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Longoria en retrait, Marcelino sur le départ... retour sur 24 heures folles à l'OM
Au terme d'une journée totalement dingue, Longoria et les trois autres dirigeants ciblés par les groupes de supporters de l'OM ont décidé de se mettre en retrait, jusqu'à nouvel ordre, et ils ne seront pas à Amsterdam en Ligue Europa. L'avenir de Marcelino, lui, est en suspens.
L'OM a vécu une journée rare mardi, qui a commencé dans le flou le plus total et a terminé dans le brouillard le plus épais. À 22 h 30, un communiqué sur le site du club est revenu sur la réunion houleuse de la veille entre les sept groupes de supporters et l'état-major marseillais. À gauche, des leaders d'associations représentant près de 27 000 supporters dans les virages du Vélodrome et affichant un front uni. À droite, un quatuor, le président Pablo Longoria et son bras droit Javier Ribalta, le directeur administratif et financier Stéphane Tessier, le directeur général Pedro Iriondo. Au milieu, le détroit de Béring.
Traduction en langue de communicants : « À la suite de la réunion, des représentants des associations de supporters ont exprimé leur souhait de voir l'actuel directoire de l'OM démissionner. La menace d'une "guerre" (sic) à leur égard a été émise, tant qu'ils ne démissionneraient pas. » Le texte, notamment validé par Image 7, la boîte parisienne qui tâche de faire reluire en France la réputation de Frank McCourt, explique ensuite : « Le directoire de l'OM ne peut accepter les menaces personnelles. Ses membres ne peuvent tolérer des attaques individuelles et toute forme de diffamation publique infondées. Une relation basée sur l'intimidation ne peut garantir les conditions minimales acceptables pour que le directoire du club puisse continuer à s'investir pour la transformation de l'OM. » Le texte s'achève ainsi, sèchement.
Les « menaces » ont marqué les dirigeants
Le sous-titrage viendra d'une source autorisée à l'OM, qui détaille une sorte de droit de retrait activé par les quatre dirigeants visés par les groupes : « Ils ne seront pas à Amsterdam ce mercredi et prennent un temps de réflexion. » Et le coach Marcelino, qui a vécu lui aussi une journée mémorable, - on y reviendra -, va-t-il continuer sur le banc ? Partira-t-il avec le groupe ce matin aux Pays-Bas ? « On verra demain (mercredi), à chaque jour suffit sa peine », poursuit notre homme.
Interrogé pour la vingtième fois de la journée, le volubile Ribalta est dans une remarquable continuité : « Je ne peux pas parler, désolé. » Pendant une grande partie du jour, les dirigeants se sont réfugiés dans le bureau présidentiel, pour tenir une cellule de crise. Longoria enchaîne les clopes, il a fait passer le mot autour de lui : « Interdiction de l'appeler. »
En début d'après-midi, il a quand même eu au téléphone quelques personnes choisies et importantes. À l'une d'elles, il confie : « Ils m'ont menacé, c'est inadmissible. » Il a passé une nuit blanche, a songé à démissionner, dit qu'il va essayer de continuer. Il est marqué par le ton employé par les groupes, par leurs attaques sur sa réputation. « Je viens d'une famille des Asturies, et chez nous, on est intègres et durs comme la pierre », répète-t-il souvent quand il se sent agressé moralement.
Lundi soir, les groupes ne l'ont pas épargné, il n'a jamais pu en placer une. Après avoir ironisé sur son hygiène de vie, les supporters ont passé à la mitraille sa gestion du club, évoquant du copinage, des « magouilles », des changements incessants d'entraîneurs, de joueurs et de salariés pour mieux contrôler tous les secteurs du club.
Du centre de formation aux féminines, en passant par les transferts de l'équipe première, les groupes sont bien informés, ils ont des documents, peuvent sans doute s'appuyer sur les témoignages des nombreux salariés de l'OM écartés du club depuis l'arrivée à la présidence de Longoria, en février 2021.
Ils sont au courant de la lettre envoyée à McCourt par les élus du CSE, début juin, dénonçant un climat de travail très pesant au club. Cela avait d'ailleurs conduit à une réunion extraordinaire du CSE, le 20 juin, avec la présence à Marseille de l'avocat Olivier de Vilmorin, membre du conseil de surveillance. Barry Cohen, président de l'organe et bras droit de McCourt, avait assisté aux débats en visioconférence.
Mardi, le Bostonien a lui aussi utilisé son forfait Zoom extensible, et il a entendu les dirigeants raconter leur version de la réunion. « Vous quatre et votre coach de DH, si vous ne partez pas, vous verrez », a tonné un leader, alors que Rachid Zeroual, patron des South Winners, leur a donné quatre matches pour partir, jusqu'à la rencontre face au Havre, le 8 octobre. Quelques insultes ont fusé, notamment la très locale « con de tes morts ». Iriondo a dit craindre pour sa famille mais toutes les sources interrogées, aussi bien du côté des supporters que du club, affirment ne pas avoir entendu de menaces de mort.
