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Combien le Clermont Foot va-t-il être vendu ?
Combien peut bien valoir le Clermont Foot ? C'est la question à laquelle nous avons tenté de répondre, alors que Claude Michy, son président, a annoncé ce mardi être en passe de vendre le club à un investisseur étranger.
Un calcul ultra-complexe
« Il s'agit toujours d'une offre qui rencontre une demande mais c'est plus complexe que le marché aux légumes. On peut difficilement déterminer un prix de manière scientifique », prévient Christophe Lepetit, responsable des études économiques au Centre de Droit et d'Economie du Sport (CDES) à Limoges. Pour lui, « la valeur d'un club est la rencontre entre la volonté de payer d'un acquéreur et la volonté de vendre du ou des actionnaires. Ces consentements sont basés sur quelques éléments objectifs. Vous allez pouvoir essayer de faire un arbitrage entre tous ces éléments pour déterminer un prix de vente qui peut servir de base à des négociations. »
Le Clermont Foot n'est pas propriétaire du stade Montpied.
Le Clermont Foot a des limites...
Pour permettre de valoriser un club, il y a donc des éléments tangibles qui vont entrer en ligne de compte. « Il faut regarder tout ce que le club a en terme d'actifs, commence par énumérer Christophe Lepetit. L'effectif a son importance car, comptablement parlant, les joueurs rentrent dans l'actif. Mais dans le cas d'un club comme le Clermont Foot, je ne suis pas sûr que ce soit extrêmement valorisable, contrairement à une équipe de Ligue 1. »
Deuxième élément objectif selon l'économiste, le patrimoine matériel. « Si le club est propriétaire de son stade par exemple. » Un mauvais point pour le Clermont Foot qui, à l'instar de l'immense majorité des clubs français, utilise un stade détenu par les collectivités (Clermont Métropole pour le stade Montpied).
Dernier point à mesurer, la valeur immatérielle du club. « Est-ce que le club est une marque bien implantée localement, connue à l'international ? Peut-il être utilisé comme véhicule pour acquérir de la notoriété locale, nationale ou internationale ? », interroge Christophe Lepetit. Malgré les efforts notables de Claude Michy, le club souffre dans ce domaine d'un déficit de visibilité, y compris localement avec la concurrence du rugby et de l'ASM.
… mais aussi des atouts
L'atout numéro 1 du Clermont Foot reste sa santé financière. Une vraie rareté dans le football moderne. « Oui, c'est un argument de poids, confirme Christophe Lepetit, car dans ce type de rachat on oublie souvent que le prix est déterminé par les actifs mais aussi par ce qu'il faut mettre au passif du club : les litiges en cours, des conflits d'ordre prud'hommal par exemple, les arriérés ou les dettes envers d'autres clubs ou des fournisseurs, etc. Tout cela compte énormément. »
S'il n'est pas propriétaire de son stade, le Clermont Foot l'est en revanche à 50 % du centre de formation qu'il partage avec les rugbymen de l'ASM. Là encore, l'économiste que nous avons contacté y voit un atout indéniable : « Le centre de formation partagé est intéressant dans la mesure où il est novateur. Les investisseurs savent aussi qu'un outil comme ça est susceptible d'appuyer des revenus futurs en vendant des joueurs. Et puis, le Clermont Foot a souvent réalisé des opérations intéressantes de cessions de joueurs, notamment en formation ou en post-formation. » Des éléments rassurants aux yeux d'un investisseur comme le sont également la stabilité et le sérieux de la gestion sportive, ainsi que les bonnes relations avec les collectivités (partie prenante notamment dans le dossier important qu'est l'agrandissement du stade).
Le centre de formation partagé avec l'ASM est l'un des actifs les plus intéressants dans le cadre de la vente.
Le contexte est favorable à Clermont
S'il a déjà lancé les grandes manœuvres, Claude Michy nous a rappelé à plusieurs reprises qu'il n'était pas pressé pour autant. « On a la chance de ne pas avoir le couteau sous la gorge. Quand un club est en vente c'est soit pour "faire de la caillasse", soit parce qu'il en faut d'urgence. Nous, c'est un peu à part : on est en bonne santé. Tout va bien mais il faut qu'on prépare l'avenir. »
Avec un investisseur qui est venu de lui-même dixit Claude Michy, le temps joue donc en faveur du club auvergnat. D'autant que le timing pourrait être difficilement plus porteur avec la renégociation à venir des droits télé de la Ligue 2. « Cela n'a rien de comparable avec la L1, mais le contexte est plutôt favorable en L2, estime Christophe Lepetit. Une hausse probable des droits télés de ce championnat et une répartition entre tous les clubs pros plus favorables aux clubs de Ligue 2 peuvent amener à bonifier le prix de vente. Les recettes ont un potentiel de développement à moyen terme. »
Les exemples des autres clubs
Le contexte semble propice aux changements de propriétaires puisque les cas de vente se sont multipliés ces derniers mois dans le football français. On passera rapidement sur le cas - incomparable - de Bordeaux (vendu à un fonds d'investissement américain pour 100 M€), pour n'évoquer que des clubs de Ligue 2. Auxerre (7 M€ pour 60 % des parts*) et Sochaux (7 M€*) ont été vendus, Valenciennes (6 M€*), Nancy, Troyes ou le Red Star sont susceptibles de l'être. Des exemples qui sont toutefois à prendre avec de grosses pincettes. « Il est impossible de comparer des clubs car on est dans des situations très hétérogènes », conclut Christophe Lepetit.
Conclusion
A l'heure du bilan (comptable), difficile de se faire une idée précise de ce que peut valoir le Clermont Foot. Faute d'avoir la réponse de Claude Michy - « On ne connaît pas le prix », s'est-il amusé à nous répondre lors de l'annonce de la vente - et compte tenu de tous les éléments, une fourchette située entre 3 et 7 millions d'euros nous semble réaliste et raisonnable. Avant de passer la main, Claude Michy en est en tout cas convaincu, son club a des forces à faire valoir : « Clermont est un club bien géré avec un centre de formation et un projet sportif qui tiennent la route. Il y a l'effectif, la marque, le réceptif VIP et plein d'autres choses. » Suffisant pour faire monter les prix auprès d'un investisseur suisse ?
Frédéric Verna
(*) : les chiffres indiqués sont ceux qui ont été précisés par des protagonistes des dossiers.