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« On n'avait pas beaucoup de choix » : 500 millions d'euros pour les droits télé de la Ligue 1, un moindre mal
Après des mois d'attente, la LFP a enfin attribué les droits de la L1. Le duo DAZN-beIN Sports va se partager les rencontres pour un total de 500 millions d'euros par an. Un montant modeste qui clôt une véritable tragi-comédie.
Depuis quelques semaines, le feuilleton commençait à devenir lassant. Et sérieusement angoissant pour des clubs de Ligue 1 qui ne savaient toujours pas où leurs matches seraient retransmis ni quelles allaient être leurs recettes télévisées pour les cinq prochaines saisons. Ils savaient bien que les 700 millions de revenus annuels pour les droits nationaux, l'objectif de la LFP, n'avaient aucune chance d'être atteints.
Ils avaient aussi compris depuis longtemps que les 900 millions d'euros de recettes globales (en y ajoutant les droits internationaux) n'étaient qu'un doux rêve, celui d'approcher le fameux milliard qui a fait tant sourire.
À l'arrivée, ils auront 500 millions d'euros sur le terrain national (avec un duo DAZN-beIN Sports) et autour de 160 millions dans le reste du monde, soit un écart abyssal avec les prévisions. Mais ils ont aussi imaginé ne rien avoir du tout, en tout cas rien dans l'immédiat, puisqu'ils avaient au départ une offre de DAZN de 375 millions d'euros pour huit matches sur neuf, mais sans garanties financières rassurantes, et un projet de chaîne 100 % L1 distribuée de manière non exclusive par tous les opérateurs au tarif de 27,99 euros. Une antenne s'appuyant sur sept distributeurs, en association avec la plate-forme Warner Bros Discovery, qui propose des films, des séries et des programmes sportifs, mais sans minimums garantis. Avec un démarrage sans recettes pour les clubs et des trous dans la trésorerie compliqués à combler.
Dans la dernière ligne droite, la LFP a obtenu des garanties revues et corrigées de DAZN après un déplacement de Vincent Labrune, le président de la LFP, à Londres. Elles émanent maintenant de la maison mère, Access Industries (Warner Music, Deezer...), un groupe fondé par l'industriel Len Blavatnik, troisième plus grosse fortune du Royaume-Uni. Et une hausse de l'offre à 400 millions d'euros pour huit matches par journée (dont les dix affiches de la saison), en y incluant le quasi-direct. Mais surtout, comme l'a révélé L'Équipe samedi soir, la LFP a enfin obtenu quelque chose de beIN Sports, en l'occurrence 100 millions d'euros pour la dernière rencontre restant à vendre (la meilleure affiche ou le deuxième choix une semaine sur deux, hors top 10).
Réuni dimanche, le collège de Ligue 1, au départ plutôt favorable au projet de chaîne, plus novateur de l'avis de tous les spécialistes, était prêt à vaciller. Avec 500 millions d'euros en moyenne sur cinq ans, la LFP est loin d'avoir décroché la lune, mais les clubs, qui ne voient pas toujours très loin, auront un peu de cash tout de suite. « On n'avait pas beaucoup de choix, soit de l'argent de suite, soit il fallait attendre plusieurs mois et sans garantie de combien on allait toucher, résume un président de L1. On était devant le fait accompli car prévenus tardivement des différentes options. C'est dommage d'en arriver là. »
Des clauses de sortie espérées par la Ligue
Sans enthousiasme, le collège de L1 s'est donc prononcé en faveur de DAZN et beIN Sports, même si les Lyonnais (John Textor, le président, et Laurent Prud'homme, le directeur général) ont dit tout le mal qu'ils pensaient de cette solution tournée vers le passé, selon eux. Dans la foulée, le conseil d'administration de la LFP n'avait plus qu'à valider un choix qui sauve les meubles, mais auquel pas grand monde ne croit en fait vraiment. À tel point que la LFP va maintenant tenter d'obtenir des clauses de sortie au bout de deux ou trois ans de ce contrat qui court jusqu'en 2029. beIN Sports est d'accord avec ce principe. Reste maintenant à convaincre DAZN d'ouvrir cette possibilité.
Au cours des échanges tenus lors du conseil d'administration, ils ont été quelques-uns à réclamer également à la LFP, qui a eu la folie des grandeurs en créant sa société commerciale (LFP Media), de faire des économies. Jean-Pierre Caillot (Reims) est vite allé sur ce terrain et Waldemar Kita (Nantes) a même chiffré la demande, expliquant qu'il y avait entre 100 et 150 M€ à récupérer et a demandé à Labrune de s'y atteler... Présent au CA, Philippe Diallo, le président de la FFF, a rappelé à tous qu'il avait participé aux négociations, en rencontrant notamment Blavatnik, le big boss de DAZN...
Au bout du compte, le scénario est celui qu'imaginaient ceux qui étaient persuadés que beIN Sports faisait traîner les choses. Un peu pour son compte et aussi pour celui de son partenaire Canal+, son distributeur exclusif. Car Canal+ va garder une affiche de L1 dans son offre, par le biais de son pack Sport, qui inclut beIN Sports. Le tout sans avoir discuté avec la Ligue. Et sera prêt à saisir une opportunité dans deux ans si cet attelage, qui va forcer au passage le consommateur à débourser autour de 50 euros par mois (entre 30 et 40 €pour DAZN et 15 € pour beIN) pour avoir toute la L1, venait à sortir du jeu.