Dans un document en date du 13 décembre 2022, l'ex-président de l'OL avait promis à la DNCG de vendre encore pour plus de 110 M€ jusqu'au 30 juin 2023. Il tablait aussi sur une cession de Karl Toko Ekambi à hauteur de 20 M€.
Il y a parfois des déclarations à lire sous une lumière nouvelle, quelques mois seulement après qu'elles ont été prononcées. Celles de Jean-Michel Aulas, par exemple, le 28 mars, en marge du congrès de l'ECA (association européenne des clubs). Celui qui était encore président de l'OL regrettait amèrement le transfert de Malo Gusto à Chelsea, survenu fin janvier.
« Ça vient affaiblir notre stratégie qui est un dispositif de formation, avait-il notamment dit. Quand Chelsea vient acheter Malo Gusto qui n'a que 50 matches en Ligue 1, c'est une perte incroyable qu'on essaie de compenser sur le plan financier. »
Le montant des promesses de ventes représentait plus du tiers de la valeur totale de l'effectif
Une perte que le dirigeant avait pourtant anticipée, et même promis à la DNCG près de deux mois avant les premières approches des Blues et le transfert. En effet, selon un document que L'Équipe a pu se procurer, Aulas s'était engagé le 13 décembre 2022 devant l'instance à vendre encore pour 112 M€ avant le 30 juin 2023, soit plus du tiers de la valeur totale de l'effectif lyonnais.
Cette promesse s'appuyait sur l'engagement des cessions de Malo Gusto (estimé à 30 M€), Castello Lukeba (40 M€), Tino Kadewere (8,5 M€), Cenk Özkaçar (5 M€) et des bonus de ventes précédentes estimés à 8,6 M€. Mais aussi, et c'est le plus surprenant, sur une vente de Karl Toko Ekambi à 20 M€. Ce dossier, qui ne prévoyait pas encore la vente de la franchise d'OL Reign, avait été validé par la DNCG.
Le gendarme financier du football français, qui vient de sanctionner l'OL de John Textor d'un encadrement de la masse salariale et des transferts, n'a récemment pas tenu compte de la promesse de vente de la franchise américaine (environ 50 M€) par le nouveau propriétaire, bien qu'elle semble bien engagée. La commission d'appel n'a pas davantage retenu la somme de 60 M€ cash, à l'usage exclusif d'OL Groupe, déposée sur le compte d'une banque brésilienne de premier rang par Textor après le refus de la DNCG. Mais l'instance valide en revanche avec bien plus de facilité de simples promesses de transferts, des revenus par nature hypothétiques.
En fait, lorsque la DNCG reçoit un plan de financement basé en grande partie sur la vente de joueurs, comme celui de l'OL en décembre dernier, elle procède à une estimation du prix de chaque élément, en se basant notamment sur Transfermarkt. Dans le cas de Toko Ekambi, le site spécialisé estime son prix à 8 M€, plutôt très loin des 20 M€ promis par Aulas. Si l'instance de contrôle juge le prix non réaliste, elle peut le retoquer ou demander au club de revoir ses estimations. « Il est indéniable que la DNCG a fait preuve de bienveillance envers l'OL d'Aulas par le passé, souffle une source proche de l'instance. Par ailleurs, Aulas connaît Jean-Marc Mickeler (le patron du gendarme financier). »
Sollicité par l'intermédiaire du cabinet de conseil en stratégie « 2017 », qui gère aujourd'hui son image, Jean-Michel Aulas, actuellement en Australie auprès de l'équipe de France féminine, n'a pas pu répondre directement. Ses conseils ont transmis les éléments suivants : « Pour Toko Ekambi, la valeur était bien celle-là à l'époque avant son départ à Rennes, et il avait été acheté près de 20 M€ à Villarreal donc la somme n'est pas extravagante (en fait, 11,5 M€ après un prêt payant à 4 M€). Concernant Gusto, la prévision de vente initiale était en juin 2023 en accord avec l'agent. D'où le fait que "JMA" se soit opposé à cette vente en hiver. Pour le dossier DNCG, vous devriez consulter celui d'avril 2023 où vous constateriez que les ventes étaient réévaluées à 70 M€. Et nous avions aussi plusieurs leviers à actionner plus tôt, ce que n'a pas voulu faire John Textor. »
L'OL peut dépenser près de 25 M€, mais la masse salariale est encore trop élevée
Le désormais président d'honneur de l'OL a pour le coup déjà eu des paroles assez acerbes envers son successeur dans ces colonnes, il y a huit jours, en mettant en avant son propre bilan. « Moi, je n'ai jamais été inquiété par la DNCG. Je n'ai jamais eu un quelconque problème en trente-cinq ans de présidence. Jusqu'ici, la DNCG nous a toujours félicités pour notre gestion. » Le dirigeant de 73 ans a en revanche laissé des finances exsangues au moment de son éviction, plombées par les épisodes Covid, Mediapro et les non-qualifications successives pour la Ligue des champions. C'est ce que dit Santiago Cucci, en filigrane, dans l'interview qu'il nous a accordée.
Le nouveau président, chargé de mettre en place le changement de stratégie décidé par Textor, qui ne souhaite plus vendre les meilleurs jeunes du club chaque année, doit trouver de nouveaux leviers pour desserrer l'étreinte de la DNCG.
Selon nos informations, le club disposerait tout de même d'une enveloppe de près de 25 M€, sans grosse vente, pour mener à terme son mercato. Une sentinelle, un attaquant et un défenseur central sont toujours espérés. Mais ce sont les contraintes sur la masse salariale qui posent actuellement problème pour enrôler de nouveaux joueurs, et le club espère donc rapidement valider les départs de plusieurs éléments aux émoluments importants (Toko Ekambi, Kadewere, Koné, Reine-Adélaïde) pour reprendre de l'air.
https://www.lequipe.fr/Football/Article ... cg/1410121