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Gerard Lopez: «Personne n’avait fait ça dans le foot français!»
Pour Gerard Lopez, le parcours des Lillois est une validation de son nouveau modèle pour le foot: construire un environnement stable pour jeunes joueurs en devenir. (Photo: Maison Moderne/archives)
La victoire à Angers, dimanche soir, a permis au Losc de remporter son quatrième titre de champion, après 11 années de disette. Un titre que les Dogues doivent (en partie) à l’ambition affichée par leur ex-président, Gerard Lopez, et son business model innovant.
Entre deux avions et trois projets, attraper Gerard Lopez est toujours un exercice particulier. L’ex-président du Losc ne le sait pas encore – l’interview a été réalisée le samedi 15 mai –, mais «son» équipe va damer le pion au PSG et remporter le titre de champion de France. Titre ou pas, le parcours des Lillois n’a fait que conforter l’homme d’affaires luxembourgeois dans ses convictions.
À peine parti de Lille, après avoir proposé au fonds Elliott de racheter ses parts, de nouvelles rumeurs vous annoncent dans de nouveaux projets. Où en êtes-vous?
Gerard Lopez. – «Il y a deux fonds avec lesquels j’ai pu travailler. Un avec lequel je regarde maintenant dans le détail. On n’est pas pressé. Je continue à penser – et je l’ai prouvé à Lille – que le foot est un sport qui me passionne et qui a le besoin d’être réinventé économiquement pour être durable. Le paradoxe est que les critiques que j’ai dû essuyer au départ de mon projet sont devenues les mantras aujourd’hui de quasiment tous les clubs.
Au départ, j’ai annoncé sans me cacher que la seule façon d’exister et de performer de manière sportive était la vente et l’achat de joueurs. J’ai été critiqué pour deux raisons: la première parce qu’on disait que c’était une vue capitalistique, et l’autre parce qu’on disait que la performance ne m’intéressait pas. Mon club, à part la première année, où je n’avais pas de joueur d’expérience – parce que l’entraîneur n’en a pas voulu –, a quand même fini quatrième, puis deuxième, et est actuellement premier. Côté performance, on a vu pire en trois saisons…
Surtout sans avoir de «stars» ni avoir dépensé beaucoup d’argent…
«Personne n’avait fait ça dans le foot français! À partir de là, j’ai prouvé que la performance est au cœur du projet. Ce qui est aussi au cœur du projet est de créer de la valeur pour le club. Dans mon cas, la valorisation de l’effectif aujourd’hui dépasse les 300 millions d’euros. Il y a eu quasiment 150 millions d’euros de dettes remboursées, y compris la dette historique antérieure à mon projet. Et il reste à rembourser 150-160 millions. Nous sommes passés d’un club qui avait des dettes très élevées et qui n’avait rien en face à un club qui a des dettes, mais qui a un actif beaucoup plus important. Et le sportif et l’économique se sont alignés. Que le Covid soit passé par là, que les droits télé soient passés par là, que les cash flows soient tendus, c’est la réalité à Lille, et c’est la réalité dans 17 clubs en France, quand on exclut le PSG, Monaco et Nice.
Le système a été inventé en grosse partie par Johan Cruyff à l’Ajax d’Amsterdam. L’Ajax joue, dans toutes les catégories d’âge, le même type de foot. L’Ajax change d’équipe tous les ans et est toujours performant. Nous avons pris un modèle similaire.
Gerard Lopez
Gerard Lopez
Si je me fais un peu l’avocat du diable, c’est votre modèle qui est bon, ou c’est un heureux concours de circonstances, ce qui ne rend pas le modèle reproductible?
«Le modèle est hyper précis et on l’a annoncé au départ. On l’a exécuté et on l’a réussi. La chance, tu peux l’avoir sur une saison. Si tu vends beaucoup de joueurs tous les ans et que, chaque année, tu reconstruis une équipe et que tu performes à un niveau encore plus élevé, c’est que ton modèle fonctionne.
Le modèle dont vous parlez, c’est quoi?
