Est-ce le plus grand défi de votre carrière que d'être président d'un club aussi historique et avec des supporters aussi passionnés que l'Olympique de Marseille ? On le voit habituellement dans les matchs de foot souffrir beaucoup dans les box et vivre le foot avec une passion démesurée.
Pour moi, c'est une grande opportunité, c'est quelque chose que j'apprécie chaque jour davantage. Je me sens très bien en ce moment. Je le prends comme une belle opportunité pour développer un projet. Et, bien sûr, développer un projet dans une équipe aussi passionnée est beau à cause de toutes les émotions qui existent à Marseille. Pour un passionné, vivre ces émotions est quelque chose d'unique.
Tu as 36 ans, tu as passé par des équipes comme la Juventus, Sassuolo ou Valence, maintenant tu es président de Marseille... Tu n'as pas conscience de ce que tu as accompli étant si jeune ou est-ce secondaire pour toi ?
Pour moi c'est secondaire. Mon quotidien est basé sur la construction d'un projet qui revient aux fondamentaux du football. Mettre le football au centre est la chose la plus importante pour moi. Cette jeunesse et peut-être le fait d'avoir fait une carrière si vite est ce qui me fait apprécier et avoir le recul nécessaire pour que le projet revienne aux origines de pourquoi nous aimons le football.
PSG-Marseille est-il le match le plus important du football français et l'un des plus attractifs du football européen ?
Depuis lors. A chaque fois qu'il regardait des matchs de Ligue 1, il plaçait PSG-Marseille comme le match de référence du football français. Et, bien sûr, c'est l'un des plus grands matchs du football européen. Tout fan de football aime regarder des matchs de rivalité et de grandes équipes. C'est le jeu avec le plus de passion. Pour quelqu'un qui est proche de l'ambiance de l'Olympique de Marseille, c'est quelque chose d'unique pour les supporters.
En à peine un an et demi, il a dû se remettre de lourdes pertes, il a dû constituer deux équipes en un temps record (Saison 2021-2022 et 2022-2023) et, en plus, l'été Sampaoli est parti le jour deux de la pré-saison. Est-ce difficile de rassembler une équipe en si peu de temps ? Comment lui vient-il de signer Tudor juste au moment du départ de l'Argentin ?
Le plus difficile dans le football, c'est de faire un marché. C'est toujours un risque de changer de personnel. C'est compliqué, voire impossible, de toujours avoir les bons joueurs et de les amener à s'adapter au groupe. C'est plus facile à chaque fois qu'on va sur des profils de joueurs en pensant à une idée de construction collective. Concernant Tudor, nous ne comptions pas sur le départ de Sampaoli. L'idée était de muter vers un football plus physique la saison prochaine. Nous avons anticipé un an. L'arrivée de Ribalta a été fondamentale. Javier était quelqu'un qui croyait beaucoup à cette idée du football dans lequel on voulait évoluer.
Ribalta m'a dit que le modèle à suivre était de regarder l'Atalante...
Oui, l'Atalanta est une référence. Je pense que la distance économique qui existe entre de nombreuses équipes européennes et notre réalité, le moyen de réduire la distance est de jouer un football vertical, attractif qui cherche à s'en rapprocher.
Quelle est votre méthode de travail lorsqu'il s'agit de détecter qu'un joueur, et pas un autre en raison de certaines caractéristiques, correspond à l'idée de jeu de l'équipe ?
Il y a deux facteurs importants. L'essentiel est d'avoir une équipe. La seconde est de penser le football comme une identité collective et non individuelle. Identifiez-vous avec l'entraîneur, essayez d'entrer le plus vite possible dans sa tête pour comprendre comment un joueur peut s'adapter au groupe et s'il a les bonnes caractéristiques pour le style de l'entraîneur. Associez-les également sur le plan technique et psychologique. Bref, imaginez sur papier comment vous pouvez vous intégrer au coach pour former une équipe.
L'équipe est 3e, compte trois points de retard sur le PSG après dix matchs et, de plus, est toujours en vie en Ligue des champions. S'ils gagnent au Parc des Princes, vont-ils croire qu'ils peuvent vraiment combattre la Ligue 1 contre le PSG ?
Nous avons toujours eu deux objectifs. La première consiste à être une équipe sérieuse et compétitive qui pourrait être à la hauteur de la compétition de manière sérieuse. En Ligue des champions, c'était l'objectif principal. La seconde est de pratiquer une idée très spécifique et d'auteur telle que Tudor, de faire des marques individuelles et d'être une équipe physique et compétitive. Ce concept de jeu nous conduira au résultat. Essayez de jouer match par match avec un haut degré de compétitivité.
