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Didier Quillot est l'homme-clef du développement de la Ligue 1 à l'international. C'est dans ce cadre d'entreprise de séduction du marché américain qu'entre ce tournoi à Washington (lire ci-dessous), entre l'OM, Bordeaux, Saint-Étienne et Montpellier. C'est avec beaucoup d'enthousiasme que le directeur général de la Ligue de football professionnel, en poste depuis trois ans, a répondu aux questions de La Provence.
Pourquoi organiser ces "EA Ligue 1 Games" aux États-Unis ?
Cette tournée s'inscrit dans le rattrapage du retard à l'international de la Ligue 1. Nous avons refait notre retard en matière de droits télés domestiques depuis l'appel d'offres de l'an dernier, nous avons un namer pour la L1, qui s'appelle Uber Eats à un montant record pour une compétition de football. Mais nous sommes en retard à l'international : notre championnat n'est pas assez connu, nos droits télés trop faibles et nos clubs en manque de notoriété, sur le continent asiatique, en Chine en particulier, et en Amérique du Nord, notamment aux États-Unis. Cette tournée est destinée à faire la promotion de la Ligue 1 et de nos clubs auprès des Américains.
En Asie, il y a des boutiques de clubs anglais dans les aéroports, y compris Leicester à Bangkok...
En l'occurrence, c'est parce que le propriétaire de Leicester est thaïlandais. Mais Manchester United, Arsenal, Barça, Real, oui, ce sont les clubs les plus connus au monde, avec le Bayern, la Juventus, le Paris Saint-Germain. L'OM, votre cher OM, est aussi une marque connue dans le monde entier. Je pense que cette tournée va permettre d'aller à la rencontre de ses fans aux États-Unis. Il y a un club de supporters de l'OM à Miami, par exemple (à New York et San Francisco aussi, ndlr) et ça, c'est bien. Dans le stade, je crois que les supporters de l'OM seront en majorité.
Justement un entrepreneur français, vivant en Caroline du Nord, supporter de l'OM, nous disait que vous aviez raison de tenter ce coup, car il y a vraiment de la place pour le foot français, qui est très respecté, dans un marché loin d'être saturé...
Le football français, ne l'oublions pas c'est celui des champions du monde. Il y a effectivement une place à prendre, pour l'OM et Bordeaux qui ont des actionnaires américains, pour Saint-Étienne et Montpellier, ravis de faire ce tournoi. On peut faire connaître notre L1 aux USA.
Les Américaines viennent d'être championnes du monde en France. Pour l'Américain qui s'intéresse au foot, France égale soccer...
Les planètes sont bien alignées. L'an dernier, nos garçons ont été champions du monde, cette année les Américaines le sont en France. Des investisseurs américains ont acheté l'OM et les Girondins. Entre nos pays, il y a une histoire qui se crée en matière de football. Cette tournée s'inscrit aussi dans le développement de cette histoire. Nous pensons vendre 10 à 15 000 billets dans un très beau stade, l'Audi Field, tout neuf, celui de DC United, en tête de la MLS. Nous avons un diffuseur aux États-Unis, FloSports, une plate-forme digitale, spécialisée dans la diffusion d'événements sportifs, et en France, ce sera beIN Sports.
Le développement international passe d'abord par les droits télés ou par le merchandising aussi ?
Ça commence par la notoriété. Faire connaître la Ligue 1. Donc, faire des actions pour cela, comme le Trophée des champions en Chine, cette tournée Electronics Arts aux États-Unis, participer à des salons, rencontrer des investisseurs, des médias, produire des contenus... Ensuite, ça passe par de bonnes performances de nos clubs en coupe d'Europe, c'est très important parce que c'est ça qui permet de les faire connaître aux États-Unis. Cela permet de faire augmenter nos droits télés à l'international. Mais il faut beaucoup travailler avant pour cela.
Vous visez un public d'expatriés européens ou vous espérez séduire un public américain ?
Lors de cette tournée, je pense qu'il y aura pas mal de touristes français en vacances et des fans de soccer américains, le billet n'étant pas cher. En ce qui concerne les droits télés, nous visons la masse des amateurs de football européen. Il faut leur faire aimer le foot français, comme ils aiment la Liga ou la Premier League.
