LETTRE OUVERTE À PABLO LONGORIA « ÉCOUTE-MOI, POUR UNE FOIS »
J’aurais pu me taire face à la situation et ne rien écrire. Me dire que, tout comme les dirigeants qui te précèdent, tu ne prendras en compte mes analyses qu’une fois qu’il sera trop tard. Me rappeler ma censure par plusieurs médias, dont TF1, et mon parcours professionnel semé d’obstacles pour avoir fait pendant 20 ans de l’intérêt de l’OM ma seule grille d’analyse. Puis je me suis dit qu’il y a peut-être une infime chance que ceci te parvienne. Pablo Longoria, toi qui parlais en avril 2022 de l’OM comme de « l’aventure d’une vie« , réaliserais alors que la frontière qui te sépare de président destiné au départ à marquer l’histoire de l’OM et celle de président quelconque est aujourd’hui très mince. Et que malgré des intuitions et une perception très justes à ton arrivée, tu passes désormais à côté de nombreuses décisions clés à l’OM. Analyse
Après t’avoir soutenu sur mes réseaux sociaux dans la crise du 18 septembre, comme je ne l’ai jamais fait auparavant pour aucun dirigeant, en vingt ans d’analyses sur l’OM, en voici une nouvelle que je diffuse symboliquement un dimanche. Il s’agit du jour de diffusion de l’émission de TF1 Téléfoot, qui m’avait censuré. « Pour faire gagner l’OM il faut déjà partir de ce qui le fait perdre » rappelait Bernard Tapie. Telle est la méthode du Corbeau Phocéen, inverser et analyser les précédentes erreurs de décision à l’OM, afin d’éviter de les reproduire et de faciliter les réussites. Avec toujours une grille de lecture, indispensable au succès du club : l’adéquation avec l’OM.
Alexis Sanchez et les symptômes d’une stratégie en inadéquation avec l’OM
« On a proposé à Sanchez de rester avec nous. On lui a proposé un meilleur salaire que ce qu’il a eu cette saison. » (Pablo Longoria, 05/06/23). Je l’ai souvent écrit : à l’OM, plus que dans tout autre club, une seule erreur peut suffire à fragiliser un équilibre apparent. Pour s’en préserver, il est utile d’analyser les erreurs similaires du club, afin de ne pas les reproduire : le cas de la non conservation de Gomis à ce poste et ses conséquences sous la présidence JHE était un précédent (lire mon article d’analyse à l’époque ici) puis de mieux étudier l’adéquation ou non des décisions avec l’OM. Avant de critiquer la décision de ne pas garder Sanchez, il faut être juste et rappeler que c’est Pablo Longoria qui a permis de le recruter un an avant. Un transfert que j’avais alors applaudi, là où la sphère médiatique annonçait un joueur fini, et où des supporters affichaient leur scepticisme. Pour trois raisons principales : les joueurs de calibre européen qui signent à l’OM sont rares et poussent généralement le club vers le haut. Sanchez était sur ce point cité comme « un exemple de travail » par Longoria. Ensuite, la possibilité de rêver et l’identification du public au joueur, dont ont besoin les supporters de l’OM, constatée dès son arrivée à l’aéroport de Marignane. Enfin, l’adéquation du profil technique du joueur et de sa mentalité avec l’OM. La conférence de presse de Longoria moins d’un an après son arrivée, début juin 2023, à vu le club opérer un premier revirement, ponctué le 23 juin par le changement d’entraîneur, avec Marcelino, et de stratégie sur ce dossier. Pour justifier ce départ, les questions « d’incompatibilité technique » puis de « complémentarité » et de « meilleure décision pour le collectif » seront évoquées par Pablo Longoria, le 28/08/23. En parallèle, le président de l’OM loue lors de cet entretien la complémentarité fictive et donc incertaine entre Aubameyang, Iliman Ndiaye et Vitinha « trois joueurs aux profils qui collent parfaitement entre eux« .
