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« Si on doit reprendre la saison sans chaîne... » : la prudence de Jean-Pierre Caillot sur les droits TV de la Ligue 1
Jean-Pierre Caillot, le président de Reims et du collège de Ligue 1, estime qu'il ne faut pas se précipiter avant de choisir le diffuseur du Championnat sans écarter une ou deux journées sans retransmission. Et annonce une prochaine remise à plat des versements faits par les clubs vers l'écosystème du football français.
Samedi, le collège de Ligue 1, présidé par Jean-Pierre Caillot, s'est réuni pour trancher le dossier brûlant des droits télévisés (période 2024-2029). Mais même si le temps presse, il n'a pas voulu prendre de décision définitive au vu des incertitudes et des enjeux colossaux pour les clubs. Il le fera a priori d'ici la fin de la semaine, mais ce n'est même pas sûr...
« La Ligue reprend le 16 août, et il n'y a toujours pas de diffuseur pour la saison prochaine...
La situation est évidemment préoccupante. Mais par expérience, il ne faut, malgré tout, pas prendre des décisions dans la précipitation. C'est pour cela que l'on a eu un collège, samedi, qui a été assez positif. Maintenant, tous les présidents ont le même degré d'information. Et on va se réunir, jeudi, pour voir comment cela évolue. Car tout n'est pas fini dans les négociations. Il y a toujours la possibilité d'une sortie différente.
C'est quoi cette sortie différente ? Il y a l'option avec DAZN et celle de la chaîne lancée par la LFP. Une autre issue est possible ?
Il y a toujours l'option 3, présentée au conseil d'administration (vendredi dernier), et qui peut peut-être aboutir. Donc, entre l'option 3 et l'option 2, on verra bien. L'option 2, c'est la chaîne 100 % L1 avec Warner Bros Discovery. Mais l'intégration d'une chaîne ne se fait pas en 24 heures. Il y a des réflexions. Il faut que chacun donne sa position, ce que l'on a commencé à faire samedi.
L'option 3, c'est beIN Sports ?
Cela peut-être beIN Sports.
Avez-vous encore l'espoir que beIN Sports intervienne dans ce dossier ? Ils ont eu l'occasion de faire une offre depuis des mois et n'ont pas bougé...
Jusqu'au bout, on peut avoir de l'espoir... L'espoir fait vivre. Sur ce que je sais, beIN est intéressé par le produit. Mais jusqu'à aujourd'hui, cela ne se traduit pas par une offre concrète. C'est un peu la guerre des nerfs.
La décision sera prise d'ici la fin de la semaine ?
J'espère, mais pour décider, il faudra avoir des choses sur la table. Ce qui, au moment où on se parle, n'est pas encore le cas.
Le projet de chaîne est sur la table...
Oui. Il y a un peu un ultimatum car il faut du temps pour la démarrer. Mais si on doit reprendre la saison sans chaîne, pendant une ou deux journées, on assumera. Les gens iront au stade pour voir les matches. Et on patientera. Je pense que c'est une erreur de démarrer quelque chose dans la précipitation.
L'option DAZN ne semble pas avoir beaucoup de partisans.
Elle est loin de faire l'unanimité...
Qu'est-ce que vous lui reprochez ?
Les garanties. L'option DAZN n'est pas pire qu'autre chose, mais en termes de garanties, cela fait trop penser à ce qui a pu arriver dans le passé (la défaillance de Mediapro, en 2020)... Si c'était DAZN, il faudrait que les garanties soient beaucoup plus certaines que celles que l'on a aujourd'hui. Il faudrait avoir des garanties de l'actionnaire majeur, ce qui n'est pas le cas. Aujourd'hui, les garanties apportées ne satisfont pas les présidents de club.
Et le montant ?
375 millions d'euros par an, plus un match à vendre, cela permettrait peut-être de tourner autour de 500 millions. Ce n'est pas les 700 millions attendus, mais ce serait quand même possible.
Ce sont donc les garanties qui vous font renoncer ?
Pour le moment, c'est ce qui fait que cette option est mise de côté.
La chaîne 100 % L1 financée par la LFP n'inquiète pas les clubs ?
Tel qu'il nous est présenté, c'est un bon produit. Mais dans le schéma actuel, il n'y a pas de fixe. Les clubs ont des problèmes de trésorerie et ils ont besoin d'un fixe. Avec la chaîne, il va falloir un peu de temps pour qu'elle ramène de la ressource. Cela fait aussi partie des réflexions. En termes de trésorerie, les clubs veulent être rassurés.
La LFP imagine un système de prêts en faveur des clubs, comme après la défaillance de Mediapro...
Cela fait partie des choses qui sont travaillées. Mais je ne vous apprends rien en vous disant qu'un prêt, par définition, il faut le rembourser.
Comment peut-on en être là alors que la saison redémarre dans un mois ?
Il y a un marché mondial qui n'est pas porteur. Et puis, il y a un opérateur majeur en France en matière de distribution (le groupe Canal+), qui, clairement, s'attaque au football. Et pense que la Ligue 1 est un produit qui n'intéresse pas ses abonnés. Ce qui est une erreur à mon avis, même si cela n'engage que moi. S'il n'y a plus de Ligue 1, je ferai comme beaucoup de mes amis, je me désabonne. Mais c'est comme ça...
Comment les clubs comptent-ils faire dans cette période de récession qui s'annonce ?
La commercialisation des droits télévisés vit une crise mondiale, comme on le sait. Aujourd'hui, il faut peut-être revoir toute l'organisation, en tout cas une bonne partie de l'organisation du football. Pendant des années, les droits télé ont fait que le football a vécu un peu dans l'opulence. Et quand tu es dans l'opulence, dans une entreprise, souvent les décisions qui sont prises, c'est toujours d'accorder tout à tout le monde. Aujourd'hui, il faut se poser les vraies questions et on va aussi en discuter lors la réunion de jeudi. On n'a plus les moyens. Et il y a plein de choses qui doivent être remises en question. Il faut que j'en parle avec mes collègues.
Vous pensez à quoi ?
À tous les postes, sans exception. Le VAR, ça coûte beaucoup d'argent. Est-ce qu'il faut le continuer ? On donne des sommes importantes à plein d'autres familles (joueurs, entraîneurs, syndicats...). On est toujours critiqués, mais on verse beaucoup de contributions. Il y a un moment, il faut que tout le monde se serre la ceinture. Il n'y a pas que les clubs et les présidents qui vont assumer. Des clubs avec des capitaux traditionnels n'ont plus les moyens de supporter tout ça. On a aussi une convention avec la Fédération (14,2 millions d'euros minimum sur les droits télé). Il faut peut-être en rediscuter. Ce qui était prévu avec un certain budget ne peut pas être identique aujourd'hui. C'est en chef d'entreprise que je réagis. À partir du moment où tu es en crise ou que tu peux l'être, il faut remettre en question ce qui a été fait par le passé. »