Information
ANDRÉ VILLAS-BOAS; "Un très beau défi"; Passionnant et passionné, l'entraîneur de l'OMévoque ses ambitions : podium et beau jeu
Cinq matches sur le banc de l'OM et déjà un trophée ?
Ahahahah ! C'est seulement bon pour la confiance des gars. Malheureusement, ce n'est pas à la hauteur de l'histoire de l'OM. Nous n'en sommes qu'à la pré-saison, où l'objectif reste physique et tactique. Mais ça conclut la tournée américaine sur un bon feeling, le match contre DC United ayant été plus destiné aux jeunes joueurs.
C'est anecdotique, mais c'est bon pour le groupe de partager la joie ?
Oui, oui, partager un bon feeling, avec une médaille. Si la Ligue continue ce tournoi, c'est bien que l'OM ait été le premier au palmarès.
Pour vous, retrouver le banc, l'action, l'adrénaline, c'est un grand plaisir ?
C'est ce qui m'a manqué le plus, avec les émotions attachées à la victoire, la défaite, les nuits blanches, les pensées. L'entraîneur dort toujours avec ses pensées. Pendant un an et demi elles étaient absentes, elles sont de retour. Quand tu as une idée de jeu, le plus gratifiant pour un entraîneur, c'est de voir l'évolution des joueurs, des idées, du collectif.
Vous avez une belle carte de visite, les joueurs vous respectaient à votre arrivée, mais ce succès aide déjà à valider la méthode de travail auprès d'eux ?
Je pense que oui. À chaque match, il faut valider ta méthode, ton autorité, ça fonctionne ainsi. Les défaites sont toujours un test pour les joueurs et le leader, non pas pour attribuer les responsabilités de l'échec, mais pour comprendre. Nous avons un très beau défi cette saison, il ne restera qu'un match amical en rentrant, je suis content des progrès enregistrés. On verra contre Naples où nous en sommes.
Les progrès physiques en une semaine sautent aux yeux...
Oui, je pense que la plus grande différence a été le match contre Saint-Étienne, parce que nous n'avions que deux jours de récupération, avec un entraînement physique, malgré la chaleur et la quantité de travail.
Habituellement, on travaille peut-être un peu trop et il faut faire attention. En comparaison avec les autres pré-saisons faites avec mon staff, nous sommes un peu en dessous. Je vous explique pourquoi : la troisième semaine, on fait toujours une double séance quotidienne ; ici, à cause de la chaleur, du décalage horaire et de la charge des matches, on a essayé de ne faire qu'une séance, en récupérant pour les matches.
Nous reprendrons le rythme à Marseille afin de gagner un peu de volume.
C'est pour ça que vous avez fait annuler le match amical du 30 juillet ?
Oui, je veux plus de temps pour mettre les choses en place. Sur l'aspect offensif, on joue bien avec le ballon. On doit être un peu plus incisif, mais on crée bien le jeu sur les deux côtés, on doit le faire aussi dans l'axe.
Il faut aussi un peu d'organisation défensive, le contrôle de la profondeur, la pression active. Je veux donc avoir une semaine de travail tranquille à Marseille pour tester notre jeu contre Naples.
Alors, justement quelle est cette méthode ? Tout se fait avec le ballon à l'entraînement, même le travail physique ?
Oui. On essaie de mettre en place des exercices qui proposent toutes les caractéristiques du jeu : physique, technique, psychologique, tactique, en même temps. Ce qui se passe dans le jeu. On ne regarde pas l'aspect physique de façon analytique, sauf quand le GPS nous indique qu'on n'est pas arrivé à l'objectif physique recherché. On peut donc faire un travail isolé. On s'adapte aussi au poste : un arrière central fait moins de courses à haute intensité qu'un latéral.
On appelle cela la méthode intégrée au Portugal, en Espagne, mais aussi en Angleterre, un peu en Allemagne, moins en France ou en Italie où le physique est spécifique. Toutes les méthodes sont bonnes quand on a les résultats à la fin. Mais évidemment, les joueurs préfèrent toucher le ballon.
C'était bien, pour vous, de pouvoir commencer la préparation à l'étranger, pour avoir les joueurs avec vous tout le temps et mieux les connaître ?
Ici, les conditions ont été difficiles, pour la chaleur, l'humidité, la pelouse, mais il était important d'exporter le nom de l'OM aux États-Unis, le pays de notre propriétaire. Ce n'était pas la préparation parfaite pour un entraîneur, les conditions idéales sont celles que nous avions en Angleterre, à Saint George's ou en Autriche ou en Suisse.
J'ai été mal habitué au Zénit Saint-Petersbourg où les choix étaient toujours uniquement sportifs et pas commerciaux. Mais c'était une exception, la règle, c'est que toutes les équipes du monde vont en Australie, au Japon, en Chine, aux États-Unis. On s'est adapté et on travaillera plus à Marseille.
Vous allez reprendre à La Commanderie. Elle vous convient pour travailler ?
Oui. On fera peut-être un peu de changement dans le bâtiment, mais rien de spécial. À la fin, chaque entraîneur laisse un peu de sa méthode. On a encore des choses apportées par Bielsa ou par Rudi. Quand je partirai, je laisserai autre chose, c'est l'évolution.
Vous avez dit en arrivant, que vos expériences passées, notamment en Angleterre, vous avaient appris à vous adapter, à ne pas vouloir toujours imposer. Il y a une grande différence entre l'entraîneur que vous étiez à vos débuts et celui d'aujourd'hui ?
C'est une évolution naturelle qui vient avec l'expérience. L'entraîneur qui vous parle aujourd'hui a dix ans d'expérience au haut niveau, il est différent de celui que j'étais à Porto ou à Chelsea, à Tottenham, au Zénit. Je rencontre la culture française, qu'il faut respecter. C'est l'évolution de l'homo sapiens (rires)...
Et quelle est la particularité française ?
Le physique, la vélocité. L'imprévisibilité, par opposition à l'organisation, la surprise. En Ligue 1, j'ai toujours remarqué la puissance, la force. Les entraîneurs qui réussissent à conserver cela, mais en mettant en place une organisation, sont ceux qui à la fin, bâtissent une grande équipe et c'est ce que je veux essayer.
L'OM est construit sur l'aspect technique, par la qualité de ses joueurs. Et c'est pourquoi, je tends vers la possession, le contrôle du ballon, le jeu, les combinaisons, les triangles. Nous n'avons pas beaucoup de temps...
Vous avez été un "enfant prodige" comme entraîneur, victorieux dès votre deuxième saison. Et ensuite, vous avez connu aussi la défaite. On apprend plus de l'échec ?
Bien sûr. On apprend plus de l'échec. Avec Porto, nous avions perdu 6 matches sur 56, gagné quatre trophées, l'équipe respirait la confiance et les adversaires la crainte.
À Chelsea, on a appris la capacité à rebondir, à prendre des décisions après les défaites, ça a été très riche. L'échec vous nourrit.
Pendant votre période de 18 mois sans entraîner vous avez observé, appris des choses pour évoluer dans votre travail ?
Non. Pas du tout. J'ai profité. J'ai fait ce qu'on ne peut pas faire quand on est dans le foot, occupé 24 heures sur 24. Là, j'ai disputé le Dakar, des rallyes au Portugal, le rallye du Maroc.
Le foot, je l'ai regardé à la télé, j'ai été invité par la fédération néerlandaise pour parler avec ses entraîneurs, en Écosse, au Web Summit de Lisbonne, une conférence digitale où était aussi intervenu Jacques-Henri (Eyraud, le président). Mais pas d'observation d'entraînements.
La Provence