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Le mur est tombé
La défense de l’OM, qui n’avait pas encaissé de but à l’extérieur depuis cinq matches et bien contrôlé les Lyonnais pendant une heure, a fini par craquer. DE NOTRE ENVOYÉE SPÉCIALE
MÉLISANDE GOMEZ DÉCINES (Rhône) – Ils pensaient sans doute qu’ils pourraient tenir ainsi pendant des heures, les Marseillais, inconscients du danger qui rôdait. Ils avaient ouvert le score très vite, presque trop facilement, et ils avaient tellement bien maîtrisé les événements, ensuite, qu’ils ne s’en faisaient pas vraiment, alanguis dans un faux rythme où ils enchaînaient les passes latérales et ne cherchaient pas, ou alors pas souvent, à faire mal dans le camp adverse.
Comment auraient-ils pu s’inquiéter de la suite, alors que l’OL avait toutes les peines du monde à s’approcher du but de Pau Lopez ? La confiance était palpable dans les lignes arrière marseillaises, gonflée par des statistiques récentes qui disaient tout de sa fiabilité : l’OM n’avait plus encaissé un seul but à l’extérieur depuis le 27 octobre et un match rejoué face à Nice, à Troyes (1-1). Et, avec seulement 16 buts concédés en 21 matches avant ce voyage à Lyon, ils s’appuyaient sur la meilleure défense de L1.
Ils auraient dû le savoir, pourtant : quand on ne mène que d’un but, on marche sur un fil et ils doivent regretter, maintenant, de ne pas avoir davantage insisté en première période, quand les Lyonnais n’arrivaient à rien et que le score aurait pu prendre une autre ampleur. Ils ont préféré reculer, de plus en plus, comme s’ils ne risquaient rien, pas aidés par le coaching tardif et peu inspiré de Jorge Sampaoli. Comment l’OM aurait-il géré la fin de match si Arkadiusz Milik était entré plus tôt, lui qui a dû attendre la 86e pour fouler la pelouse ? Pourquoi ne pas avoir cherché le but du break alors que le Polonais était là, sur le banc, et que les Lyonnais poussaient de plus en plus haut, laissant des espaces dans leur dos ? Un changement aurait envoyé un signal aux joueurs, mais l’entraîneur argentin n’en a pas fait.
Un excès de confiance ou les qualités d’un adversaire qui a retrouvé le fil et le talent ?
L’OM a préféré attendre, donc, de plus en plus proche du but de Lopez, de plus en plus secoué aussi par des Lyonnais transfigurés en seconde période par les ajustements tactiques de Peter Bosz. Malo Gusto, qui donnait le torticolis à Luan Peres depuis le début du match à son poste d’arrière droit, est monté d’un cran, comme un ailier, ce qui n’a pas arrangé les affaires du défenseur brésilien. Puis Moussa Dembélé est entré à la place d’Emerson, et la soirée allait basculer. Est-ce un excès de confiance ou, simplement, les qualités d’un adversaire qui a retrouvé le fil et le talent ?
La défense marseillaise a commencé à tanguer nettement et, sous la pression, la fébrilité s’est invitée, à l’image d’une mauvaise passe en retrait de Caleta-Car, pourtant rassurant jusque-là, qui obligeait Pau Lopez à sortir devant Dembélé puis à une belle parade face à Caqueret (71e). Trois minutes plus tard, Shaqiri plaçait une belle frappe au-dessus de la barre du gardien espagnol et il n’y eut pas de troisième avertissement : juste après, le Suisse était à la réception d’un centre venu de la droite, évidemment, de Malo Gusto que Luan Peres n’avait pas vu partir, et il égalisait de la tête (76e).
C’était logique, c’était mérité, les Marseillais secouaient la tête, incrédules, les mains sur les hanches, mais ils n’avaient pas fait grand-chose pour s’éviter les regrets. Et le film pouvait continuer : une tête de Dembélé sur un centre de Gusto (79e), un joli retourné de l’attaquant lyonnais qui passait à côté (86e). Le mur se fissurait et les individualités craquaient : cette fois, ce fut Saliba, impérial jusqu’ici mais mal aligné puis éliminé d’un dribble, et Dembélé marquait le but renversant qui aurait mérité mieux que la tristesse d’un stade à huis clos. Mais c’est peut-être un avantage, parfois : dans le silence, l’adversaire s’endort plus facilement, et les Marseillais pourront témoigner.
L'Equipe