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Le capital croissance
Si le PSG peine encore à atteindre ses objectifs en C 1, il a connu en coulisses une ascension peu commune, multipliant sa valeur par onze. Le capital croissance
Valeur estimée : 990 M€ - Si le PSG peine encore à atteindre ses objectifs en C 1, il a connu en coulisses une ascension peu commune, multipliant sa valeur par onze. ARNAUD HERMANT
La scène se déroule le 30 juin 2011, avenue Hoche dans le cossu VIIIe arrondissement de Paris. Derrière les murs du cabinet d’avocats Mayer Brown, la cession du Paris-Saint-Germain à Qatar Sports Investments (QSI) vient d’être officiellement actée pour une somme totale comprise entre 80 et 90 M€. À la sortie, l’un des anciens actionnaires confie : « Les Qatariens ont des ambitions énormes et des moyens jamais vus. Ce qu’ils veulent faire du PSG est exceptionnel, sans précédent. » Dans les mois et les années à venir, le nouveau propriétaire, à grand renfort d’investissements de plusieurs centaines de millions d’euros, va tenir la promesse faite aux anciens patrons du club. Cette politique ambitieuse s’est manifestée, depuis le début, par le recrutement de top joueurs comme Zlatan Ibrahimovic, Edinson Cavani, David Beckham, Neymar, Kylian Mbappé ou Gianluigi Buffon pour ne citer qu’eux. Jusqu'à présent, le succès sur la scène européenne n’a pas encore été au rendez-vous. Mais, en coulisses, la direction a bâti une grosse machine afin de faire du PSG « l’une des dix plus grandes franchises de sport au monde », selon le souhait de son président Nasser al-Khelaïfi. Selon notre évaluation, il vaut aujourd'hui 990 M€, soit au moins onze fois plus qu'en 2011. Cette rapide ascension économique n'aurait bien sûr pas été possible sans les moyens colossaux de QSI et de ses partenaires qatariens, visés depuis 2014 par le fair-play financier.
Une stratégie
mûrement réfléchie
« On est partis des fondamentaux, raconte un dirigeant parisien. On a travaillé sur la marque et son positionnement. » Ce qui est d'abord passé par une rénovation du logo avec une idée simple, mettre Paris – et l’un de ses emblèmes iconiques, la tour Eiffel – au cœur du projet. « Paris » apparaît désormais en plus gros et Saint-Germain (pour Saint-Germain-en-Laye) en plus petit avec la suppression du berceau de Louis XIV, symbole de la ville yvelinoise. Ce logo, révélé début 2013, a traduit le nouveau positionnement de la marque. Parallèlement, le message passé à l’ensemble des équipes du club a été : « On est Paris et on est plus qu’un club de foot. » Sous-entendu, désormais, le PSG dépasse le simple cadre du football pour représenter aussi l’esthétisme, le glamour, la mode, l’architecture, des mots traditionnellement associés à Paris. Le but est de toucher un public plus large, notamment des vedettes du show-business comme Beyoncé, qui s'est déjà affichée avec les couleurs du club. L'ouverture vers le « lifestyle » et les collaborations avec des créateurs de mode (Koché, Manish Arora) et Michael Jordan y contribuent également. « On a cherché à élever le club au niveau de la ville et, après, on a tout tiré vers le haut, poursuit-on en interne. Pour gagner du temps, l’actionnaire a investi massivement, notamment sur les joueurs, quitte à parfois les surpayer. Le tout en développant parallèlement un projet de marque très fort. » Dernier étage de la fusée : la rénovation du Parc des Princes pour attirer un public différent du simple supporter (familles, étudiants, entreprises) et créer une rareté sur le marché.
Le développement
international
Après avoir jeté les bases de sa croissance, le club s’est tourné vers l’étranger. Toujours en s’appuyant sur la renommée de Paris dans le monde et en y associant un recrutement de stars planétaires, comme Beckham, Neymar ou Buffon. Pour se faire connaître et séduire de nouveaux fans à l’international, il a donc fallu communiquer avec eux : en investissant les réseaux sociaux mondiaux mais aussi locaux (notamment chinois), en traduisant le site du club en plusieurs langues (anglais, chinois, indonésien, arabe, portugais, espagnol), en ouvrant des académies PSG un peu partout et en leur amenant les joueurs. Depuis l’été 2012 et un séjour à New York, les Parisiens réalisent une partie de leur préparation d’avant saison chaque année loin de la France (Suède, États-Unis trois autres fois, Chine, Hongkong et Singapour). Même si l’équipe parisienne est encore en retrait par rapport aux grands clubs anglais, notamment en Asie, sa notoriété ne cesse de croître.
Le concept
de « nation branding »
Pour accélérer sa construction et son développement, « notamment en offrant certains salaires aux joueurs », dit-on en interne, le PSG a mis en avant le concept de « nation branding » (image de marque nationale), via un partenariat avec Qatar Tourism Authority (QTA). En 2017-2018, ce contrat rapportait 150 M€ au PSG. C’est ce deal qui est à l’origine des soucis du club avec le fair-play financier. En 2014, son montant avait été décoté de moitié, passant de 200 à 100 M€ par le gendarme financier européen et, depuis, le club, dans les comptes qu’il présente à l’instance européenne chaque année, le fixe à ce tarif. La saison passée, de nouveau sous le coup d’une enquête sur le fair-play financier, le PSG a vu ses contrats qatariens (Ooredoo, Qatar National Bank, beIN Sports) dévalués de 37 % au global et celui avec QTA a été ramené à 58 M€ au lieu de 100 M€.
Malgré cette baisse sensible, Paris demeure sous la menace d’une sanction puisque l’instance réétudie encore tous ses comptes de la saison passée.
L'Equipe