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À Marseille, nouveau coup de balai
L'Équipe
20 octobre 2022
La valse des directeurs se poursuit à l’OM, où Pablo Longoria tranche dans le vif. Jacques Cardoze, le directeur la communication, et Alexandre Mialhe, le directeur juridique et secrétaire général, sont sur le départ. D’autres postes sont menacés. Mathieu grégoire (avec Vincent Garcia, MÉlisande Gomez et Baptiste Chaumier)
Tout va bien à l’OM sur le terrain, malgré une défaite face au Paris-SG dimanche (0-1). Le club phocéen reste placé (4e) en Ligue 1 et toujours en course pour une qualification en Ligue des champions. En interne, en revanche, Pablo Longoria a lancé de grandes manœuvres politiques et financières dans un contexte où son patron, Frank McCourt, lui a demandé de faire 19 M€ d’économies dans le secteur non sportif (voir L’Équipe du 21 septembre). Cette nouvelle a dégradé un climat déjà compliqué, entre luttes claniques et guéguerres intestines. Depuis plusieurs mois, l’ambiance est délétère, aux dires de nombreux témoins, chacun essaye de sauver sa place par tous les moyens et plusieurs cas présumés de harcèlement moral ont été dénoncés. Lors de la dernière réunion du CSE, le 21 septembre, une enquête sur la santé et les conditions de vie au travail, au sein du club, a été diligentée.
À cela s’ajoute un changement dans la chaîne de commandement, opéré au cours de l’été. Et l’organisation au quotidien peut en souffrir, comme lors du déplacement chaotique à Tottenham, avec deux avions affrétés à moitié vides, ou à l’image de la méprise de Pedro Iriondo, le manager général, qui s’est trompé de préfecture dans son courrier pour contester l’interdiction de déplacement des supporters à Nice, fin août. La saison dernière, le président travaillait en petit comité. Longoria reste très proche de son bras droit, Iriondo. Mais le cercle a changé autour de lui, avec les nombreuses arrivées ces derniers mois, notamment celles de l’omniprésent Stéphane Tessier, directeur général adjoint, de Marco Otero, directeur du centre de formation, ou encore de Javier Ribalta, directeur du football, dont le salaire (environ 600 000 € bruts annuels) a été pointé du doigt lors du CSE.
D’autres cadres dirigeants ont fait le chemin inverse comme Laurent Colette, l’ancien DG qui a ensuite géré l’exploitation du Vélodrome, ou Nathalie Nénon-Zimmermann, l’ex-directrice générale adjointe chargée du marketing et des revenus. Et pas toujours dans la bonne humeur : après la fin de saison dernière, Nénon-Zimmermann a rédigé une lettre de quatre pages à Longoria. Elle y dénonçait sa placardisation, déplorait une rétention d’informations de la part d’Iriondo et évoquait même une attitude discriminatoire. Elle s’était mise en arrêt maladie, avant un départ officialisé le 20 juin.
Jacques Cardoze et Alexandre Mialhe vers la sortie
Le grand ménage se poursuit en ce mois d’octobre. Le trio Longoria-Iriondo-Ribalta entend appliquer au secteur administratif la recette qui a marché cet été avec ses joueurs, quand Igor Tudor était contesté par une partie du groupe. À savoir, la manière forte. Jacques Cardoze, le directeur de la communication, et Alexandre Mialhe, son collègue du juridique, sont en train de l’expérimenter. Les prérogatives du premier, que le club n’avait pas hésité à mettre en première ligne la saison dernière à chaque incident, notamment lors de sa fameuse sortie médiatique et lyrique devant le siège de la LFP, le 8 décembre 2021, se sont réduites considérablement ces trois derniers mois.
Écarté des différents enjeux stratégiques, privé de la gestion du dossier des supporters, Cardoze paie sûrement sa trop grande liberté de parole et sa propension à donner son avis sur tous les sujets. En traînant des pieds pour faire la communication de Longoria sur le dossier Bamba Dieng cet été ou en rappelant à Iriondo, après les incidents contre Francfort le 13 septembre, que l’OM aurait dû faire des travaux pour sécuriser la tribune visiteurs du Vélodrome, il ne s’est pas fait que des amis ces dernières semaines. Mais les griefs retenus contre lui et qui pourraient lui coûter cher apparaissent beaucoup plus futiles.
