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Le centre de formation de l'OM peine toujours à sortir des talents
Si l'accompagnement des jeunes et les infrastructures ont été améliorés au fil des ans, l'OM peine à sortir des talents de son centre de formation, qui a seulement reçu deux étoiles et demie, sur quatre, de la part de la Fédération française.
Vingtième au classement des centres de formation édité par la Fédération française en juin 2017, 13e à l'été 2020, l'OM continue de naviguer dans le « ventre mou ». La Fédération ayant désormais choisi un barème galactique, il a recueilli deux étoiles et demie (sur cinq), 15 clubs de Ligue 1 (voir pages 32-33) ou Ligue 2 affichant un meilleur bilan.
« La formation, qui n'a jamais été au coeur de la stratégie de ce club, deviendra un élément fondateur de ce nouveau cycle, et cela ne se fera pas en deux ans, en trois ans », expliquait Jacques-Henri Eyraud en juillet 2019, peu après la nomination de Nasser Larguet à la tête du centre. Si JHE a rendu son tablier cet hiver, le formateur de 62 ans est toujours là, pour remplir une tâche ardue : « Élever notre exigence pour sortir, à terme, deux joueurs par génération capables de faire ce qu'a fait "Bouba" Kamara (passé pro en mai 2017). En toute objectivité, ce ne sera pas tout de suite, pas dans les deux saisons à venir. Il y a beaucoup de travail. »
Posé et rigoureux, Larguet tente de relever le défi imposé à ses prédécesseurs : installer des jeunes en équipe une dans un club au sein duquel on n'a pas le temps d'installer des jeunes dans l'équipe une, sauf en période de crise extrême ou d'effectif rabougri. « Le classement général des centres est conforme à ce qu'on vit aujourd'hui à l'OM, dit le directeur. Le club a mis les moyens dans les infrastructures, en ce qui concerne la scolarité et l'accompagnement. Sur le plan sportif, on joue les trois premières places de L1 et la qualification en Ligue des champions tous les ans, et il y a encore un écart pour que nos joueurs atteignent l'équipe première et les sélections nationales de jeunes. »
Literie impeccable, professeurs passionnants : la Commanderie a obtenu en 2020 le label prestige, cher à Eyraud. Mais ses premiers contrats professionnels peinent à confirmer. « L'OM forme des joueurs honnêtes, pas des "top guns" », souligne un éducateur cinéphile.
Passés pros en 2019, Alexandre Phliponeau vient de filer à Sète (National) et Abdallah Ali Mohamed à Lausanne Ouchy (Division 2 suisse). Sacha Marasovic (2018) est libre, Florian Chabrolle (2018) joue à l'AC Ajaccio (Ligue 2), Christopher Rocchia (2017) à Dijon (Ligue 2), Marley Aké (2019) avec les moins de 23 ans de la Juventus, qui évoluent en Division 3 italienne. Lucas Perrin (2018) a une belle opportunité de se montrer à Strasbourg, club auquel il vient d'être prêté. Sur les 6 de la cuvée 2020, seul Cheick Souaré a fait ses débuts en pros la saison dernière, certains, comme Nassim Ahmed ou Richecard Richard (prêté à Créteil, National), devraient vite définitivement changer d'air.
Les plus talentueux (Isaac Lihadji et Niels Nkounkou) ont signé ailleurs (Lille et Everton, respectivement) et les générations récentes n'étaient pas assez denses. « Le contrat pro est un passe pour aller taper à la porte du groupe pro, quand certains jeunes le voient ici comme un statut », confie Larguet. Déjà bien payés, portés aux nues sur les réseaux sociaux, quelques minots se voient trop vite arrivés.
Disant faire son « autocritique », le directeur du centre s'est remis en cause sur le choix des joueurs et a souhaité améliorer la détection : « On a renforcé la cellule de recrutement, désormais commune avec celle des pros. Avant, on se concentrait essentiellement sur la région PACA (Provence-Alpes-Côte d'Azur), où on n'a pas toujours le dernier mot face à la concurrence de Montpellier, Nice ou Monaco. On a élargi notre réseau à tout l'Hexagone. »
L'OM a aussi décidé de bâtir un groupe élite, antichambre des pros rassemblant les meilleurs de chaque génération, pour créer de l'émulation, et a recruté Jean-Claude Giuntini (ex-directeur technique national adjoint et sélectionneur de l'équipe de France des moins de 18 ans) pour le chapeauter. Denis Moutier, venu du Pôle Espoirs d'Aix-en-Provence, a été choisi pour superviser la préformation après la greffe ratée de Grégory Vignal (ex-Rangers). Faisant la liaison quotidienne avec le staff de Jorge Sampaoli (Pablo Fernandez et Jacques Abardonado), Larguet fait « monter » sur demande des jeunes pour les séances des pros (3 éléments mardi dernier, une dizaine mercredi, etc.).
La formation olympienne devra trouver sa place dans le projet Longoria, tourné vers le « trading » et la création de valeur. Le président espagnol a recruté de nombreux jeunes en post-formation ou début de carrière (Luis Henrique, De la Fuente, Saliba, Pape Gueye, Balerdi ou Guendouzi ont tous entre 19 et 22 ans). David Friio, le directeur technique, est lui à l'affût de toutes les promesses en fin de contrat dans les pouponnières des rivaux. Cette stratégie aperçue à Nice ou Lille se fait souvent aux dépens des purs produits du centre. « On est en phase avec ce que fait Pablo (Longoria), précise Larguet. Si on ne peut pas lui fournir ce type de joueurs, il doit les trouver ailleurs. Je ne suis pas choqué qu'il recrute, avec David Friio (directeur technique), les deux Niçois (Bilal Nadir, milieu de terrain de 17 ans, et Salim Ben Seghir, ailier de 18 ans), ils ont un niveau que nous n'avons pas aujourd'hui au centre. »
L'Equipe