Point important, l’élimination en août de la C1, et ses conséquences sur la saison, ne peut pourtant être dissociée du manque de repères d’une ligne offensive de l’OM 100% renouvelée, au moment d’affronter en août le Panathinaikos, en aller-retour des barrages. S’en suivra ensuite la mémorable crise de septembre. On en revient à ce que l’OM fait trop peu quand il prend une décision : étudier son adéquation mais aussi la ramener à l’échelle du club. Un joueur comme Sanchez est sans doute anecdotique pour un club comme la Juventus ou Valence, clubs par lesquels est passé Pablo Longoria. Il l’est beaucoup moins pour l’OM. Pour preuve ? Seuls Lucho Gonzalez, Heinze, Luiz Gustavo et à un degré moindre Lassana Diarra sont arrivés avec un statut et une aura similaires en 20 ans. C’est très peu. Le dernier attaquant de pointe à avoir marqué, comme Sanchez, deux buts en C1 avec l’OM en une saison était Brandao en 2010-2011, treize ans en arrière. Le dernier à ce poste à avoir marqué au moins 15 buts en L1 avec l’OM est Gomis en 2016-2017, il y a six ans. Preuve statistique, et les errements de Vitinha lors d’un OM-As Monaco qui a acté son départ sont là pour le rappeler, de la difficulté de réussir à ce poste à l’OM. Pour finir, plutôt qu’analyser les causes de la non prolongation de Sanchez, erreur déjà marquante de la présidence Longoria, elle est surtout un symptôme du dysfonctionnement des décisions à l’OM. Au delà du manque d’autocritique, leurs conséquences sont mal anticipées car la grille de lecture n’est pas ou trop peu l’adéquation avec l’OM. Jugé non compatible avec l’entraîneur, qui aurait dû s’adapter, le meilleur buteur du club l’an dernier l’était pourtant parfaitement avec l’OM.« Je voudrais aussi éclaircir certains sujets et dire que pour ma part j’ai toujours voulu rester à Marseille. C’est ce que j’ai toujours souhaité mais cela ne dépendait pas que de moi, il faut toujours être deux pour se mettre d’accord. Cette fois, la direction technique a fait d’autres choix mais je les respecte. » clôturera le joueur fin août pour annoncer son départ. Perte de l’élément le plus décisif de l’équipe, perte de leadership, perte d’un lien d’identification avec les supporters, perte d’équilibre aussi. Compensation incertaine, coûteuse et qui prend du temps. Le premier mot qui revient à l’évocation du nom de Sanchez est le suivant : perte.
Autre preuve actuelle que l’OM poursuit dans cette stratégie éphémère, qui ne capitalise sur rien ? La vente de Lodi, 26 ans, six mois à peine après son arrivée, malgré qu’il n’avait pas encore atteint son top niveau, et qu’il avait encore beaucoup à apporter à l’OM. Lodi qui annonçait à la presse brésilienne pas plus tard qu’en novembre dernier «Je veux remplir mon contrat avec l’Olympique de Marseille jusqu’en 2028, je ne pense pas signer avec un autre club d’ici là». 10 mois au club pour Sanchez, 6 mois à peine pour Lodi. Deux départs évitables qui ne rendront pas le club plus riche (Sanchez est reparti libre à l’Inter Milan, 20% du transfert de Lodi iront à l’Atletico Madrid) ni plus fort, avec des venues effectuées pour compenser et non renforcer. « Mieux vaut un très bon joueur que trois bons joueurs » aimait répéter Didier Deschamps. Si seulement l’OM appliquait cette stratégie. Au passage, en utilisant la méthode de l’étude des précédents et de l’adéquation avec l’OM, le club aurait gardé un joueur comme Nuno Tavares (troisième meilleur buteur du club l’an dernier) qui rappelait beaucoup Taye Taiwo. Lui qui avait des forces, faiblesses et un potentiel similaires au même poste, avant de grandir et de finir champion de France avec l’OM. Il fera sans doute une carrière quelconque ailleurs, mais il aurait pu évoluer et réussir à l’OM. Je reviendrai sur cette question de l’adéquation des profils et de la stratégie un peu plus loin dans l’article.
