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L’ombre de Mendes plane sur l’OM
Le super agent a mis un pied dans l’institution olympienne en plaçant son poulain, Gennaro Gattuso, à la tête de l’équipe.
L’influence envahissante du Portugais sur certains clubs, qu’il semble tenir dans sa main, inquiète les supporters.
Jorge Mendes. Voici treize mois, sous le soleil provençal, ils guettaient, salive au bord des lèvres,
sa houppette gominée. Ces doux rêveurs du peuple olympien, exaltés par quelques rumeurs farfelues,
l’auraient accueilli à bras ouverts… à condition que son (ex) glorieux poulain le file au train.
Un quintuple Ballon d’Or, l’un des plus grands joueurs de l’histoire sous le maillot ciel et blanc.
Pour Cristiano Ronaldo, alors en plein divorce avec Manchester United, l’on aurait signé à deux mains
un pacte avec le "diable".
De Jorge le messie à Mendes le "diable", "requin" ou "fossoyeur", surnoms dont il était affublé hier devant
La Commanderie ou sur les réseaux sociaux, il n’y a qu’une mèche blonde de CR7.
Ce ne sont pas les souvenirs d’un champion du monde retraité, ni la crinière aujourd’hui grisonnante et encore moins les échecs, clairsemés de rares succès, de Gennaro Gattuso, l’entraîneur, qui feront passer la pilule.
Jorge Mendes, son imprésario, a mis un pied à l’OM. Un ancien disque-jockey devenu l’un des agents les plus influents,
si ce n’est le plus important (et sulfureux) du monde.
Pour comprendre la crainte qu’inspire le Portugais aux fidèles marseillais, imaginez un joueur de Monopoly qui
adore placer toutes ses billes (entraîneur et joueurs) sur une poignée de rues savamment sélectionnées, plutôt
que se disperser aux quatre coins du plateau. Depuis ses premiers pas dans les coulisses du ballon rond, au milieu
des années 90, ce fils d’ouvrier en pétrochimie a tissé une toile monumentale sur la planète foot.
Jorge Mendes a fait du chemin depuis cette nuit arrosée dans son night-club de Caminha, soir de l’an 1996, soir d’une rencontre déterminante avec Nuno Espirito Santo, alors gardien du Vitoria Guimaraes.
Happé par l’odeur du blé, le Lisboète est piqué. Il monte sa société GestiFute, prend "Nuno" sous son aile et
l’envoie au Deportivo La Corogne.
Un coup d’essai, histoire de se faire la main. Deux décennies plus tard, Mendes est devenu un "agent de club".
Hier celui du Real, de l’Atlético, Monaco et Milan. Aujourd’hui celui de Valence, Wolverhampton voire Paris…
"Chacun y trouve son intérêt"
Suivant la place qu’on lui donne, il impose le système Mendes. À savoir multiplier
les transactions avec trois casquettes vissées sur la tête : celle du club vendeur, de l’acheteur et de la marchandi…,
pardon, du joueur transféré. Trois mandats, triple commission.
Jorge Mendes, dont la fortune est estimée à 100 millions d’euros et le catalogue tutoie le milliard (Ruben Dias,
Bernardo Silva, Darwin Nunez, Joao Felix, Joao Cancelo…), déguste. Les institutions, suivant les prestations offertes
(quand elles ne sont pas imposées), s’en accommodent… avec plus ou moins de plaisir.
Le PSG, au hasard. La capitale a été catapultée, via Luis Campos, dans la galaxie Mendes.
Ces deux dernières saisons, le Lusitanien a généreusement offert Ugarte (60 M), Gonçalo Ramos
(80 M), Bradley Barcola (45 M) et Vitinha (41,5 M), en l’échange de quelques petits services nommés Kang-in Lee
(22 M), Carlos Soler (18M), Fabian Ruiz (23M), Renato Sanches (15M), Cher Ndour (libre) et Marco Asensio (libre).
Malgré une poignée de coûteux désagr éments , l’A S Monaco , portée quelques saisons plus tôt par Fabinho,
Falcao et Bernardo Silva, a dû chaleureusement remercier Jorge Mendes, après son titre de champion de France
(2017). Moins Valence où morosité et instabilité règnent depuis que l’excentrique Peter Lim a officieusement délégué sa politique sportive au super agent.
Constat identique à Wolverhampton, sa plaque tournante britannique. Après des débuts prometteurs (retour en Premier League, qualification en Ligue Europa), une attractivité soudaine pour les valeurs sûres de l’écurie Mendes (Ruben Neves, Rui Patricio, Diogo Jota, Raul Jimenez…), les Wolves végètent dans les profondeurs du classement. "Si un club comme Wol-
verhampton suit Mendes, c’est qu’il a confiance en lui, qu’il lui rend service et que chacun trouve son intérêt", insiste
Ariedo Braida, l’ancien dirigeant milanais et barcelonais.
Sur Marseille, où il vient de réaliser son premier deal avec Pablo Longoria, l’ombre Jorge Mendes pointe à l’horizon. Elle se serait déjà rapprochée l’an passé, quand l’homme épinglé par les FootballLeaks (il aurait mis en place un système ’évasion fiscale pour nombre de ses protégés, "soustrayant au moins 185 millions d’euros de revenus de sponsoring aux administrations") aurait facilité le départ de Duje Caleta Car vers Southampton. Exfiltrer les indésirables, autre avantage d’un carnet d’adresses copieusement garni. L’Arabie Saoudite s’y est d’ailleurs taillé une place de choix, au fil des transactions orchestrées cet été (Fabinho, Neves, Jota, André Moreira, Nuno Espirito Santo). Une porte de sortie qui pourrait s’avérer utile au cas où l’OM désire se débarrasser d’encombrants trentenaires au salaire mirobolant.
Mendes les bons tuyaux… avec parcimonie. "Chacun doit faire son métier, prévient Braida. Gattuso l’entraîneur,
Mendes l’agent, Longoria le président."
Un équilibre à respecter pour tenir le loup loin de la bergerie.
La Provence
Tristan RAPAUD (avec L.F. et A.Jac.)