Auprès du quotidien la Marseillaise, René Poutet, le président du Handifan club OM, pas vraiment les hooligans du coin, a clarifié le climat du rendez-vous : « Il n'y a eu aucune menace de mort envers Longoria ou à qui que ce soit, c'est n'importe quoi, il faut arrêter. Les menaces ? "Cassez-vous, partez, faites vos valises, on ne veut plus vous voir." » Les cyprès de la Commanderie, violentés le 31 janvier 2021 lors de la fameuse prise du centre d'entraînement, peuvent respirer.
Longoria s'est demandé s'il ne s'était pas trompé en choisissant Marcelino
Quant à Marcelino, à l'heure tardive où nous écrivions ces lignes, nous ne savions toujours pas s'il allait découvrir la Johan Cruyff Arena ce mercredi soir, pour un entraînement au clair de lune. Mardi, il a eu un comportement erratique, au point que Longoria l'a un temps coincé entre deux murs : « Tu ne peux pas me lâcher maintenant, quand même ! ? »
Le début de journée avait été lunaire. « C'était très calme, trop calme, j'aime pas beaucoup ça », nous a confié un joueur de l'OM hier midi, un cinéphile paraphrasant le personnage de Jamel Debbouze dans Astérix et Obélix : Mission Cléopâtre. Et puis, les retours du vestiaire ont défilé, circonstanciés. Avant la séance très légère de la matinée, Marcelino, visage triste, a réuni ses hommes sur la pelouse et a parlé de la passe d'armes entre la direction et les groupes, il a fait part d'un climat sulfureux à ses hommes, de menaces reçues. Il n'a alors pas mentionné Longoria. « On en reparlera plus tard », a-t-il complété avant de lancer les ateliers.
Deux de ses adjoints étaient présents à la réunion. Lundi, lors du décrassage, le technicien avait repoussé le débriefing (salé) du match contre Toulouse (0-0) au lendemain. Lors d'une conversation avec des membres de l'état-major, bien avant que les groupes de supporters n'arrivent à la réunion, il avait ainsi pesté contre la qualité de son effectif, lui trouvant de sacrés manques.
Dimanche soir, après le match contre Toulouse, c'était Longoria qui confiait son désarroi auprès de ses interlocuteurs : et si son ami de dix-sept ans, qui venait de trouver son logement, n'était pas l'homme de situation ? Et s'il s'était trompé lors de son choix de technicien cet été ? Son bras droit, Ribalta, était lui en retrait : en juin, après le départ d'Igor Tudor, il aurait préféré un entraîneur plus moderne comme Paulo Fonseca, et jugeait Marcelino bien trop proche de Pablo Longoria.
Marcelino ne serait pas dans l'avion pour Amsterdam
Mais revenons à ce mardi matin à la Commanderie, aussi mystérieux qu'ensoleillé. De débriefing d'OM-TFC, il n'y eut point. Auprès de plusieurs cadres du vestiaire, qui lui ont trouvé la mine totalement défaite, Marcelino a évoqué avoir dirigé sa dernière rencontre contre Toulouse. « Ultimo partido. » Qu'on vienne de Provence, du Forez ou de Navarre, l'expression semble limpide. « La santé, c'est trop important », a-t-il poursuivi.
Il a évoqué sa démission auprès de plusieurs salariés. Était-elle liée à l'avenir de Longoria ? Il n'a pas été plus en profondeur, lors de ses discussions individuelles. « Son discours était bizarre, c'était flou, on a tous compris qu'il se passait quelque chose », a assuré un joueur. « C'est chaud ce qu'il se passe, vraiment », a ajouté un autre, interloqué, évoquant un possible intérim de Jean-Pierre Papin sur le banc, prochainement.
« JPP », cela semble hautement improbable. Mais beaucoup de joueurs s'avéraient totalement perdus, certains échafaudaient des plans sur la comète, d'autres ont rigolé nerveusement, se demandant où ils avaient mis les pieds. Interrogée dès midi sur l'avenir de Marcelino, la direction n'a pas souhaité faire de commentaires.
« Je ne peux rien dire, désolé », a répondu pour la première fois Ribalta, sans infirmer, ni confirmer, et on a vite compris que c'était le thème de la journée. Plusieurs sources olympiennes ont évoqué, juste avant 13 heures, un communiqué imminent pour démentir la possible démission de Marcelino. Il n'est arrivé que dix heures plus tard, environ, et le nom du coach n'était même pas cité. La tendance est à un départ, il ne serait pas dans l'avion mercredi matin, mais à chaque jour suffit sa peine, comme dirait l'autre.