L’entraîneur doit être en adéquation avec l’OM et non l’inverse
Autre facteur d’inadéquation avec l’OM, le choix des entraîneurs et la non définition d’une idée de jeu adaptée à l’OM. En à peine deux ans et demi l’OM est passé de la possession de Sampaoli à l’intensité de Tudor (compatible dans l’énergie dépensée par l’équipe mais discutable offensivement, avec une septième place au classement des attaques de L1. En deuxième et troisième meilleurs buteurs deux défenseurs, mbemba et tavares), puis au jeu de transition insipide de Marcelino. Trois styles diamétralement opposés, trop pour un seul club. « Je n’ai pas de philosophie de jeu » disait Pablo Longoria le 14/11/23. Des propos en nette contradiction avec ses paroles en juin dernier, après la démission de Tudor « Il y a des styles qui ne correspondent pas à Marseille. Ici, il doit y avoir un style qui permet de faire du Vélodrome une force et pas une faiblesse. On doit jouer d’une façon qui plaît à notre public qui est passionnel. Donc il faut un jeu offensif, un peu rock and roll« . Définir un style et des caractéristiques en amont, compatibles avec l’OM, et ne pas s’en écarter. Une solution que je préconisais déjà dans mon article « Imaginer l’OM de demain » juste après la saison pleine sous Sampaoli. Un style requis à l’OM aux antipodes du choix Marcelino, au schéma de jeu dépassé en 4-4-2, et aux idées de jeu au minimalisme affiché dès son arrivée (rappelons la volonté assumée en conférence de presse de laisser le jeu aux adversaires au Vélodrome et de jouer en transitions dès Panathinaikos-OM). S’en suivra un recrutement non basé sur une vision OM mais focalisé sur cet entraîneur et sa vision. « Par rapport aux joueurs qu’on a, on peut plutôt travailler sur les contre-attaques » constatait en héritage un Gattuso victime de cette stratégie, quelques mois seulement après son arrivée, le 03/12/23.
« Il y a une phrase de Benitez très célèbre en Espagne, qui date des années 2000 quand il était à Valence : « J’avais besoin d’un canapé, et ils m’ont acheté une lampe » rappelait Longoria en interview le 23/11/23 pour justifier cette stratégie. Ni Valence ni aucun club n’étant réellement comparables avec l’OM, l’analyse des précédents, depuis 20 ans à l’OM, démontre au contraire que les joueurs qui ont le mieux réussi sont ceux qui se sont adapté à l’OM, quelque soit l’entraîneur. Le départ de Marcelino au bout de quelques mois vient d’ailleurs détruire la logique citée par Pablo Longoria « Il faut construire l’effectif avec une idée du football très particulière, adaptée à la mentalité de l’entraîneur » et rappeler qu’il faut que ce recrutement soit d’abord adapté à la mentalité de l’OM et non à un entraîneur susceptible de partir à tout moment. Mettons enfin d’accord la vision de scout et de personnalité du football de Pablo Longoria avec la façon OM de voir les choses, qui est la vraie clé de la réussite du club. Les entraîneurs ont une durée de vie statistiquement moins élevée que les joueurs, encore plus à l’OM. La preuve ? En moins de quatre mois, l’OM a déjà connu quatre entraîneurs différents (Tudor, Marcelino, Abardonado, Gattuso). Le club a connu 19 entraîneurs en vingt ans. Il est donc impensable d’adapter principalement la stratégie de recrutement à l’entraîneur en place, sous peine de risquer comme cet été et en permanence une totale déstabilisation du club. « Si on pense qu’on a chassé tous nos soucis, on se trompe lourdement » rappelait à ce sujet Gattuso le 10/12/23.
La solution ? Comme je l’écris depuis des années, il est beaucoup plus simple pour le club d’inverser l’adaptation, en cherchant des entraîneurs d’abord compatibles avec l’OM. L’adaptation serait ainsi facilitée par les joueurs présents, qui auraient des caractéristiques qui répondent déjà aux exigences du club et donc à la leur. La preuve que cela fonctionne ? Tous les entraîneurs qui ont réussi à l’OM sur les 20 dernières années (Jean Fernandez, Gerets, Deschamps ou même Sampaoli) se sont adapté à l’effectif en place, puis l’ont bonifié à chaque ligne avec des transferts de leur choix. Cela a renforcé la cohésion, en même temps que la performance de l’équipe, tout en faisant gagner un temps d’adaptation précieux aux recrues et donc au club. D’autres entraîneurs se sont adapté à l’effectif sans aucune recrue de leur choix à leur arrivée (cas d’école Bielsa, lui qui l’été de son arrivée avait failli démissionné en se plaignant des « promesses non tenues de son président », ou encore de Villas Boas qui avec des moyens de recrutement très limités et un jeu minimaliste avait réussi à qualifier l’OM en C1). Comme je l’ai rappelé dès le départ, Gattuso a un caractère qui fait du bien à l’OM dans le contexte de son arrivée. Mais qu’en sera-t-il après sur la durée. A t’il le profil tactique et managérial pour faire progresser l’équipe et ses joueurs et s’imposer la saison prochaine, dans un autre rôle que celui de « pompier » ? Rien n’est moins sûr.
