Didier, que t'inspire cette folie qui s'empare de Marseille en ce moment ?
Didier Roustan : "J'ai vécu de l'intérieur le titre de 2010, et de très près 1991 et 1993. Je connais parfaitement cet engouement, mais, cette année, j'ai l'impression qu'il est encore monté d'un cran. Vu de l'extérieur, ça dépasse l'entendement !".
Pour quelles raisons ?
DR : "Je pense que le supporter marseillais était en manque, tout simplement. Il avait besoin d'une étincelle pour faire repartir le feu. Mine de rien, 1993, c'était il y a 25 ans, et la plupart des jeunes qui peuplent les virages aujourd'hui n'ont pas connu ça en direct. Il y a ce besoin de communier autour de cette particularité marseillaise, on l'a bien vu lors de la saison avec Bielsa. C'est d'ailleurs, à mon avis, le passage de l'Argentin qui a relancé tout ça. Il a été l'élément déclencheur, car Marseille est la ville qui se rapproche le plus de l'Argentine ou du Napoli, et il a permis aux supporters de toucher du doigt cette identité unique à nouveau".
Cette saison s'inscrit donc dans cette lignée ?
DR : "Oui. Déjà en 2010, il faut se souvenir de l'explosion de joie quand l'OM a gagné la coupe de la Ligue. Cela pouvait paraitre disproportionné pour un titre comme ça, mais il y avait déjà ce besoin de vibrer ensemble. Cette année, c'est décuplé avec la Ligue Europa. OK, ce n'est pas la Champions League, il n'y a pas les grandes oreilles, mais c'est énorme pour un club français. On se fout pas mal de ne pas avoir rencontré le Real ou le Bayern, car l'aventure est formidable. Et puis, cette équipe est dans le sacrifice, et les supporters s'y retrouvent, eux qui souffrent dans les tribunes. Ils souffrent avec elle et elle les libère toujours à la fin".
C'est une équipe qui leur ressemble ?
DR : "Je dirais que, depuis l'arrivée du Qatar au PSG, les Marseillais et les Français en général voient un peu l'OM comme les irréductibles Gaulois dans Asterix, qui résistent au foot-business. McCourt met de l'argent, bien sûr, mais on est loin des plus gros budgets européens. Comme les supporters marseillais sont généralement à contre-courant du foot-business, ça colle bien. Les mecs se battent, à l'image de Rami ou de Sarr qui se démet l'épaule et reste sur le terrain. Je pense aussi à Luiz Gustavo, la recrue parfaite pour diriger tout ça".
Et le fait de jouer cette finale à Lyon ?
DR : "À part le Parc des Princes, ça ne pouvait pas tomber mieux. Le côté chambrage est primordial pour les supporters, même s'il ne faut évidemment pas tomber dans la violence. En plus, il y a encore ce truc d'être à jamais les premiers qui risque de se répéter. C'est énorme !".
Quelles sont les chances de l'OM selon toi face à l'Atlético ?
DR : "Je sais que certains experts disent que l'Atlético est inaccessible. Je me suis d'ailleurs gentiment attrapé avec Raymond Domenech là-dessus sur le plateau de l'émission. Mais, sur un match, il y a une vraie possibilité. Attention, les Espagnols sont quand même largement favoris, mais tout peut arriver. Allez, je dirais raisonnablement une chance et demie sur cinq, mais avec tout ce qui peut arriver sur un match, les faits de jeu... allez savoir !".
@lephoceen