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Décryptage : Jérémie Boga, le nouveau serial dribbleur de l'OGC Nice
Recruté pour 18 millions d'euros à l'Atalanta, Jérémie Boga (26 ans) retrouve au Gym Francesco Farioli qu'il a côtoyé à Sassuolo entre 2018 et janvier 2022. Une cohabitation qui pourrait permettre à l'Ivoirien de retrouver le football explosif qui a fait sa renommée de l'autre côté des Alpes.
Avec son arrivée en Ligue 1, Jérémie Boga ne découvrira ni la France, ni son Championnat. Né à Marseille, il a tapé ses premiers ballons à l'ASPTT de la cité phocéenne quelques années avant un passage discret au Stade Rennais durant la saison 2015-2016 (1 209 minutes, 3 buts et 1 passe décisive). Toutefois, c'est en Italie que la carrière de Boga a décollé.
Après de nombreux prêts (Rennes, Grenade, Birmingham) comme le veut la coutume pour les jeunes de Chelsea, c'est au contact de Roberto De Zerbi et Francesco Farioli, alors entraîneur des gardiens à Sassuolo, que l'ailier s'est envolé. Résultat ? Des qualités très fortes déployées malgré un volume statistique relativement faible qui lui auront valu un transfert important à l'Atalanta (22 millions d'euros) en janvier 2022. Si la greffe n'a pas pris à Bergame, l'espoir est de mise quant à son arrivée à Nice, lui qui retrouvera une région qu'il connaît par coeur et un entraîneur aux idées adaptées à ses qualités, ce qui avait pu lui faire défaut à la Dea.
Un dribbleur né
Ailier gauche droitier, Jérémie Boga est un joueur électrique, capable d'éliminer avec une facilité que peu partagent. En 2020, pour la Repubblica, Roberto De Zerbi s'était d'ailleurs risqué à une comparaison vertigineuse : « Boga est arrivé et ne savait pas comment se situer, ni par rapport à ses coéquipiers, ni par rapport au but. Mais quant à sa capacité à éliminer un joueur, je mets Messi devant lui et... je devrais y réfléchir ensuite. » Une déclaration osée mais confirmée par les chiffres, puisqu'en 2018-2019 et 2019-2020, Boga était le meilleur joueur de Serie A au nombre de dribbles réussis (82 la première année, 132 la suivante).
La palette technique et athlétique de l'Ivoirien est idéale pour exceller dans son style. Fréquence d'appuis fulgurante, dynamique sur ses premiers mètres, aptitude à utiliser ses deux pieds, aisance dans les petits espaces... Le bagage de Boga lui permet d'avoir un spectre large, ce qui lui offre la possibilité d'éliminer pour créer un décalage proche de la surface adverse mais aussi de mener certaines transitions en détruisant les premières lignes de pression.
Néanmoins, comme souvent avec ce type de profil explosif, Jérémie Boga n'a pas été épargné par les blessures. 318 jours d'absence recensés depuis novembre 2016 dont un problème à la cheville qui l'a écarté des terrains deux mois en fin de saison passée.
Sa relation contrastée avec la surface
Lors de la saison 2019-2020, Jérémie Boga a accompli son exercice le plus prolifique en termes de statistiques avec 11 buts et 4 passes décisives en Serie A. Toutefois, les 5 expected goals (xG) attendus sur cette période démontrent une certaine surchauffe devant le but, phénomène appuyé par les totaux relativement faibles de ses saisons précédentes et suivantes. Excepté sa deuxième année à Sassuolo, Boga n'a jamais dépassé les 4 réalisations (en 2020-2021) et les 5 offrandes (2022-2023) en Championnat. Un manque de volume finalement logique pour un joueur qui a disputé 27 matches et 1 591 minutes en moyenne sur ses cinq saisons en Serie A.