«Tu commences avec un investissement plutôt important dans les joueurs. Mais surtout, tu fais un investissement très important dans la structure du club. Et tu fais en sorte que le club crée une culture, c’est là où l’entraîneur est très important, comme les gens qui cherchent les joueurs. Une culture dans laquelle c’est très facile pour les jeunes joueurs de s’adapter et de se retrouver dans le club. Tu as un système de jeu qui ne change pas souvent, tu as un club qui est au service des jeunes joueurs à tous les points de vue, sur le terrain, dans les vestiaires et en dehors du terrain. Une culture d’acceptation. Des joueurs d’expérience entourent tout cela.
Quand tu vas chercher des joueurs, contrairement à la plupart des clubs, comme tu ne changes pas ton entraîneur, comme ton système ne change pas, tu enlèves des variables. Et je crée des certitudes. Quand la cellule de recrutement va chercher un joueur, elle ne cherche pas le meilleur joueur à ce poste-là, mais celui qui va le mieux s’adapter aux joueurs qui vont rester. Chaque saison, tu commences avec des joueurs qui sont différents, mais avec un système de jeu qui est quasiment le même, des joueurs qui sont là et qui le connaissent, et d’autres qui n’ont pas besoin d’en apprendre quatre ou cinq parce que l’entraîneur change tous les week-ends.
Je n’ai pas inventé ce système-là, j’en ai fait quelque chose de beaucoup plus poussé. Le système a été inventé en grosse partie par Johan Cruyff à l’Ajax d’Amsterdam. L’Ajax joue, dans toutes les catégories d’âge, le même type de foot. L’Ajax change d’équipe tous les ans et est toujours performant. Nous avons pris un modèle similaire, poussé peut-être encore un peu plus, adapté au foot moderne d’aujourd’hui.
C’est quoi le foot moderne, aujourd’hui?
«C’est une équation hyper simple: la performance coûte de l’argent. Si tu as de l’argent à dépenser, parce que les clubs sont détenus par de gros investisseurs ou des milliardaires, l’équation est simple. Tu mets de l’argent, et, éventuellement, si tu fais tout comme il faut, tu auras de la performance. Si tu n’as pas des sommes astronomiques à investir, qui vont parfois jusqu’à des centaines de millions d’euros par an, ton stade, même si tu le remplis tous les jours de matchs, ne te rapportera pas plus que le nombre de places qu’il contient. Tes droits télé ne sont pas une variable, ils sont une constante.
En dehors de l’Angleterre, tu n’as pas un seul championnat en Europe où les droits sont assez élevés pour couvrir les cours d’un club performant. Si tes revenus de stade, tes revenus de droits télé et tes revenus de sponsoring – et les sponsors ne se ruent pas, dans le foot – ne te permettent pas de couvrir la performance, tu as deux choix. Ou bien tu deviens un club moyen et tu l’acceptes, avec les risques que cela peut comporter (tu peux terminer 10e comme 18e, et on le voit tous les ans), ou bien la seule variable sur laquelle tu peux jouer est celle des jeunes joueurs. Un peu comme si tu étais dans le venture capital. Tu investis dans du talent et tu décides de construire ce talent, pour lequel tu crées un environnement dans lequel tu enlèves les facteurs de risque.
C’est la dernière conversation un peu sérieuse qu’on ait eue sur le football, avant que vous ne preniez les rênes à Lille, où vous parliez déjà de cela dans ces termes, de bien screener le centre de formation pour voir qui allait pouvoir émerger et quand… Vous êtes sorti de Lille avec plus de certitudes que votre modèle était le bon?
«Exactement. La preuve en est que Lille, en ayant vendu pour quasiment 400 millions d’euros de joueurs sur deux étés et un hiver, est premier du championnat français. Avec un investissement de 170 millions d’euros grosso modo.
Avec vos certitudes et les rumeurs incessantes de votre arrivée dans l’un ou l’autre club, qu’est-ce qui vous passionne?
«Comme on a parlé de tout sauf du foot, on n’a pas parlé de ce qui me passionne! C’est le foot.
Moi, un projet dans lequel je pourrais continuer à construire un modèle qui rend un club performant tout en le valorisant financièrement, ça va m’intéresser. À la base de tout, je ne ferais pas ça dans un autre sport.
Gerard Lopez
Gerard Lopez
Même dans un club qui n’a pas la réputation des grands. Parce qu’on pourrait imaginer que vous ayez envie de passer au top niveau, non? Rêver de la Ligue des champions.
