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Bleus. Franck Le Gall, médecin en or
Le Télégramme
Le soir du dimanche 15 juillet, Franck Le Gall a pris sa douche avec Paul Pogba et la Coupe du monde. De quoi vous poser un homme. Affable et bienveillant. Qui a pris le temps de converser plus d'une demi-heure durant, tard, un lundi du mois d'août, au lendemain de la défaite de Marseille à Nîmes en Ligue 1.
Car le médecin de l'équipe de France est aussi celui de l'OM. Et n'a pris que deux semaines de vacances entre le Graal moscovite et le retour au centre d'entraînement Robert-Louis Dreyfus. « Je suis allé un peu à Lille et une semaine en Corse. Pour déconnecter, il aurait fallu que j'aille en Patagonie ou en Andalousie. L'idéal, ç'aurait été de partir maintenant, mais Rudi ne voudra pas », rigole-t-il, concédant que, « oui, la pression est un peu retombée, même si, forcément, on est obligé d'y repenser, beaucoup de conversations nous y ramènent ».
L'appel de 2012
S'il faut trouver un virage dans la vie de « Docteur Le Gall », il est à dater de 1993. Franck Le Gall a 28 ans, est interne au CHU de Rennes quand le professeur Pierre Rochecongar, ancien médecin du Stade Rennais et des Bleus, lui soumet de se rapprocher de Paris. Clairefontaine, plus précisément. La proposition ? Entrer à la formation au Centre technique national.
« Il n'était pas au courant que j'étais fils de, il l'a su après ». Il y restera 15 ans, jusqu'en 2008, passant par les U18, U19, U20 ou encore les espoirs. Avant un break de quatre saisons et l'appel de Didier Deschamps, en 2012.
Un « rêve » qui se réalise, un aboutissement partagé en primeur avec son père, Alphonse, originaire de Kernouës (29) et footballeur professionnel entre 1951 et 1958 (Rennes, Angers, Marseille, Bordeaux). Une famille de footeux pour un destin en or qui a connu son apogée mi-juillet, lors de la troisième grande compétition internationale (après la Coupe du monde au Brésil en 2014 et l'Euro 2016, en France) de l'avant-dernier d'une fratrie de quatre enfants, dont trois garçons.
L'Argentine, le tournant
De cette épopée russe, l'Angevin n'en retient « que du bonheur », forcément, le spécialiste en Médecine Physique et Réadaptation estimant le moment de bascule en huitièmes, contre l'Argentine (4-3). « C'est LE match charnière. On rentre à la maison ou on passe. Il n'y avait pas de certitudes avant et là, le groupe s'est définitivement construit. Il s'est rendu compte que tout était possible, qu'il pouvait aller au bout. À partir de là, les planètes étaient alignées », se remémore avec éloquence et un brin d'émotion le responsable de la cellule médicale de l'équipe de France. « Je n'avais jamais vécu avec un staff aussi homogène. Chacun connaissait son rôle, tout était millimétré. Il y avait beaucoup de bonne humeur, mais quand il fallait se dire les choses, on le faisait ».
Durant ce Mondial, les Bleus ont été épargnés par les grosses blessures. « Il y a quand même eu le dos de Kylian Mbappé avant la demie contre la Belgique. On a mis un jour, un jour et demi à le remettre sur pied. C'était un moment de stress par rapport à l'échéance, l'enjeu, mais non, il n'y avait pas de pression », confie-t-il. La suite, on la connaît, tout le monde la connaît.
« Didier va siffler la fin de la récré »
« Quand on prend conscience qu'on devient champion du monde, ça monte progressivement. Il faut garder les yeux bien grands ouverts pour profiter à fond. Dans le vestiaire, longtemps après la remise du trophée, plus personne ne voulait partir, je n'avais jamais vu ça ! » Deux mois avant, avec Marseille, il perdait la finale de la Ligue Europa contre l'Atlético. Le paradis après la douleur. « Ce n'est pas pareil d'être de l'autre côté... ».
En France, Franck Le Gall, qui met « un petit plus à Benjamin Pavard », a ramené plein de souvenirs qui resteront gravés à jamais dans sa mémoire. Des étoiles plein les yeux dont une, la deuxième, brodée pour toujours au-dessus du coq. Alors quand les Bleus vont se retrouver la semaine prochaine pour affronter l'Allemagne (jeudi) et les Pays-Bas (dimanche), les discussions vont évidemment tourner autour de ce sacre, cette inoubliable aventure. « Mais à un moment donné, Didier va siffler la fin de la récré, on devra passer à autre chose ». Toujours avec le doc dans les parages. « Tant qu'on ne m'aura pas mis à la porte... ».