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Les détails de la nouvelle formule de la Ligue des champions qui devrait voir le jour en 2024
Pour ne pas risquer de disparaître au profit d'une Superligue fermée, la C1 s'apprête à se réformer à nouveau, dès 2024. Avec plus de matches et potentiellement quatre clubs français.
Mardi, la Ligue des champions vampirisera de nouveau nos soirées. Barça-PSG est une affiche des huitièmes de finale alléchante que l'on pourrait retrouver régulièrement dès le premier tour, à partir de 2024. Le projet de réforme de la C1 porté par l'UEFA arrive dans sa phase terminale et tout porte à croire qu'il sera adopté, le mois prochain, lors d'un comité exécutif. Il ferait grimper le nombre de participants à 36 (+ 4), le nombre de journées à 10 (+ 4), le nombre de matches à 225 (+ 100) et abolirait le concept de groupes et de matches aller-retour lors du premier tour.
Il y a déjà eu pire par le passé, comme ces deux phases de groupes interminables entre 1999 et 2003, qui avaient asséché les audiences et obligé l'UEFA à se déjuger. Il y a aussi eu pire sur la table, comme cette révolution poussée par la puissante ECA (l'association européenne des clubs) en 2019, qui prévoyait une C1 avec quatre groupes de huit, où les six premiers se qualifiaient pour l'édition suivante, au mépris du mérite sportif dans les Championnats nationaux. La levée de boucliers de nombreuses Ligues et Fédérations avait fait reculer l'UEFA, qui se contente cette année d'une mouture dans l'air du temps, avec plus de spectacle et de revenus.
Dans le détail, cette nouvelle formule, baptisée « le système suisse », proposera quasiment le double de matches au premier tour (180 contre 96 actuellement), une sorte de Championnat à 36 équipes, avec 10 matches pour chacun (5 à domicile, 5 à l'extérieur), contre des adversaires différents d'un niveau varié. En l'absence de groupes, le coefficient UEFA des clubs permettra de déterminer l'appartenance à un chapeau. Comme lors du tirage au sort de la phase de groupes actuelle, le premier comportera les principaux champions, et les chapeaux 2 à 4 se garniront dans l'ordre décroissant des coefficients. Selon nos informations, une équipe du premier pot affrontera deux autres formations têtes de série, mais aussi trois du chapeau 2, trois du chapeau 3 et deux du chapeau 4. Si l'on simule avec le PSG et les participants de cette saison, cela aurait pu donner les cinq affiches suivantes : PSG-Juve, Real Madrid-PSG, Dortmund-PSG, PSG-Manchester City et PSG-Chelsea !
Des matches de C1 le jeudi et en janvier
Pour se qualifier directement en huitièmes de finale, il faudra figurer parmi les huit premiers du classement général. Entre les places 9 et 24, on disputera des sortes de seizièmes de finale en aller-retour. Au-delà, ce sera l'élimination, sans la Ligue Europa comme consolation. Ce premier tour atypique, difficilement lisible, amènera d'autres évolutions, comme la possibilité d'étendre cette période de septembre à janvier, ou de jouer des matches de C1 le jeudi. Avec le risque accru de voir certaines grosses écuries aligner leur meilleur onze en milieu de semaine et une équipe B en Championnat le week-end. « On se dirige petit à petit mais tout droit vers une Superligue européenne, estime un connaisseur des arcanes de l'UEFA. L'argent est le moteur de ces mutations. Je ne sais pas si c'est mauvais en soi, mais les matches les plus captivants restent ceux à élimination directe. »
Ce basculement inéluctable vers un autre monde découle du rapport de force imposé à l'UEFA, contrainte de faire évoluer à intervalle régulier la formule de sa Ligue des champions face au serpent de mer d'une Ligue fermée séparatiste agité par les plus gros clubs avec un venin quasi machiavélique. « La tendance de ces dirigeants, c'est de s'accaparer une plus grosse part du gâteau. Chaque réforme leur permet de diminuer la part aléatoire des résultats, de réduire le risque, d'assurer des revenus et, à terme, des profits », juge Luc Arrondel, directeur de recherche au CNRS, chercheur et professeur associé à la Paris School of Economics (PSE).
Cette lutte à trois pour capter une partie du magot déchire l'UEFA, l'ECA et la FIFA, qui va créer une nouvelle Coupe du monde des clubs à 24 équipes, dont 8 européennes. « On peut se demander si le football tel qu'on le connaît n'est pas arrivé au bout de son chemin », poursuit Arrondel.
En attendant que le mirage Superligue se matérialise, la nouvelle C1 devrait garantir deux places aux clubs les mieux classés au coefficient UEFA parmi ceux qui n'auraient pu obtenir, via leur Championnat, qu'un billet pour la Ligue Europa ou la Ligue Europa Conférence, la troisième Coupe d'Europe à compter de cet été. C'est un début de passe-droit pour les très gros, mais le football français sortira aussi gagnant de la réforme. Rationné depuis plusieurs années à un quota de 2+1, il récupérera l'un des quatre billets supplémentaires et passera à 3+1 selon nos informations, à condition de rester cinquième nation à l'indice UEFA d'ici là.
« Ne surtout pas penser que la 5e place est la place de la France ! »
La saison dernière, cela aurait placé Lille au 3e tour préliminaire et qualifié directement Rennes, qui a eu besoin de la victoire du Séville FC en C3 pour rejoindre le PSG et l'OM, et échapper à deux tours qualificatifs. « C'est un sujet sur la table depuis très longtemps. Cela me semble plus équilibré entre les quatre plus grosses nations (4 tickets directs) et la cinquième (3 + 1), apprécie son président, Nicolas Holveck, pourtant très méfiant. Il ne faut surtout pas penser que la 5e place est la place de la France ! Entre 150 et 250 M€ de plus pourraient être générés si nous avions 4 clubs. Ces rentrées d'argent viendraient compenser des pertes. Réfléchissons ensemble aux meilleures réformes possibles à mettre en oeuvre pour que la France reste cette 5e association. »
La mise en garde peut sembler alarmiste, surtout avec un matelas de 7 points d'avance sur le Portugal, mais les projections lui donnent raison. Si l'on prend en compte l'indice UEFA uniquement depuis l'été 2018, c'est-à-dire, à mi-chemin, celui qui servira de base de calcul en 2023 à l'accession aux Coupes d'Europe 2024-2025, la France (28,999 points) a déjà cédé cette fameuse cinquième place au Portugal (29,600 points)...