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LA HACHE DE GUERRE EST ENTERRÉE
Six mois après une nuit brûlante dans la corbeille présidentielle de l’Allianz Riviera, les dirigeants de Nice et de l’OM promettent que les règles de bienséance seront respectées ce soir. DE NOS ENVOYÉS SPÉCIAUX PERMANENTS
MATHIEU GRéGOIRE (avec ANTOINE MAUMON DE LONGEVIALLE) MARSEILLE et NICE – Ébahi par le spectacle lunaire se produisant sur la pelouse niçoise le 22 août dernier, on a oublié quelques séquences tout aussi irrationnelles dans la tribune des VIP, qui était plutôt celle des chiffonniers ce soir-là. Les querelleurs de la corbeille ? Pablo Longoria, le président de l’OM, et Jacques Cardoze, son directeur de la communication, aux prises verbales avec Jean-Pierre Rivère, le boss de l’OGC Nice, et sa compagne, sous le regard courroucé du maire de Nice et ami du couple, le véhément Christian Estrosi (LR).
Les invectives ont failli laisser la place à une étreinte plus musclée, l’intervention appropriée du vétéran niçois José Cobos permettant d’éviter le pire. Après ces échanges de quolibets, de multiples règlements de comptes dans la presse les jours suivants, Rivère et Estrosi fustigeant à volonté le comportement de Longoria. Le boss olympien resta discret et envoya au front son tirailleur à la saillie aiguisée comme une baïonnette, Cardoze, le même qui partira à l’assaut de la commission de discipline d’OL-OM comme s’il s’agissait de Monte Cassino, le 8 décembre. Mais ceci est une autre histoire, celle entre dirigeants niçois et marseillais ayant versé dans l’apaisement.
Avant la détente, il y a toujours cette étrange étape de la coexistence, certes pacifique mais polaire, avec regards en chiens de faïence et poignées de main se dérobant. Elle a lieu à Troyes, le 27 octobre, dans un stade de l’Aube congelé et à huis clos. Avant d’assister au match rejoué entre Nice et l’OM (1-1), les dirigeants des deux camps ont réussi, avec une certaine habileté, à ne pas se croiser. Les esprits ont encore mûri un petit mois et la réconciliation s’est déroulée place Beauvau, au ministère de l’Intérieur, le 23 novembre, lors des états généraux d’un foot français gangrené par la violence dans ses stades.
« L’incident est clos entre Pablo Longoria et moi, nous a confié hier Jean-Pierre Rivère. J’ai attendu des excuses de sa part sur un point précis. Je les ai eues un peu plus tard que lors du match à Troyes, lors de la réunion interministérielle à laquelle nous avons participé. Je vais l’appeler tout à l’heure pour lui dire qu’il sera accueilli le mieux possible, avec beaucoup de respect. Je souhaite aussi qu’à notre niveau on donne le ton de cette rencontre. Les dirigeants marseillais seront reçus plus que normalement. Avec Pablo, on a mis tout ça derrière nous. Il sera au stade avec moi. Il n’y aura aucun souci à ce niveau-là. Nous devons donner l’image qu’on passe à autre chose. »
“Au ministère, c’était le bon moment pour clarifier les choses, la conversation a été sincère
Pablo Longoria, président de l’OM
Interrogé un peu plus tard, Longoria évoque « ce retour à la normale » : « Cette fois, on ne va parler que de foot, nous sommes ici pour ça, pas pour provoquer toutes ces tensions. Les protagonistes sont sur le terrain ! Dans ma vie, je n’ai de problèmes avec personne, je suis quelqu’un d’honnête, d’ouvert et, surtout, je représente une institution qui dépasse les intérêts personnels. Au ministère, c’était le bon moment pour clarifier les choses, la conversation a été sincère. Il est toujours bon de parler pour résoudre des conflits. Le business veut ça aussi, ne serait-ce que sur le marché des transferts… »
Début janvier, les deux clubs ont planché sur le prêt du latéral Jordan Amavi, prêté par l’OM à l’OCGN. « Cela s’est fait de façon fluide, précise Longoria. D’ailleurs, le comportement de Nice, depuis la blessure de Jordan (une entorse d’un genou la semaine dernière), est extraordinaire, il y a un vrai partage d’informations de leur part. » Lui n’avait même pas inclus de clause pour priver Amavi d’éventuels chocs contre l’OM en Coupe ou en L1 : « Ce n’est pas ma façon de faire… » En janvier, après l’appel marseillais rejeté par la FFF, sur le volet des sanctions d’OL-OM, Longoria avait souhaité ne pas poursuivre devant le CNOSF, histoire de ne plus perdre d’énergie avec ces événements extra-sportifs ayant alourdi le premier semestre phocéen.
Hier, pendant que Jorge Sampaoli déplorait l’absence des supporters de l’OM à Nice, Longoria s’est voulu inflexible sur un seul aspect : son comportement de pile électrique pendant les rencontres, ce concentré de stress au bord de la crise d’hystérie dans un gabarit si menu, qui étonne souvent ses homologues. « Franchement, le jour où je change sur ce point, je ne ferai plus de foot, je vis le match ainsi ! dit-il dans un sourire. En Italie, et j’étais encore à Milan pour le plaisir de vibrer lors du derby samedi, certains dirigeants sont pires que moi ! En Espagne, ça dépend des clubs, mais à Valence, on était comme ça ! » Une petite tisane ou une coupette de champagne partagée ce soir en loge en avant-match et tout sera oublié.
L'Equipe