Un mercato en inadéquation avec l’OM et un lien d’identification brisé
« On prévoit une rotation de 40 à 50 % de l’effectif, c’est ma vision, c’est nécessaire pour un club comme Marseille. » disait Pablo Longoria le 05/06/23. Là aussi, un bref parallèle sur l’adaptabilité et donc l’efficacité ou non de cette stratégie à l’OM est nécessaire. À ce sujet, l’ex-entraîneur de l’OM Didier Deschamps rappelait lors de sa conférence de presse d’intronisation à l’OM, le 02/06/09 « de par mon expérience de joueur et d’entraîneur, je sais que, même après une bonne saison, il est important de renouveler 30% de l’effectif. » Moins revenait selon lui à le faire stagner, plus à le déséquilibrer. On parle ici de l’unique coach à avoir réussi à faire remporter des trophées à l’OM, cinq au total, depuis trente ans. « Sur la deuxième saison, il y avait pas mal d’instabilité…un nouvel effectif qui se transforme à chaque fois, donc il n’y avait pas de continuité » rappelait au sujet de la saison dernière Guendouzi le 11/11/23. Cinq nouveaux joueurs composaient le onze de départ de l’OM lors de Panathinaikos-OM. Il est impossible de dissocier la crise de septembre, la fragilité de l’équipe et les mauvais résultats d’une saison de l’OM démarrée très tôt, du turnover proportionnellement suicidaire au mercato et donc du manque de repères qu’il a entraîné.
L’absence non compensée de joueurs de caractère s’y ajoute, avec les départs en un seul mercato des Sanchez, Payet, Guendouzi, Ûnder ou même Kolasinac. Il va sans dire que l’impression d’une mauvaise stratégie se dégage, volontairement ou pas : remplacer les fortes personnalités, indispensables à l’OM, par des joueurs tièdes. « C’est des bons gars mais avec des bons gars on ne gagne pas des matchs. Le leadership, même si je n’aime pas ce mot, c’est quelque chose qui nous manque » constatait d’ailleurs à ce sujet Gattuso juste avant OM-Ajax, le 29/11/23. Point important, pas aidé par la saison sous Tudor, dont le jeu reléguait les créateurs au second rang, l’effectif de l’OM manque également cruellement de joueurs techniques, capables de faire basculer par leur talent les nombreux matchs fermés auxquels est confronté l’OM au cours d’une saison, sur une inspiration balle au pied, excepté Harit. C’est même déjà l’un des plus faibles du club en la matière depuis 20 ans. Le fait que Luis Henrique, revenu de prêt et à qui l’OM cherchait une porte de sortie, paraisse en deux matchs et quelques touches de balle être déjà l’un des plus doués de l’effectif sur ce plan rappelle la régression. Signe de ce dysfonctionnement dans le profil des joueurs recrutés, il est aussi anormal que la création et le danger reposent autant sur les épaules d’un Veretout dont faire la différence n’est pas le rôle premier. De là à dire que ce critère a disparu du recrutement de l’OM, il n’y a qu’un pas. Tout cela contribue à briser le lien d’identification des supporters à leur équipe, accélérant le risque désormais bien réel de désamour, qui précéde toujours à l’OM des crises plus profondes.
Il faut rappeler à ce sujet qu’appliquer à l’OM des recettes évidentes et des solutions plates n’a jamais marché. De Bouchet il y a 20 ans à Eyraud avant Longoria, les présidents qui ont échoué à transposer le monde normé de l’entreprise à l’OM peuvent en témoigner. Pour obtenir des résultats, il faut d’abord chercher l’adéquation des décisions avec l’OM, des composantes d’imagination et de prise de risques, de folie parfois, et au final d’alchimie avec le club et ses supporters. « Le football est inconcevable sans passion » rappelait Longoria dans le communiqué de l’OM annonçant son arrivée, le 26/07/20. Deux ans plus tard, il s’exclamait « C’est la magie de Marseille » sur la pelouse du Vélodrome lors d’OM-Strasbourg (38e journée de L1) qui qualifiait l’OM directement en C1, pour sa première saison complète réussie en tant que président du club. Une magie dont l’OM semble aujourd’hui malheureusement s’éloigner. Et une image qui paraît lointaine (et à la fois proche) principalement en raison de décisions inadaptées.
