Pourquoi les Girondins valent plus cher que l 'OM
Les raisons qui font que Bordeaux vient d'être vendu plus de deux fois le prix de l'OM à l'automne 2016. pierre rateau
En vendant les Girondins de Bordeaux à GACP pour cent millions d'euros (voir ci-dessus), M6 va réaliser une opération d'un montant plus de deux fois supérieur à celui de la transaction entre Margarita Louis-Dreyfus et Franck McCourt, pour la cession de l'OM, il y a près de deux ans (45 M€ en octobre 2016). Comment expliquer ce différentiel ?
« La valorisation d'une entreprise se fait en fonction des bénéfices. Mais pour un club de football, c'est plus compliqué . À Bordeaux, il n'y a pas de bénéfices depuis sept ans », explique Bastien Drut, économiste du sport, auteur de « Mercato : l'économie du football au XXIe siècle » (Breal, juin 2018). D'après les rapports annuels de la DNCG – le gendarme financier du football français – le dernier résultat positif du club girondin remonte en effet à l'exercice 2009-2010 (*) (9 M€ de bénéfices). Au moment de sa vente, l'OM présentait un résultat avant impôt positif (+ 353 000 € pour 2015-2016), ma is porté par les ventes de joueurs à l'été 2015 (Payet à West Ham pour 15 M€, Thauvin à Newcastle pour 18 M€...), venues compenser un déficit de 46 M€ « hors mutation » (soit sans comptabiliser les transferts).
La L 1, un contexte devenu plus florissant
« Les transferts sont fluctuants, c'est un aspect plus risqué, indique explique Christophe Lepetit, responsable des études économiques au Centre de Droit et d'Économie du Sport (CEDS) de Limoges. On va plutôt regarder la valeur de l'effectif et les actifs immobiliers. » D'après le site de référence Transfermarkt, la valeur de l'effectif olympien se situait autour de 60 M€ à l'automne 2016, contre un peu moins de 90 M€ pour celui de Bordeaux actuellement (sans Malcom). Concernant l'immobilier, aucun des deux clubs ne possède son stade, et, tandis que Bordeaux loue – à des conditions avantageuses – le domaine du Haillan, l'OM devait encore, au moment de son rachat, environ 17 M€ à la Caisse d'Épargne pour devenir propriétaire de la Commanderie. « En termes d'actifs, les deux clubs sont sensiblement pareils », conclut Christophe Lepetit. La différence de prix de vente entre les deux clubs vient en fait du contexte des négociations.
D'une part, « à Marseille, il y avait des charges supplémentaires à venir, comme les options d'achat de Florian Thauvin (11 M€) et Clinton Njie (7 M€), décrypte l'expert du CEDS. Le vendeur peut alors s'engager à payer ces charges futures. Mais Margarita Louis-Dreyfus a voulu “couper le fil”, quitte à faire baisser le prix de vente. Il y avait aussi les risques des procédures aux prud'hommes de Michel et José Anigo. »
À l'inverse, le contexte est aujourd'hui très favorable à Bordeaux : « À l'époque du rachat de l'OM, on ne savait pas que les droits télé dela Ligue 1 seraient aussi importants, poursuit Bastien Drut. Là, le repreneur sait qu'à partir de 2020, les recettes seront mécaniquement bien plus élevées (726,5 M€ par an de 2016 à 2020 et 1,153 milliard d'euros à partir de 2020 pour quatre ans), donc il y a potentiellement une plus grande rentabilité, dans l'optique d'une revente. » Un jackpot à prévoir donc, dont M6 va d'ores et déjà bénéficier.
(*)Du 1erjuillet 2009 au 30 juin 2010. Le rapport des comptes individuels des clubs pour 2017-2018 n'a pas encore été publié.
L'Equipe