Comment s'est mis en place ce tournoi ?
Nous allons souvent aux États-Unis avec le directeur commercial de la Ligue, pour nos droits ou faire venir des investisseurs et à cette occasion, nous avons rencontré l'actionnaire de DC United, nous lui avons fait part de notre volonté de faire grandir la L1 et il nous a proposé de nous aider. Il nous accueille dans son stade, nous a trouvé des installations pour les entraînements où se sont d'abord préparés le Real ou Arsenal qui y ont disputé la ICC Cup (avec Manchester United, Inter, Bayern, Fiorentina, Chivas et Benfica, ndlr). Nous avons une agence marketing qui s'appelle Relevate qui s'occupe de la billetterie et de la diffusion aux États-Unis, mais le partenaire principal c'est DC United, avec le sponsor, Electronic Arts, éditeur de jeux vidéo, qui finance la tournée. Notre compétition E-Ligue 1, qui a réuni 100 000 participants depuis trois ans, se joue sur XBox ou PS4 et c'est un jeu d'Electronic Arts.
À Washington, c'est autant le club que la ville, très ouverte sur le monde, qui vous a intéressé ?
Pourquoi Washington ? D'abord pour le bon feeling avec DC United, ensuite pour son très beau stade, de belles installations de qualité pour les entraînements de nos clubs. Et, enfin, effectivement, Washington est une ville très européenne, cosmopolite. Et comme c'est sur la côte est, le décalage horaire est moins important. Le choix s'est donc imposé très vite.
C'est vous ou DC United qui avez choisi de prolonger le tournoi par un match amical DC-OM ?
C'est le club américain. Ils ont souhaité rencontrer l'OM, nous avons donc proposé au club marseillais de disputer un match de plus contre United. J'ai lu dans un excellent journal qui s'appelle La Provence que les joueurs trouvaient que l'an dernier, ils avaient passé trop de temps à La Commanderie. Cette année, ils y passeront donc moins de temps.
Et pourquoi l'OM, Bordeaux, Saint-Étienne, Montpellier et pas Lille, PSG, Lyon, Monaco ?
Nous voulions d'abord les deux clubs dont les propriétaires sont des Américains, l'OM et les Girondins. Et puis, l'OM, c'est une grande marque. Quand nous avons conçu le plateau en février-mars, nous voulions des clubs potentiellement européens. Paris avait une tournée en Chine, Lille en avait une autre au Portugal et Lyon n'a pas souhaité venir, nous avons proposé à ceux qui suivaient. Ça s'est fait naturellement.
Verriez-vous d'un bon oeil que des clubs français participent l'an prochain à des tournois internationaux aux États-Unis, l'OM notamment, si cela peut se produire grâce à son propriétaire américain ?
Nous souhaitons améliorer la notoriété de la Ligue 1. Si des clubs tels que le PSG, l'OM, Lyon, Monaco, pouvaient participer à un tournoi type ICC Cup, pourquoi pas ? Déjà, je peux vous affirmer que nous retournerons aux États-Unis. Avec combien d'équipes, dans quel format, nous verrons...
C'est un peu ce qui s'est fait avec le Trophée des champions qui a vraiment trouvé sa place, depuis Radès, Tanger, jusqu'en Chine, en passant par les États-Unis ou le Canada...
Il faut être pragmatique, parfois on peut se tromper. Se déployer à l'international, nous ne le faisons que depuis deux ou trois ans, on apprend, on a ouvert un bureau à Pékin, nos droits là-bas ont augmenté, nos audiences digitales aussi, les clubs français ont une plus grande notoriété. C'est long, il faut beaucoup travailler, les Anglais, les Allemands ont bossé pendant dix ans avant de recueillir leurs premiers fruits.
Lors du lancement, le 20 mai dernier vous disiez, "il est important de pouvoir organiser de tels événements", quels sont les autres projets ?
L'an prochain, je pense que nous grouperons tout aux États-Unis. La décision n'est pas définitive, mais notre plan est d'accélérer encore aux États-Unis.
Avec tournoi plus Trophée des champions ?
Par exemple.
Et le projet d'un All Star Game, sur le modèle NBA ?
Nous avons abandonné ce projet pour l'instant pour des contraintes de calendrier, d'assurances des joueurs.
La Provence