Une solution différente, qui a toujours marché à l’OM, est celle d’avoir un joueur au dessus du lot par ligne. Elle permet de d’abord donner à l’équipe une vraie colonne vertébrale. Puis de l’entourer par des joueurs fiables et prêts à aller au combat. Des exemples ? Quand l’OM finit champion en 2010, il a ligne par ligne Mandanda, Heinze, Lucho, Niang. Entourés par des Bonnart, Diawara, E.Cissé et autres Brandao. Volontairement ou non, cette stratégie se profilait il y a deux ans lors de la seconde place sous Sampaoli, avec en socle de l’équipe Pau Lopez (moins exposé par la possession de balle élevée de l’équipe) en gardien. Saliba en défense. Kamara au milieu. Gerson qui commençait à prendre ses marques. Payet à la création. Manquait un attaquant fort, puissant et mobile. Ce début de socle a totalement disparu la saison suivante. Pareil l’été dernier. Au passage, héritée de la présidence désastreuse d’Eyraud, la non-prolongation de Kamara permet de se demander si les investissements consentis à ce poste depuis n’auraient pas pu l’être sur lui. Quand l’OM ne capitalise pas sur ses forces vives et remplace prématurément ses grands espoirs depuis plus de 20 ans (derniers en date Anguissa et Kamara) ou des joueurs clés dans les résultats du club (de Drogba en passant par Nasri, Ribery, Niang, Lucho, Luiz Gustavo ou Gomis) leur succession et donc leur compensation est un échec sportif et financier. Une constante à laquelle Longoria n’échappe plus. Au passage, pourquoi, par exemple, hypothéquer l’OM sur le transfert de Correa, dont le profil et le manque d’envie sont clairement incompatibles avec l’OM ? Pourquoi ne pas avoir conditionné sa prolongation -automatique si le club se qualifie en C1- à des performances personnelles et non collectives ? Ou l’OM est-il à ce point sûr de ne pas se qualifier ? On en revient à la nécessité de mettre en adéquation les caractéristiques des recrues avec l’OM.
Le mercato d’hiver, anecdotique ailleurs, souvent déterminant à l’OM
« Le mercato d’hiver n’est pas un mercato que l’on aime » disait Pablo Longoria en conférence de presse le 11/01/24. L’OM fait une erreur stratégique en minimisant l’impact à l’OM des mercatos d’hiver sur les résultats de fin de saison. Ses conséquences sont notables dans l’histoire récente et ont un impact non pas « sur la courte période de la CAN », comme le disait le président de l’OM en interview, mais sur les fins de saison de l’OM et donc sur le club. De la saison 2005-2006 avec les arrivées déterminantes de Pagis et Maoulida, à 2008 2009 avec l’arrivée notable de Brandao, 2012-2013 avec le soldat Romao, 2019 2020 avec Balotelli, à 2020-2021 avec Milik et Lirola, l’OM a toujours recruté en hiver des joueurs qui lui ont permis de grimper au classement en fin de saison. Et le plus souvent (hormis Balotelli, recruté pour 6 mois) des joueurs qui l’ont aidé à gagner les saisons suivantes. Une analyse qui contredit la vision des choses exposée le 12/01 dernier « faire le recrutement pour un mois n’est pas une bonne solution« . Sous Longoria, pour sa première saison en tant que directeur du football, il faut d’ailleurs rappeler qu’il n’y aurait pas eu de cinquième place et de qualification en C3 sans les recrues hivernales Milik et Lirola. Pareil pour Bakambu et kolasinac en 2021 2022, utiles dans la 2ème place de fin de saison pour le premier et dans la 3ème place la saison suivante pour le second.
