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Rachat de l'OM: Mourad Boudjellal est-il crédible?
L'annonce de l'ex-patron de Toulon concernant le projet de rachat de l'OM suscite questions et scepticisme.
Depuis vendredi et la confirmation par Mourad Boudjellal d'être « porteur d'un projet de rachat de l'Olympique de Marseille », les interrogations demeurent puisque l'ex-président du Rugby Club Toulonnais n'a pas dévoilé le nom des potentiels investisseurs. Il a simplement précisé qu'il s'agissait de sociétés du Moyen-Orient (dont une entreprise d'État) et qu'elles étaient amenées par un homme d'affaires franco-tunisien de premier plan. Il a étayé son propos en assurant qu'une offre de rachat serait transmise au propriétaire de l'OM, Frank McCourt, en début de semaine, par « une banque d'affaires privées de dimension internationale », là encore sans en donner le nom.
Beaucoup de mystères donc, et un timing qui surprend. Pourquoi Mourad Boudjellal s'est-il dévoilé vendredi, alors qu'il s'était enfin mis d'accord avec Claude Joye, le président du Sporting Toulon (National 2), pour prendre la tête du club varois après de multiples rebondissements ? Les deux hommes devaient d'ailleurs signer officiellement leur accord dans l'après-midi. Ce qui a été fait, mais avec une clause suspensive (Boudjellal s'engagera avec le Sporting si son projet de rachat de l'OM échoue).
Avant d'en arriver là, certains se posent une autre question : ce projet de rachat existe-t-il vraiment ? « Bidon et ridicule », entend-on chez certains. « Tout pour le buzz » pour d'autres. Beaucoup ne comprennent pas pourquoi l'annonce a été faite en grande pompe. Plusieurs encore y voient un subterfuge pour faire plier Claude Joye. D'autant que la conférence de presse improvisée dans les locaux du Sporting pour annoncer un projet de rachat de Marseille, club ennemi, paraît totalement surréaliste.
Stars mondiales, « Grandes Gueules » et « saucisses »
Le scepticisme est de mise et la crédibilité de Mourad Boudjellal fortement engagée. Il a été jusqu'à mouiller Emmanuel Macron : « Le cabinet du président de la République m'a appelé pour avoir plus de détails. J'ai donné l'identité des investisseurs au Président. Emmanuel Macron est très attentif au projet de l'OM. » Rappelons qu'en mai 2017, Boudjellal avait ouvert un meeting du candidat à la présidentielle.
Cette façon de faire colle parfaitement au personnage. Adepte des annonces qui font les gros titres, Boudjellal en a fait une de ses marques de fabrique lors de son passage dans le rugby (2006-2019). À son arrivée à la tête du RCT, il ne connaissait pas le milieu. L'ex-éditeur a vite imposé sa patte en recrutant à prix d'or des stars mondiales, alors même que le club était encore en Pro D2 (Umaga). Puis en Top 14, il a passé la vitesse supérieure (Wilkinson, Giteau, Habana, Botha, Sonny Bill Williams, Bastareaud et bien d'autres) « pour s'acheter une crédibilité dans le rugby » ,dixit l'intéressé (2008).
Si on devait tenter une comparaison avec le monde du football actuel, c'est un peu comme s'il avait attiré les Ronaldo, Agüero, Hazard, Van Djik, De Bruyne ou encore Griezmann dans la même équipe. Il a aussi réussi à faire sortir Bernard Laporte de sa retraite de coach (2011). Résultat : il a hissé le RCT au sommet du rugby avec un triplé historique en Coupe d'Europe (2013, 2014 et 2015) et un titre de champion de France (2014).
Mais ce grand communicant, qui intervient régulièrement sur l'antenne de RMC dans les Grandes Gueules, un titre qui lui colle parfaitement, reconnaît lui-même balancer parfois quelques « saucisses ». Cela fait aussi partie de son personnage et de sa légende.
Comme en janvier 2016, quand il assure avoir envoyé une lettre à la Ligue anglaise demandant l'intégration du RCT, alors en guerre avec la Ligue nationale de rugby. Boudjellal est aussi pris par la patrouille quand il romance grossièrement les dernières minutes de la finale de la Coupe d'Europe 2013 (victoire 16-15 contre Clermont), assurant avoir quitté le stade et vécu les dernières minutes dans un taxi qui tournait autour du stade de Dublin.
Mais dans le cas du projet de rachat de l'OM, difficile d'imaginer Boudjellal tenter un coup de bluff. Ce dernier, qui évoque ce projet depuis des semaines avec son entourage proche, comprend la méfiance autour de son annonce : « Même moi, j'ai du mal à le croire. Mais il ne s'agit pas de buzz. Je serais inconscient de jouer à ça. Je laisse la banque d'affaires crédibiliser mes annonces en début de semaine avec l'offre d'achat. Et si l'Élysée m'a appelé pour prendre des infos, c'est que c'est du sérieux », assenait-il dans notre édition de vendredi.
Pourtant, si l'Élysée confirme bien le coup de fil, il s'agissait plutôt d'une démarche assez classique dans le cadre de rachat de grands clubs français. Pas le signe en tout cas de l'implication d'Emmanuel Macron dans le processus. « Si c'est bidon, il va passer pour un clown et perdre toute crédibilité », glisse un connaisseur du milieu.
Depuis son départ du RCT, Mourad Boudjellal (60 ans) n'a jamais caché son désir d'intégrer le monde du football. Est-ce que ce sera à l'OM, par la grande porte ? À Toulon, par une plus petite ? Ou nulle part, si sa crédibilité était entachée par ce projet de rachat.
