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LONGORIA Les raisons d’une révolution
Le remplacement du président de l’OM Jacques-Henri Eyraud par l’Espagnol, déjà au travail, a été acté dans l’urgence. Il reste enveloppé d’une couche de mystère. LONGORIA
Les raisons d’une révolution
DE NOTRE ENVOYé SPéCIAL PERMANENT
MATHIEU GRéGOIRE ( avec V. G.) MARSEILLE – Frank McCourt débarquera cette semaine à Marseille pour rencontrer les groupes de supporters, mais aussi les acteurs économiques et politiques. Cette visite digne d’un chef d’État a été précédée par l’exfiltration du président Jacques-Henri Eyraud, préalable à tout tapis rouge déroulé.
Le 30 janvier, après la prise de la Commanderie, « JHE » se sent encore solide, il enchaîne les prises de parole pour dénoncer les débordements. Il est soutenu publiquement par McCourt, le 31, et en coulisses, il s’est rapproché de Vincent Labrune, le président de la LFP, qui ne porte pas les associations dans son cœur après sa propre déchéance phocéenne, en 2016. Il travaille aussi sur le dossier Sampaoli, qu’il joint au téléphone, mais le sportif est secondaire.
Eyraud est obligé d’adopter une position ferme sur les supporters, McCourt ne tolère pas la dégradation du centre et l’image déplorable donnée de son club. Cela se traduit par les mises en demeure envoyées aux groupes, le 15 février. L’OM envisage de résilier la convention liant les deux parties, ce qui revient à les déloger du stade Vélodrome. Dans le même temps, pour adoucir ce mouvement, Eyraud, le directeur général Hugues Ouvrard, les agences de communication Image 7 et Stan France concoctent Agora, table ronde digitale pour réfléchir à un nouveau supportérisme.
Cette stratégie aux deux facettes sera un four. Les sorties des élus, le maire Benoît Payan (PS) comme la présidente de la métropole Martine Vassal (LR), font vaciller l’édifice. Eyraud se sait fragilisé, les déflagrations s’enchaînent (publication d’une tribune dans la Provence, conférence de presse des groupes de supporters...), les rumeurs de vente continuent de déstabiliser l’institution et une venue de McCourt à Marseille, la première depuis décembre 2019, apparaît indispensable.
“Pablo n’a pas savonné la planche d’Eyraud, celui-ci se l’était rendue suffisamment glissante
un proche de Longoria
Image 7 présente plusieurs scénarios à l’Américain, Eyraud se rend à l’évidence : si McCourt continue de le soutenir, son passage sera un chemin de croix. « McCourt s’entend toujours très bien avec Eyraud, confie un dirigeant aux premières loges. Mais pour apaiser la situation et faciliter également l’arrivée de Sampaoli, un changement était nécessaire. »
Pour une autre source proche du clan McCourt, « Eyraud était K.O., il attendait peut-être que quelqu’un appuie sur le bouton pour lui. La situation était inextricable. Il n’a pas toujours saisi le contexte local, il a géré le club comme une entreprise, sans tenir compte des supporters. Depuis six mois, il était moins audible et a commis plusieurs maladresses. » Vendredi, en toute fin d’après-midi, Eyraud a prévenu quelques cadres au club de son départ. Les autres salariés, les joueurs, le staff ont appris la nouvelle sur les réseaux sociaux.
Échangeant fréquemment avec le propriétaire, apprécié des supporters après un mercato hivernal dynamique, l’énergique directeur sportif, Pablo Longoria, apparaît comme une solution de secours. « Sa bonne cote en fait un homme providentiel pour calmer le truc, précise un proche de l’Espagnol. Pablo n’a pas savonné la planche d’Eyraud, celui-ci se l’était rendue suffisamment glissante. Il a observé pendant six mois son président, a vu ses erreurs, son aveuglement, parfois. » Longoria, qui a commencé à se renseigner sur les groupes de supporters, va vite montrer s’il marque une vraie rupture avec la période « JHE ». L’avenir proche au club de Thierry Aldebert, en charge de l’exploitation du stade, et d’Hugues Ouvrard, le DG business, deux fidèles d’Eyraud honnis par les responsables des associations, permettra de le mesurer.
Président du conseil de surveillance, Eyraud peut continuer à siéger dans les instances
Quant à « JHE », son nouveau champ d’action pose question, il sera sans doute précisé par McCourt à des interlocuteurs vigilants, la semaine prochaine. Son transfert au conseil de surveillance, en soi, ne changera pas la politique sportive et financière de l’OM, l’organe est utilisé par McCourt pour caser ses conseillers les plus fidèles plutôt que pour contrôler le club.
En revanche, si Eyraud reste dans les instances (LFP, commission des compétitions de l’UEFA), il n’aura fait que prendre ce « recul » qui lui est cher, gardant son influence sur les projets de McCourt. « Pour siéger à la LFP, il faut être titulaire d’un mandat du club, et en étant au conseil de surveillance, il est bien mandataire social », note un président de L1.
L'Equipe