Au contraire, un mercato d’hiver raté peut coûter tres cher à l’OM. Si l’on analyse depuis la saison 2014 -2015 sous Bielsa, l’OM avait fini champion d’automne puis avait dégringolé au classement en seconde partie de saison, après n’avoir pas compensé les départs à la CAN de Nkoulou et de Ayew, ni renforcé l’équipe à ce moment là. La recrue de cet hiver-là Ocampos servira à l’OM quelques saisons plus tard, après plusieurs prêts, ce qui confirme la première partie de l’analyse. Cela coûtera aussi à l’OM une saison restée dans les mémoires (l’OM sera champion d’automne devant le PSG à la mi-saison, avec un jeu pratiqué cité en référence par Guardiola ou étudié par Zidane venu spécialement à la commanderie) avec une regrettée quatrième place à la fin. Pour ne pas remonter aussi loin, citons en exemple la saison 2022-2023 sous Tudor. Le mercato d’hiver sera là aussi raté, avec Ounahi et Vitinha qui n’apporteront rien à l’équipe en deuxième partie de saison. L’OM qui ambitionnait la seconde place puis la victoire en coupe de France échouera à la troisième place, sans aucun trophée. Deux échecs de recrutement qui poursuivent l’OM encore aujourd’hui, avec deux joueurs qui ont toujours du mal à se mettre au niveau de l’OM. L’OM poursuit dans cette stratégie cet hiver, qui est un non-sens historique, avec des recrues dont l’apport en cette deuxième partie de saison est très incertain.
Adéquation et ambition : gagner fait-il toujours partie du projet ?
« Dix-sept ans, c’est énorme. Je comprends une forme d’impatience, en tous cas la grande attente des supporters. Eric Gerets a fait du bon boulot. Malheureusement, ce qui reste c’est avant tout les titres. Il faut faire en sorte de changer quelque chose dans ce domaine » annonçait Didier Deschamps à son arrivée, avant de gagner 5 titres. « Mon rythme et mes objectifs ne sont pas les mêmes que celui des dirigeants. Il n’y a rien de mal à prétendre des choses différentes. L’important, c’est de rechercher l’excellence et de vouloir ce qu’il y a de mieux pour l’OM » disait Sampaoli pour annoncer son départ, le 01/07/22. Deuxième du classement de L1 et qualifié directement en C1 avec l’argentin, l’OM de Pablo Longoria a regressé à la troisième place, synonyme de barrages de C1 sous Tudor, puis connu cette saison une élimination au premier tour avec Marcelino. La régression est factuelle. Comme je le disais dans l’une de mes rares interviews le plus dur commençait au lendemain de la seconde place sous Sampaoli « qui dit période clé dit tournant à bien négocier pour le club, ce qui est très rarement le cas à l’OM après une saison aboutie. La régression arrive au contraire souvent en version accélérée« . Car à l’OM c’est au lendemain des succès que les erreurs adviennent. Imaginatif, attentif aux détails et créatif dès les débuts de la présidence de Longoria, ce qui avait valu à l’OM une vraie progression, le club a perdu en adéquation, en cohérence et en lucidité dans ses décisions. Et des conseillers, déjà partis sous d’autres cieux, n’ont jamais semblé capables de tenir compte de la nécessité d’une dynamique OM, qui se serve des spécificités du club. Pablo Longoria doit se rendre compte, depuis cette crise, du caractère fragile de son poste et donc de ce qu’il a souvent appelé son « aventure d’une vie » à l’OM. Cela doit le faire réfléchir et l’inciter à prendre plus de risques, en ouvrant la porte de l’ambition, tout en gardant en tête la nécessaire adéquation avec l’OM dans ses décisions. Pour tenir sa promesse de faire « rêver » mais aussi de « stabiliser l’OM dans le top 20 européen » comme il disait l’ambitionner dans son interview de présentation, en tant que directeur en charge du football, le 16/09/20. C’était déjà la pente à prendre progressivemenent après la seconde place sous Sampaoli. À l’OM, contrairement à d’autres clubs, il y a soit progression soit régression, la stagnation n’existe pas. Cela passe par une stratégie de recrutement et des joueurs recrutés adaptés à l’OM, ce qui permet une identification beaucoup plus forte des supporters à leur équipe, au choix crucial d’entraîneurs beaucoup plus adaptés à l’OM, et à des ambitions clairement affichées par ses dirigeants. L’histoire peut être grandiose et elle va maintenant très clairement dans le mauvais sens. Pablo, por favor escúchame por una vez.