Doté d'un excellent pied droit qui lui permet d'apprivoiser parfaitement le demi-espace gauche, Boga est décisif le plus souvent dans cette zone. Pour enrouler côté opposé ou centrer au deuxième poteau (celui qui tirait les corners à l'Atalanta semble être plus à l'aise pour chercher des zones lointaines que pour centrer court ou en retrait), l'Ivoirien dispose d'un toucher soyeux. Sa verticalité et son habileté dans la densité peuvent aussi être un atout pour perforer, à l'image de la saison 2019-2020, la meilleure de sa carrière, où il avait été le joueur de Serie A à réussir le plus de chevauchées dans la surface de réparation.
Toutefois, l'ailier n'est pas un buteur né. Pas particulièrement attiré par le but, Boga laisse parfois passer des opportunités qui auraient certainement pu lui apporter un volume statistique plus épais si son jeu sans ballon avait été plus complet. Un constat que Gian Piero Gasperini, son coach à Bergame, avait d'ailleurs partagé : « Il a des qualités extraordinaires qu'il doit pouvoir mettre à disposition de l'équipe. Il doit être un joueur plus complet, qui ne se limite pas au dribble et aux un contre un. S'il apprend à entrer dans la surface comme Ademola Lookman, il pourrait marquer plus de buts. »
Quelle utilisation sous Farioli ?
« Oui, cela fait un moment que l'on se connaît. Nous avons passé deux ou trois ans ensemble à Sassuolo. Sa méthode de jeu m'a plu. Dès que je l'ai eu au téléphone, je savais déjà à peu près ce qu'il allait me proposer et disons que je n'ai pas hésité. C'est un style de jeu qui me convient très bien, qui me donne la liberté de m'exprimer, d'exprimer mon talent. Je sais et j'en suis sûr que nous allons passer une bonne saison ensemble. » Difficile de faire plus clair que les mots de Jérémie Boga lui-même à propos de Francesco Farioli lors de sa conférence de presse de présentation à l'OGC Nice.
Majoritairement utilisé comme deuxième attaquant ou deuxième numéro 10 dans le 3-4-1-2 ou 3-4-2-1 de Gasperini à l'Atalanta, Boga avait ainsi perdu sa zone initiale préférentielle : le couloir. Bien sûr, nombreux étaient ses déplacements vers ce périmètre, mais au sein d'un système qui comporte des pistons sur la largeur et un attaquant comme Duvan Zapata qu'il faut entourer, difficile de trop s'éloigner.
À Sassuolo, Boga avait majoritairement profité d'un 4-2-3-1 ou d'un 4-3-3 qu'il devrait retrouver cette saison du côté du Gym. Un système qui lui offre le loisir de provoquer dans l'intégralité de son couloir, tout en ayant parfois la liberté de se positionner à l'intérieur, lui qui dispose des qualités nécessaires pour provisoirement recevoir entre les lignes ou attaquer la profondeur, ce qu'il avait déjà démontré sous De Zerbi.
Alors que les premières bribes de Farioli ont déjà montré que son Gym devrait tenter d'aspirer le bloc adverse, facette qui avait fait la renommée de Brighton la saison passée et qui avait offert certaines cartouches à l'ailier gauche Kaoru Mitoma, Boga pourrait alors profiter de certains espaces dans la moitié de terrain adverse.
Joueur que l'on pourrait aisément comparer à Jérémy Doku par son gabarit (1,73 m pour Doku, 1,74 m pour Boga), sa facilité à éliminer (Doku est plus puissant que Boga alors que ce dernier semble avoir plus de maîtrise technique), ou son faible apport statistique comparé à son impact sur le terrain, Jérémie Boga arrive à Nice avec un rôle de détonateur. S'il retrouvera des repères sur la Côte d'Azur et que son association avec Francesco Farioli s'annonce naturelle, l'Ivoirien devra être plus consistant pour devenir un joueur important de Ligue 1, ce qu'il devrait être au vu de ses qualités impressionnantes.