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La Ligue de football professionnel poursuit ses efforts en matière de transformation digitale. Elle annonce ce 6 février un partenariat avec Intel pour équiper certains stades français d'un dispositif de vidéo volumétrique. Cette technologie, baptisée True View, permet de proposer aux téléspectateurs des replays immersifs, notamment des rotations à 360° autour de l'action pour mieux appréhender une situation, ainsi qu'une vision de l'action "du point de vue du joueur" pendant un coup franc ou un penalty.
Le premier stade français à en bénéficier est le Parc des Princes. Les travaux ont déjà été effectués, et un test a été réalisé samedi 1er février lors du match opposant le Paris Saint-Germain au Montpellier Hérault Sport Club. Sa première utilisation visible par le public aura lieu dimanche soir, lors du match du PSG contre l'Olympique Lyonnais, qui sera diffusé sur Canal+.
38 CAMÉRAS, 40 SERVEURS ET 2 TECHNICIENS
Le dispositif se compose de 38 caméras 5K. 35 d'entre elles sont montées sur les faisceaux de béton qui surplombent les tribunes, tandis que les trois autres sont sur le toit du stade. Elles sont disposées très précisément, au pixel près, et synchronisées entre elles de manière à couvrir tous les angles de jeu en permanence. Ces données sont transmises par des fibres optiques à un data center situé au sous-sol, qui reconstitue la séquence en 3D à partir d'un nuage de points. Cela permet à la réalisation de placer une "caméra virtuelle" n'importe où sur le terrain, et d'obtenir des angles de vue impossibles à filmer autrement.
40 serveurs sont utilisés : un par caméra, plus deux autres qui dirigent l'ensemble. Intel oblige, les calculs sont effectués par des processeurs Xeon, épaulés par des "frame grabbers" propriétaires utilisant des FPGA fournis par Altera. Comme son nom l'indique, un "frame grabber" est un composant qui capture des images individuelles dans un flux vidéo. Les caméras elles-mêmes ne sont composées que d'un capteur et d'un objectif. Au total, environ 250 To de données sont générées durant 90 minutes de jeu.
Une pépite israélienne
La technologie True View est issue de la start-up israélienne Replay Technologies, qu'Intel a racheté en 2016. Les équipes True View comptent aujourd'hui plus de 300 ingénieurs, tous basés en Israël.
Deux personnes sont en charge du système durant les matchs : un assistant réalisateur qui choisit quelles séquences proposer au réalisateur et un ingénieur qui s'assure que tout fonctionne correctement. Ils sont installés à un poste de montage dédié. Une fois une séquence identifiée, le temps de calcul nécessaire à sa création est de 2 à 3 minutes. En moyenne, une dizaine de scènes est proposée à la réalisation durant chaque match, et 70 à 80% d'entre elles sont passées à l'antenne.
BIENTÔT DANS LE CLOUD
Les images produites pour la diffusion finale sont en résolution 1080p, mais avec une qualité visuelle dégradée, fruit de la reconstruction de l'image. Intel travaille évidemment à l'amélioration de la qualité d'image, que ce soit d'un point de vue algorithmique ou matériel. Un gain majeur, comme le passage à la 4K, est cependant conditionné à la création de caméras à la résolution beaucoup plus élevée, qui n'existent pas aujourd'hui. Dans l'immédiat, Intel se concentre surtout sur l'élaboration d'une infrastructure cloud qui permettra de se passer d'un datacenter local. Les données seront encodées en H.264 et envoyées sur le cloud, ce qui permettra de générer les séquences en temps réel (à un rafraîchissement de 30 images par seconde).
LA LFP VEUT RENFORCER LE PRESTIGE DE LA LIGUE 1 À L'INTERNATIONAL
Si cette technologie a pour but d'améliorer l'expérience spectateur, son implémentation est très clairement une opération séduction envers les diffuseurs. "C'est un projet très important pour la Ligue, notamment pour augmenter la valeur de nos droits de diffusion à l'international, a déclaré Didier Quillot, directeur général exécutif de la LFP, lors d'une conférence de presse. Nous avons du retard à rattraper sur les grandes ligues européennes, et nous avons mis les bouchées doubles pour être la troisième ligue de football à déployer cette technologie, avant la Bundesliga et la Serie A."
Ce n'est évidemment pas pour déplaire aux diffuseurs nationaux non plus. "Nous en avons parlé avec les réalisateurs et avec Canal+, qui dans les faits sera le premier bénéficiaire de cette technologie, et tous sont impatients de la prendre en main", affirme Didier Quillot. Quant à Mediapro, qui a battu BeIN sur les droits de diffusion pour la prochaine saison, ses équipes sont déjà habituées à ce dispositif. Il a été déployé dans six stades de la ligue espagnole, la Liga, en 2018. La Premier League a suivi l'année dernière avec trois stades (des clubs d'Arsenal, Liverpool et Manchester).
MARSEILLE ET LYON ÉQUIPÉS COURANT AOÛT
En France, des installations dans deux autres stades sont prévues : l'Orange Vélodrome de l’Olympique de Marseille et le Groupama Stadium de l’Olympique Lyonnais. Il est prévu qu'ils soient équipés courant août, pour le démarrage de la saison 2020/2021. Des déploiements qui "représentent un budget conséquent", d'après Didier Quillot.
Intel ne destine d'ailleurs sa technologie qu'aux sports les plus populaires, et donc les plus à même de se la payer. Outre le football européen, trois ligues en font usage aux Etats-Unis : la NBA (basketball), la MLB (baseball) et la NFL (football américain). Intel est par ailleurs partenaire des Jeux Olympiques, et prévoit d'ores et déjà une couverture immersive de certaines épreuves en 2020, 2022 et 2024.