«Le top niveau, ce ne sera jamais le niveau de référence pour moi. Cela ne m’intéresse pas de faire un projet comme ça dans un club qui est déjà prêt. Dans les deux clubs qu’on évoquait début mai, il y en a deux qui ont ressorti de bons jeunes joueurs, Southampton et Genoa. Dans le cadre d’un projet de foot, que ce soit en Italie ou en Angleterre, l’idée est d’investir de façon importante dans des joueurs la première année, et c’est l’amorçage du projet. Tu combines cela avec des joueurs qui viennent du centre de formation en deux ou trois ans, et tu arrives avec beaucoup, beaucoup de travail, un peu de savoir-faire et de la chance, parce que, sportivement, parfois, la balle heurte un poteau et ne rentre pas… Il y a moyen de faire un truc excitant.
Moi, un projet dans lequel je pourrais continuer à construire un modèle qui rend un club performant tout en le valorisant financièrement, ça va m’intéresser. À la base de tout, je ne ferais pas ça dans un autre sport. Je le fais parce que je suis un passionné de foot. Parce que j’aime, pendant 95 minutes par semaine, vibrer, sans être un investisseur, un homme d’affaires ou un gestionnaire… ou rien du tout.
Vous n’avez pas envie de gagner la Ligue des champions?
«Non.
Quel est le truc ultime que vous avez envie de gagner?
«Je suis réaliste. J’ai envie de réussir un projet. Pour moi, cette réussite est d’essayer d’atteindre la performance maximale qu’un club de taille moyenne peut atteindre. Prends un championnat italien qui est un championnat relevé avec l’Inter, la Juve, l’AC Milan, Naples, avec maintenant une équipe comme l’Atalanta, qui marche plutôt bien. Quand tu veux gagner le championnat, il faut battre toutes ces équipes-là. Cela serait prétentieux de dire que tu peux y arriver. Comme ça aurait été prétentieux de dire à Lille: ‘Tu peux jouer la première place contre le PSG’…
Oui, mais ça ne vous empêche pas de dire que vous rêvez d’un trophée comme la Ligue des champions…
«Je rêve d’aller la jouer et d’y faire un jour un très bon résultat avec un club. La gagner, ça veut dire que tu prends tous ces clubs italiens, la même chose en Angleterre, en Espagne et en Allemagne. Avec n’importe quel club, j’aimerais jouer l’Europe! Si jamais j’investissais en Italie, j’aimerais investir dans des joueurs avec lesquels entrer d’ici deux ans en Coupe d’Europe. Ce niveau-là m’intéresse. Le fait que Lille puisse gagner le championnat à deux journées de la fin, ça me rend hyper fier. Il y a quatre ans, personne ne l’aurait cru. Tous les ans, quand on vendait des joueurs, les gens disaient que ça n’allait pas le faire et que nous allions faire une mauvaise saison. À chaque fois, on fait une bonne saison. C’est le mérite des joueurs, le mérite de l’entraîneur, qui sont les acteurs d’un scénario que tu écris. J’aimerais, à un moment donné, refaire la même chose. Surtout parce que j’ai aussi pu faire des erreurs et que tu apprends de tes erreurs. Il y a certainement des choses que je corrigerai. L’économique vient par la force des choses, parce que tu ne peux pas gérer un club si tu ne t’intéresses pas à ça. Mais si je pouvais éviter de penser à ça et ne m’intéresser qu’aux matchs, j’adorerais.
Revenir aux clubs ‘baraque à frites et saucisses, avec quelques personnes qui t’aident gratuitement’, ça me ferait plaisir. Mais ce n’est pas le foot performant et le foot moderne.
Gerard Lopez
Gerard Lopez
Est-ce qu’on n’est pas arrivé à un drôle de moment, avec les droits télé? Il fut une époque où tu allais au stade, une autre où les matchs étaient diffusés sur une chaîne, et maintenant, on a une offre complètement explosée entre les sites officiels, les sites de streaming et les diffusions pirates…
«C’est une problématique, bien sûr. On a oublié l’expérience de la personne, qui est la plus intéressante dans la chaîne, le supporter, le fan, celui qui s’intéresse au foot. Il y a des endroits où il faut trois box pour voir tous les matchs. C’est juste pas possible. En Angleterre, c’est clair, et ce sont eux qui touchent le plus d’argent. L’Italie est maintenant dans un modèle d’une seule offre, l’Allemagne pareil. En France, on a ce méli-mélo, mais ça risque de changer et de revenir vers quelque chose de plus centré.