Dans une interview à El País, vous disiez que la formation des joueurs français ressemblait à celle de la NBA sur le plan humain. Que voulait-il dire exactement par cette déclaration ?
Il y a deux choses qui sont essentielles ici. Pour moi, d'une part, il faut mettre en avant le grand nombre de talents qui existent dans le football français. Cela signifie que c'est l'un des pays avec la plus grande production de joueurs de football. Cela se produit parce que ce sont des joueurs qui, individuellement, apprécient le jeu. Et au sein de la NBA, en faisant cette analogie avec le football français, c'est une formation qui, pour moi qui ai travaillé en Italie, est choquante, car la formation des joueurs est beaucoup plus analytique que dans le reste de l'Europe.
Vous m'avez dit lors d'une conférence que vous vouliez un club géré "à l'espagnole", c'est-à-dire sans dépendre excessivement de capitaux extérieurs. Pensez-vous qu'un modèle de club sain est la voie la plus viable pour la croissance des clubs français ? Le PSG, bien sûr, est hors norme.
Pour moi, il faut jouer au foot avec les moyens dont on dispose. C'est la clé. C'est essayer de faire au mieux avec les moyens dont on dispose au club, avec le soutien des propriétaires bien sûr. Je crois beaucoup aux règles économiques pour qu'elles soient établies dans les championnats. C'est pourquoi je dis espagnol. Le football doit se faire avec une rationalité économique. Je suis un grand partisan du modèle économique appliqué en Espagne. Je pense que c'est l'avenir de tous les championnats.
En France, on dit que vous avez prôné une réforme de la DNCG, l'organisme financier des clubs français, pour éviter des catastrophes économiques. Le journal L'Équipe, en mars, rapportait qu'à partir de janvier les clubs ne devaient pas dépenser plus de 70 % de leur masse salariale. Avez-vous reçu des nouvelles à ce sujet?
Non, nous n'avons rien reçu. Ce s'il est bon de le concrétiser. Nous avons maintenant une excellente relation avec la DNCG, l'institution financière. Nous croyons au contrôle économique des championnats. On s'est même rencontré à Marseille, on a discuté, on essaie d'être proactifs sur certains aspects... Ce ratio que tu évoques existe pour beaucoup de clubs. Il n'existe pas seulement d'allouer 70% en masse salariale. Il y a aussi les commissions aux agents, les salaires... Au fur et à mesure que vous réalisez des plus-values, appliquez non seulement les plus-values une saison, mais faites-le en trois. En championnat, je pense que c'est une formule de gestion économique qui va grandement profiter au football français.
Pensez-vous que le football français est sous-estimé ? Parce que?
Je pense que le football français n'est pas reconnu pour sa grandeur. Quand je suis arrivé, j'ai été surpris par le niveau du championnat. Je pense que ce n'est pas à la puissance que la France est au niveau économique. Je pense qu'il a beaucoup de marge de progression. Je pense qu'à travers des gens comme vous, on pourrait raconter plus d'histoires dans ce football. Le derby du Nord, Lorient, Rennes-Nantes, un derby avec beaucoup de rivalité... Le niveau du football dans le championnat est quelque chose qui doit atteindre le spectateur du football pour en faire un championnat plus attractif.
L'avant-dernier. Que peut faire la Ligue 1 pour se rapprocher du top 4 européen et éviter que la plus belle des promesses ne sorte chaque saison car elle ne considère pas le championnat suffisamment compétitif pour s'y installer cinq ans ?
C'est le cercle négatif du football français. Un modèle économique basé sur la vente de joueurs. Un championnat, pour grandir, doit reposer sur la rétention des meilleurs talents. Pour y arriver, nous devons travailler à améliorer notre contrat de télévision nationale. Après, après avoir créé la concurrence et exploité le produit qu'on a bien mieux, qui est de qualité, il faut aller à l'international, là où on peut gagner beaucoup d'argent et c'est un contrat attractif. Et cette augmentation des droits de télévision, je pense que cela va faire en sorte que la rétention des talents soit beaucoup plus élevée. La marge de progression, en termes de télévision, est très grande. Par exemple, de nombreux pays se demandent comment maximiser les droits une fois qu'ils ont atteint le plafond. En France nous sommes encore loin de notre plafond d'exploitation des droits. Cela entraînerait la rétention des talents nationaux.
Le dernier, une prévision pour dimanche ?
Sortir sur le terrain, être compétitif, jouer un match très sérieux comme nous l'avons fait à Lisbonne... Je vois les joueurs de l'Olympique de Marseille très motivés et désireux de jouer un match très sérieux comme nous l'avons fait la semaine dernière contre le Sporting.