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Pour l'OM, l'heure est grave
Éliminé de la Ligue Europa et de la Coupe de la Ligue, l'OM, distancé en Championnat, coule dans une atmosphère morose. Un sursaut à Angers devient impératif.
C'est une oeuvre collective, un travail d'orfèvre, du président au directeur sportif, tous deux très discrets dans la tempête, en passant par un entraîneur à court de solutions et des joueurs qui se regardent du coin de l'oeil. En un peu plus de six mois, l'Olympique de Marseille, finaliste de la Ligue Europa et quatrième de Ligue 1 la saison dernière, a réussi à tout dilapider, le capital sympathie et le reste, avec une conscience professionnelle dans l'erreur qui force le respect. Le public ne suit plus, la Ligue des champions s'éloigne, ce qui serait une catastrophe industrielle, le spectacle proposé est affligeant, et voilà que tout ce petit monde se trouve au pied du mur, à Angers, ce samedi soir.
Les Marseillais, à cinq points du podium avec deux matches en retard, n'ont plus joué en L 1 depuis le 5 décembre et une défaite à Nantes (2-3). Et vu ce qu'ils ont montré mercredi à domicile contre Strasbourg en Coupe de la Ligue (1-1, 2-4 aux t.a.b.), on se dit que c'est peut-être mieux comme ça. Que se passera-t-il en cas de nouvelle désillusion face au SCO aujourd'hui ? La dinde aura un goût amer à Noël, c'est sûr, et la situation de Rudi Garcia sera plus fragile que jamais. L'entraîneur marseillais, qui a prolongé jusqu'en 2021 en octobre, comme son staff récemment, est plus isolé que jamais. Un licenciement se chiffrerait à plus de 12 M € sans compter le désaveu terrible qu'il constituerait pour Jacques-Henri Eyraud.
Le président olympien, qui a pris seul les pleins pouvoirs en devenant l'unique référent de l'actionnaire, joue gros pour sa crédibilité lui aussi. Revenu des États-Unis, où il a pu s'entretenir avec le propriétaire, Frank McCourt, il n'envisagerait pas encore de solutions radicales. En interne pourtant, l'ambiance est très morose en attendant un mercato incertain, où il faudra absolument trouver un avant-centre digne de ce nom. « Je n'ai jamais été aussi nul », a confié en privé Steve Mandanda.
Le gardien est lucide mais on peut le réconforter, il n'est pas le seul. Où sont les cadres ? Où est Dimitri Payet ? Adil Rami ? À quoi sert Kevin Strootman ? Face à Strasbourg, c'est le gamin Maxime Lopez, vingt et un ans, qui a été le plus entreprenant. À Angers, Florian Thauvin, suspendu mercredi, fera son retour. L'ailier, sur son talent, peut sortir l'OM de l'impasse mais en a-t-il vraiment envie, alors qu'on le décrit comme ayant déjà la tête ailleurs ?
Kamara écarté du groupe pour manque d'investissement
La manière forte, le côté protecteur : Garcia, qui a écarté du groupe pour manque d'investissement le jeune Boubacar Kamara, a tout essayé. Et c'est peut-être le plus inquiétant car la léthargie n'a pas disparu. « On dirait qu'il n'y a pas de solutions, on est dans une routine insupportable », confie un membre du club.
Même si les salaires des nouvelles recrues (Strootman, Duje Caleta-Car) ont fait mal à certains, il n'y a pas encore de fractures nettes dans le vestiaire, où l'ambiance globale ressemble à celle de la saison dernière, avec un conglomérat de petites bandes amicales plutôt qu'une vraie famille. Mais il y a un lent délitement, un repli de certains sur eux-mêmes. Un joueur confie, en mimant un coup d'oeil dans le rétroviseur : « Chacun regarde ce que fait l'autre, comme s'il se disait : ''Si lui fait moins les efforts, pourquoi moi je les ferai ?'' »
Vétéran du vestiaire marseillais, Dimitri Payet (31 ans) se raccroche à une fin de match correcte face à Strasbourg : « Il ne faut pas tomber dans la panique de la grande crise ». Et pourtant, l'OM y va tout droit en cas de mauvais résultat ce samedi soir.
En 2013-2014, Élie Baup avait été limogé après 6 défaites en L 1 (27 points en 17 journées) et cinq sur la scène européenne, un bilan quasi semblable à celui de Rudi Garcia (même nombre de défaites sur les deux fronts, 26 points en 16 journées). « Le fait d'avoir limogé l'entraîneur n'était peut-être pas la solution, ou c'était peut-être trop tôt, a martelé Payet hier. J'ai plus confiance dans ce que nous sommes en train de faire qu'à l'époque. »
Baup avait avoué son impuissance à ses dirigeants. Dans la même situation, Garcia ne confiera jamais son désarroi à son président. Il tente de s'adapter, cherche des nouveaux arguments tactiques, de nouveaux axes dans sa communication. Mardi, il expliquait qu'il était « un peu chiant de toujours parler du passé ». Vendredi, il a rappelé à plusieurs reprises les bons moments de la saison dernière pour insister sur le fait qu'il était aussi le coach lors de cette embellie, au cas où certains l'oublieraient. Un coup de pied arrêté, un petit but de Thauvin suffiraient à son bonheur, au moins pour les quinze prochains jours.