Est-ce que les clubs sont trop dépendants des droits télé?
«Complètement! Et tu ne peux pas faire machine arrière. C’est comme dire que la NBA est trop dépendante des droits télé américains. Revenir aux clubs ‘baraque à frites et saucisses, avec quelques personnes qui t’aident gratuitement’, ça me ferait plaisir. Tu vois des matchs sympa le week-end. Mais ce n’est pas le foot performant et le foot moderne. C’est trop facile de critiquer les droits télé dans le foot quand on ne les critique pas dans d’autres sports. Personne ne critique que le vainqueur de Roland-Garros touche ce qu’il touche. Ou que le vainqueur du Masters de golf touche ce qu’il touche. L’argent vient des droits télé, que ce soit dans la NBA, dans la NFL, dans le football américain, dans le base-ball…
Aujourd’hui, l’argent dans le base-ball, c’est des contrats à 250 millions de dollars par joueur. Par joueur. Le sport est un contenu de consommation super intéressant. Rien qu’en France, tu as 20 équipes de Ligue 1, chaque équipe joue 38 matchs, soit 700 à 800 matchs par saison, sans parler de la Coupe de la Ligue, de la Coupe de France, la Coupe d’Europe… Tu paies 700 millions à 1 milliard pour cela. Si tu prends les prix de production d’une série pour Netflix, c’est au-delà de cela, et tu as à peu près moins d’un centième de contenu! Le sport a cet avantage!
Oui, tu paies les acteurs, mais tu n’as pas besoin d’écrire de scénario, ils se développent tout seuls. En plus, le sport touche toutes les couches sociales et tous les âges. Quand tu vois qu’une série Netflix coûte 400 à 500 millions d’euros pour une saison, et que c’est 30 épisodes… L’équivalent dans un championnat normal, c’est 700 épisodes! Et c’est émotionnel: tu ne connais pas le résultat, et tu peux t’identifier à des stars, qu’elles s’appellent Neymar ou Mbappé.
Sorti de son contexte sportif, le sport propose aujourd’hui aux médias qui cherchent du contenu un contenu hyper intéressant. Pourquoi les droits télé ont explosé aux États-Unis ces 10 dernières années dans quasiment tous les sports? C’est simple: tu ne peux pas remplir une grille des programmes avec la météo, le journal télévisé… Tu ne donnes pas d’émotions. Tu peux avoir la meilleure série sur Netflix au monde, tu vas kiffer, un peu stressé de savoir si le personnage principal va mourir ou pas… C’est écrit d’avance.
Si tu as un copain qui l’a regardée avant, il va te spoiler et tu vas savoir ce qui va se passer. Dans le sport, ça n’arrive pas. Au basket, tu as une finale de NBA à 101-101, et à deux secondes de la fin… Tu imagines ce qu’une série télévisée devrait faire pour procurer les mêmes sensations? C’est impossible! Le sport a cet énorme avantage, et il l’aura toujours. Pour ce qui est du foot, c’est encore plus spécial. Ce sont les émotions, mais aussi l’appartenance à une équipe, souvent à une ville ou une région…
… ce qui a un peu changé, ces dernières années, avec la mercenarisation des joueurs, non? Les transferts à 200 millions de joueurs qui n’ont pas d’accroche locale…
«À moi de me faire l’avocat du diable! Tu penses que les fans du PSG se plaignent que Neymar soit chez eux?
Non!
«Tu penses que les fans des autres clubs détestent le PSG pour cela?
Oui.
«À partir de là, tu as une super histoire! Tu as l’histoire de fans de clubs qui détestent d’autres clubs. En quoi c’est différent du foot d’il y a 50 ans? La différence, quand on pense au foot d’il y a 50 ans, on n’en parle jamais: le Real de Madrid, quand ils ont gagné toutes les Coupes d’Europe, ils ont fait venir des joueurs comme Puskas, comme Kopa, ou ils ont naturalisé Di Stefano, qui n’avait jamais mis les pieds à Madrid. Ça n’a gêné personne, si ce n’est le Barça ou le Stade de Reims, parce qu’on leur piquait leurs meilleurs joueurs… Ce n’est pas différent aujourd’hui. Comme dans tous les sports, c’est surmédiatisé! On vit dans le moment! Mais rien n’a changé! Les rivalités existent, elles sont juste devenues mondialisées parce que les fans du Real sont en Corée du Sud, en Chine, au Japon, en Malaisie. Le Real n’avait pas de fans en Malaisie il y a 60 ans. Les chiffres ont explosé.
