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Sampaoli, pas si « loco »
Après un début de saison olé-olé, avec douze buts inscrits en cinq journées de L1, le pragmatique argentin a parfois sacrifié certaines velléités offensives sur l’autel de la rigueur. DE NOTRE ENVOYE SPÉCIAL PERMANENT
MATHIEU GRÉGOIRE (avec Ba.C.) MARSEILLE – Évidemment, après avoir vu l’OM contre Montpellier, Saint-Étienne, Lens, voire Lorient, après avoir assisté à des orgies de dribbles, de cavalcades, d’un contre un et de tirs, l’addiction peut guetter, la fièvre gagner le plus posé des spectateurs, qui ne trouverait pas si fou, après tout, de se faire tatouer « Hasta siempre Sampaoli » sur le mollet. Et le réveil peut également piquer après un match sans grand éclat à Angers, Lille ou Clermont, après trente-cinq minutes à 11 contre 10 lors du Classique à surveiller Mbappé plutôt qu’à essayer de gagner. Il faut se mouiller la nuque et désormais s’en convaincre, Jorge Sampaoli n’est pas Marcelo Bielsa, il est moins dogmatique, ce qui a ses avantages et ses inconvénients.
« Il sait s’ajuster, il a pris la mesure de la L1, observe David Guion, ex-entraîneur de Reims. Il s’adapte à l’adversaire, on le voit sur les joueurs alignés, notamment dans les couloirs. Konrad De La Fuente, Luis Henrique, Lirola… il y a des modulations. À Monaco, avec Dieng, il a exploité les possibilités sur le couloir droit de Monaco, l’endroit où l’ASM coulisse et change de système. Contre Nice, il a voulu trouver les failles du 4-4-2 niçois sur les ailes mais n’a pas réussi. Surtout, on entend le changement dans son discours : il commence à parler de solidité, d’animation défensive, plutôt que d’expression offensive de son équipe. Cet automne, on le voit chercher en priorité des complémentarités défensives entre ses joueurs, Rongier ou Kamara du côté de Saliba, Caleta-Car qui saisit sa chance dans l’axe. »
Moins d’occasions
mais plus d’assurance derrière
Le milieu angevin Thomas Mangani note lui aussi ces schémas plus rigoureux : « Cet été, les Marseillais jouaient souvent le un contre un, que ce soit Luan Peres ou Saliba, une grosse prise de risque. C’est moins le cas, les milieux Kamara, Rongier ou Guendouzi compensent sur les côtés ». À Troyes (contre Nice) et Clermont, en fin de match, un adjoint de Sampaoli a aussi supplié Gerson de verrouiller le côté gauche de l’OM. Cette Realpolitik se traduit dans les statistiques : moins d’occasions et d’expected goals produits, moins de tirs (la moyenne est passée de 16 par match sur les cinq premières journées de L1 à 11 sur les sept dernières), plus d’assurance derrière avec Pau Lopez qui n’a encaissé aucun but lors de sept des onze rencontres qu’il a disputées. Seule la possession reste stable. Toujours supérieure à l’adversaire, elle peut être sublimée ou non par un Payet quasi indispensable, que ce soit dans sa zone de confort, pour construire au milieu, ou plus haut, pour terminer les actions. « Ils font tourner et dès qu’ils trouvent Payet dans l’intervalle, tout s’accélère », poursuit Mangani.
Après le succès à Clermont (1-0), Guendouzi expliquait : « Être costauds défensivement permet de ressouder l’équipe physiquement. On ne peut pas instaurer notre jeu à tous les matches, on ne peut les maîtriser de la première à la dernière minute. À l’extérieur, de manière générale, c’est toujours un peu plus difficile. »
“Ce n’est pas toujours faire du beau jeu pour du beau jeu, les victoires à l’arrache font du bien
Saliba, défenseur central de l’OM
Saliba évoquait, lui, ces moments dans la saison « où on sera moins bien avec la balle. Ce n’est pas toujours faire du beau jeu pour faire du beau jeu, parfois, les victoires à l’arrache font du bien. Il y a de la fatigue, on a enchaîné beaucoup de matches ». Déjà, après Nice-OM (1-1), Kamara racontait une possible lassitude psychologique et un Sampaoli veillant à ce que ses joueurs ne vrillent pas. « À côté de l’aspect athlétique, les entraînements de Sampaoli sont énergivores au niveau mental, conclut Guion, avec une répétition de schémas défensifs et offensifs à assimiler lors des séances. Les Marseillais avaient sans doute plus de jus au début, mais ils ont aussi un luxe, un effectif de 16 à 18 joueurs pour réussir leur saison. »
L'Equipe