Le 7 octobre, Cardoze a reçu un courrier de la responsable des ressources humaines, lui signifiant un rendez-vous préalable à une sanction, le 27 octobre. Les motifs ? Énervement dans les couloirs du Vélodrome lors de l’arrivée tardive des Portugais du Sporting en Ligue des champions, le 4 octobre. Et chant anti-parisien connu par les supporters de l’OM dans les bureaux de la Commanderie. Depuis qu’il a reçu ce courrier la veille de la défaite contre l’AC Ajaccio (1-2), le dir’com’est en arrêt maladie et vit très mal la situation.
Alexandre Mialhe, le directeur juridique et secrétaire général, s’était lui aussi mis en arrêt maladie courant juin. Formé par Julien Fournier à la fin des années 2000, promu sous Vincent Labrune et conforté sous Jacques-Henri Eyraud, il avait survécu à tous les changements de régime.
Entre Longoria et lui, le courant est passé jusqu’à l’arrivée de Tessier, début 2022. Mialhe s’est toujours considéré comme un garde-fou sur les mercatos de l’Espagnol, notamment sur la délicate question des agents. Tessier puis Ribalta ont voulu revoir ce fonctionnement. L’interdiction de recrutement par la FIFA dans le dossier Pape Gueye (*) est tombée à point pour les détracteurs de Mialhe. Visiblement à la recherche d’un coupable à offrir à McCourt, Longoria a fait de son directeur juridique le principal responsable de cette situation. Mialhe a validé l’arrivée du joueur en juin 2020, avant de laisser le dossier à des avocats spécialisés dans les litiges au niveau des instances internationales. Aujourd’hui, les deux parties cherchent une porte de sortie et négocient des indemnités de départ.
Élodie Malatrait et David Friio sur la sellette
D’autres salariés sont dans le viseur de l’état-major, via son bras armé sur le terrain, le directeur des opérations football arrivé cet été, Evgeny Koshelev. Intime de Ribalta, l’Ukrainien surveille tous les faits et gestes des Français gravitant autour du staff. À commencer par ceux de l’inamovible Élodie Malatrait, la directrice adjointe de la communication et responsable du protocole, au club depuis dix-sept ans, et qui cumule les promotions depuis une décennie. Dans un climat de chasse à la taupe, où les fuites dans la presse sont observées à la loupe, Ribalta lui reproche surtout sa trop grande proximité avec le groupe pro. Lors du stage estival en Angleterre, fin juillet, Malatrait faisait le lien entre les joueurs et la direction, au sujet du mal-être de certains par rapport aux méthodes de Tudor. Parallèlement, elle avait Jorge Sampaoli au téléphone, avec lequel elle a pu discuter d’un éventuel et improbable retour.
Mise sous pression par certains joueurs qui voulaient voir revenir l’Argentin, son double jeu vis-à-vis du Croate n’est pas passé inaperçu en haut lieu. Où on s’est encore étonné d’un déplacement récent de Véronique Lopez (conciergerie) et Cécilia Barontini (DRH), deux proches de Malatrait : le week-end dernier, celui du Classique, elles étaient invitées par Sampaoli à Majorque. Face à Rennes (1-1, 18 septembre), Malatrait a été écartée de vestiaire au Vélodrome et du couloir y menant. Réintégrée depuis, elle se sent menacée et fait tout pour sauver sa place.
David Friio, le directeur sportif, a du souci à se faire, lui aussi. Lors de la défaite des jeunes de l’OM en Youth League contre le Sporting (0-6, 4 octobre), Longoria, très en colère, a quitté la tribune avant la fin du match et crié dans les couloirs de l’OM Campus. Une pierre de plus dans le jardin de Friio. L’ancien scout de Manchester United peine à trouver sa place dans l’organigramme. Sampaoli ne voulait pas en entendre parler la saison dernière, pas plus qu’Otero, le responsable actuel du centre. Difficile pour lui de travailler dans de bonnes conditions alors qu’il a été écarté de presque tous les sujets au dernier mercato et qu’il a fini par perdre le dossier Bamba Dieng en septembre, récupéré par Ribalta.
Contacté dans la soirée, Pablo Longoria dément un prochain débarquement de David Friio, sans s’étendre sur les autres sujets.
(*) Une décision frappée d’un recours suspensif. Le Tribunal arbitral du sport se penchera les 15 et 16 février prochains dans le fond sur le transfert avorté du milieu sénégalais à Watford. Il avait signé libre à l’OM à l’été 2020.
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