Les chiffres ont explosé, comme les audiences et les fan-clubs. Est-ce que, comme dans le reste de la finance, le sport en général, et le football en particulier, peuvent devenir à ce point décentralisés? Est-ce que cela pourrait changer la financiarisation des transferts, comme si une communauté pouvait acheter un joueur pour le mettre au service de son club?
«Le sujet a été abordé à de nombreuses reprises. Tous ces trucs – bien qu’ils changent de nom –, ils existent. Si tu considères un joueur de foot plus que comme un être humain qui sait jouer au foot, qui est jeune, qui a une vie privée, pour le considérer de manière financière, il a une valeur émotionnelle. Le fait que le club puisse aimer le joueur. Le fait que les fans puissent aimer le joueur. Et une valeur financière, puisque tu as des coûts, des salaires, des coûts de transferts et de vente du joueur. Dans d’autres industries, il arrive très souvent qu’on fasse une sécurisation des avoirs. Tu empruntes contre un bâtiment. Ce qu’on fait en partie dans le foot.
Une des choses qu’on est en train de voir maintenant avec les cryptos, c’est la capacité de donner à n’importe qui dans la rue une petite partie de quelque chose. J’ai vu pas mal de projets, et je pense que, soit au niveau de l’entité ‘club’, soit au niveau de l’entité ‘joueur’, ça va se faire. L’entité ‘club’, c’est que les clubs qui sont en partie détenus par des investisseurs ou qui ont des problèmes et qui cherchent à se faire un modèle de socios ont beaucoup de mal en raison des statuts, des ligues, etc. Une façon de créer un modèle de socios sans passer par des changements de statuts est de digitaliser une partie des avoirs du club. C’est inévitable, et on va le voir à un moment donné.
C’est chouette aussi au niveau de l’engagement des fans vis-à-vis du club…
«Bien entendu! Pourquoi des clubs cotés sont surpayés en termes d’achat? Prends Rome, qui a été racheté il n’y a pas longtemps, et dont le nouveau propriétaire a payé beaucoup plus que la valeur en bourse. Cette valeur n’est pas représentative de la valeur du club, mais surtout, elle n’est pas représentative de la valeur émotionnelle du club! Celui qui a une action de Rome est fier d’être actionnaire, et il s’en fout de la performance de l’action! Il n’a pas acheté du Facebook ou du Tesla! C’est le meilleur actionnaire au monde. Il s’en moque des résultats financiers, tant que le club est performant. Cette émotionnalité ne doit pas être perdue! Il existe des acteurs qui permettent de la faire exister.
On peut aussi imaginer que des socios qui ont envie de voir Messi à Lille abondent dans un fonds pour cela…
«Bien sûr! Il n’y a pas de limite! Même pour un nouveau stade! On est à l’aube de cette décentralisation financière qui pourrait donner de nouveaux éléments. À la base de tout, à la base de mon foot à moi, il y a l’émotion! Il est beaucoup plus facile de trader des actions de sociétés que de faire ce que nous faisons dans le foot. Mais les actions dans les sociétés, ce n’est pas un truc qui me donne mal au ventre comme quand j’ai perdu en championnat! Il ne faut pas perdre cette émotion!
Il y a quelques années, on voyait certaines fortunes, arabes, chinoises ou américaines, chercher des clubs comme une nouvelle vitrine personnelle. Est-ce qu’on a toujours envie de se payer un club comme une danseuse?
«Ce qui a changé, c’est l’objectif. L’objectif danseuse a changé. Aujourd’hui, les acheteurs américains existent, et plus qu’avant, comme les acheteurs du Moyen-Orient. Les acheteurs chinois, un peu moins, parce que le gouvernement a fait marche arrière. La plupart de ceux qui regardent les clubs de foot les regardent parce qu’ils ont compris que le sport en général est devenu très important dans le panorama du contenu. Un contenu qui est irremplaçable.»