. Ce n’est pas encore le cas de tous les supporters phocéens. Certains s’interrogent sur le CV du Croate, qui à 44 ans présente peu de références comme technicien, et se demandent s’il a les épaules pour appréhender la ferveur marseillaise et la pression d’un club qualifié pour la prochaine Ligue des champions, une compétition qu'il découvrirait en tant qu'entraîneur.
Instabilité et gros caractèrePour beaucoup, Tudor est davantage connu en France pour son passé de joueur. Un solide défenseur central ayant disputé plus de 170 matchs avec la Juventus Turin entre 1999 et 2007. Un vrai soldat capable également de dépanner comme latéral droit ou milieu défensif, double champion d’Italie et titulaire lors de la finale de la Ligue des champions perdue en 2003, aux tirs au but, face à l’AC Milan de Rui Costa et Andriy Shevchenko. Tudor, c’est aussi deux Coupes du monde disputées, en 1998 et 2006, au cours d’une carrière plombée par des blessures à répétition. Pour sa reconversion, il a d’abord intégré le staff de son équipe nationale, avant de prendre du galon en devenant numéro un au HNK Hajduk Split, son club formateur. Cette expérience, entre 2013 et 2015, reste jusqu’à présent sa plus longue comme coach.
La suite n’a pas été d’une grande stabilité. En sept ans, il a connu six bancs différents : en Grèce (PAOK Salonique), en Turquie (Karabükspor, Galatasaray), à nouveau en Croatie (Hajduk Split) et en Italie (Udinese et Hellas Vérone). Il n’a pas non plus laissé que des bons souvenirs là où il est passé. Au PAOK, ses dirigeants n’avaient pas apprécié qu’il allume publiquement ses joueurs. Il avait pris la porte pour s’être montré trop critique. Son caractère affirmé a aussi été visible à la Juve, où il a été l’adjoint d’Andrea Pirlo en 2020-2021. Resté seulement un an, il avait réglé quelques comptes au moment de son départ. "C’est Pirlo qui m’a fait venir. Il m’a proposé le poste d’adjoint et j’ai accepté parce que c’était la Juve. Mais il a aussi pris d’autres personnes et nous a tous mis au même niveau. Ce n’était pas juste parce qu’après tout je suis entraîneur", avait-il déploré dans la presse italienne.
Partisan du 3-4-2-1 à VéroneCe qui ne l’a pas empêché de rebondir et de faire taire quelques critiques cette saison avec le Hellas Vérone. Sous ses ordres, Giovanni Simeone et sa bande ont bouclé la saison de Serie A à une convaincante neuvième place, et ils auraient même pu accrocher une place européenne sans un sprint final mal négocié. C’est surtout dans le jeu que sa formation a séduit. Avec un style offensif et sans complexe. "Si c’est bien lui qui arrive à l’OM et s’il suit ce qu’il a fait à Vérone, ce sera un grand changement pour les supporters de Marseille. Il ne fait pas de la possession un élément essentiel de son jeu. Par contre, l’agressivité au pressing c'est pour lui fondamental. Son but c’est d’agresser, dans le bon sens du terme, le plus vite possible l’adversaire pour ne pas lui laisser le temps d’installer son jeu. Ce qui l’intéresse, c’est surtout de savoir comment son équipe peut imposer son système sans ballon et empêcher l’adversaire de jouer", analyse Johann Crochet, spécialiste du football italien pour RMC Sport.
Organisé le plus souvent en 3-4-2-1, le Hellas a terminé avec la cinquième meilleure attaque d’Italie (65 buts), après avoir signé des jolis coups avec des succès contre la Roma (3-2), la Lazio (4-1) ou encore la Juve (2-1). "Cette saison, le Hellas Vérone est l’équipe de Serie A qui a déclenché le plus d’actions de pressing sans ballon et le plus rapidement. Il a construit sur le travail de son prédécesseur Ivan Juric. Avec Juric, c’était un peu moins flou défensivement mais Vérone avait un peu plus de difficultés à marquer. Avec Tudor, le trident offensif, avec Giovanni Simeone, Gianluca Caprari et Antonin Barak, a très bien fonctionné. A un moment de la saison, c’était même le trio d’attaque le plus prolifique d’Europe. On a vu des idées claires la saison dernière à Vérone", appuie Johann Crochet, qui note une vraie différence entre le style Tudor et celui, par exemple, de Roberto De Zerbi, un autre nom évoqué parmi les potentiels successeurs de Sampaoli.
Intensité et agressivité"L’Italien est plus proche de Pep Guardiola au niveau de la possession. Tudor, c’est totalement différent. C’est plus physique et agressif. Avec lui, le pressing commence dans la surface de réparation adverse. Ce qui plaît aux joueurs, c’est l’énorme travail d’intensité réalisé à l’entraînement. Certains disent qu’ils sont rincés après les séances d’entraînement. Avec lui, il faut s’habituer à avoir un volume de courses très important et une explosivité au pressing", souligne Johann Crochet. C’est ce qu’avait décrit le milieu de terrain Adrien Tameze, au Hellas Vérone depuis 2020, dans un long entretien pour RMC Sport en février dernier. "C’est beaucoup de courses, beaucoup de séances de musculation, beaucoup d’exercices de pressing et de un-contre-un. Il y a toujours de l’intensité dans les exercices et dans les jeux", confiait l’ancien Niçois, devenu indiscutable dans cette équipe où l’intensité, l’agressivité et le marquage individuel tout terrain étaient la recette du succès cette saison.
"Juric et Tudor sont des entraîneurs qui, quand on les regarde sur le banc, même quand on est fatigués, on sait qu’ils vont nous tuer si on ne court pas. Ils nous disent sans arrêt "va", "presse", "revient", "attaque", "encore". Ils ne sont jamais fatigués sur le banc", racontait-il. Des traits de personnalité qui peuvent faire penser à un certain Jorge Sampaoli. "Les clubs comme la Juve, l’Inter, Naples et Milan aiment avoir le ballon, détaillait Tameze. Nous, notre philosophie, c’est de les empêcher rapidement de jouer, de ne pas leur donner le temps de s’installer, de les presser. Notre objectif contre ces clubs est de récupérer le ballon haut pour déclencher rapidement une action de but. Notre système est très efficace pour ça." Alors que l'histoire aurait pu se poursuivre, Tudor a fait le choix de quitter Vérone cet été. Comme s'il savait qu'il allait avoir une ouverture dans un club plus prestigieux. Dans la Ligue des Talents ?
DOSSIER : Jorge Sampaoli
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