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Raynald Denoueix analyse le Clasico Real-Barça : «L'idée de Zidane était bien pensée...»
Fin observateur du football espagnol, Raynald Denoueix revient pour FF.fr sur le Clasico entre le Real et le Barça. Avec une victoire blaugrana au bout (3-0).
«Quel est le premier mot qui vous vient après avoir regardé ce Clasico ?
J'ai envie de dire efficacité (il sourit). C'est à l'image du Barça de cette saison. Compte tenu qu'ils ont perdu cet été au niveau de leur pouvoir offensif, de l'accélération, pour combiner dans la moitié adverse, ils ont resserré leurs lignes, pour devenir une équipe classique, groupée. C'est ce qu'on a pu voir en première période notamment. Mais ce Barça est aussi une équipe qui a un peu moins de maîtrise que par le passé.
Une équipe classique, mais qui parvient à mettre 3-0 au Real au Bernabeu...
Oui, après il y a aussi l'histoire du match. En première période, le plan de jeu du Real était très bon. Vouloir maintenir le Barça dans sa moitié, c'est quelque chose que ce dernier n'aime pas, ce n'est pas leur truc, ils n'ont pas les qualités pour. Surtout, le Real les a bloqué au milieu du terrain, à l'intérieur, là où les actions peuvent se construire. Un joueur comme Kovacic, en plus d'être capable de prendre au marquage, est beaucoup plus souvent à l'intérieur (du jeu). Au contraire d'un Isco qui se balade partout, et va souvent sur les côtés. En première période, cela a été très rare que le Barça puisse progresser dans l'axe du terrain. Ni Iniesta, ni Busquets, ni Rakitic, ni Messi, ni Paulinho : le Real les a coincé. Le Real avait donc bien réussi à annuler les points forts du Barça, pour exploiter les zones faibles, comme sur les côtés. L'idée de Zidane était bien pensée, bien réalisée. Le Barça était très bas, coincé dans l'axe, avec quelques petits soucis sur les côtés. Il n'y a manqué que les buts pour que le Real puisse en profiter.
Résumé : le Barça s'offre le Clasico et distance largement le Real Madrid
«Kovacic se retrouve tout proche de Messi, et le suit au lieu de jouer le ballon»
Après le repos, le Barça a retrouvé de l'allant, notamment au milieu. Comment l'expliquez-vous ?
Cela a été l'inverse. Au lieu d'être dans leurs 30 derniers mètres, ils sont au-delà de la ligne médiane. Et, surtout, ils ont le ballon. Le Barça a enfin réussi à rester plus haut, notamment grâce à des erreurs en face, avec un pressing moins important du Real. Et ça, je ne sais pas pourquoi... Est-ce que c'est physique ? Avaient-ils décidé de presser moins haut ? Du coup, ils ont permis au Barça de pouvoir revenir davantage dans ses habitudes de jeu. C'est-à-dire la maîtrise du ballon dans le camp adverse. Ainsi, le plan de jeu du Real a beaucoup moins bien fonctionné, c'est clair. Le Barça sait bien récupérer le ballon sur la perte, c'est leur système défensif. Récupérer le ballon quand ils sont près de leurs buts, c'est moins leur truc. Il y a des moments, en première période, où cela a été un petit peu limite. Heureusement, ils n'ont pas pris de but. Ensuite, le fait d'avoir le ballon leur a permis de mieux défendre. Par rapport aux autres équipes, le Barça fonctionne un peu à l'envers : c'est le fait de posséder le ballon qui leur permet de mettre en place leur système défensif. On n'arrête pas d'entendre qu'il faut d'abord bien défendre pour bien attaquer. Barcelone, c'est l'inverse. C'est amener le ballon dans le camp adverse, préparer pour trouver l'ouverture. Mais, à partir de là, être capable de presser. Ils sont nombreux, intelligents, et maîtrisent très bien ça. Ainsi, ils restent dans la moitié. Derrière, une connerie, deux conneries, trois conneries de l'adversaire. Et puis à la quatrième vous finissez par payer...
Qu'avez-vous pensé du premier but de Suarez, et du positionnement «douteux» de Kovacic ?
Ce but est vraiment symbolique. Kovacic se retrouve tout proche de Messi, et le suit au lieu de jouer le ballon. Dans le même temps, surtout, Casemiro est beaucoup plus haut. Alors que, traditionnellement, c'est lui qui est là.
Les notes du Clasico
«Busquets est toujours important»
Que dire de l'importance de Sergio Busquets sur cette victoire, et notamment cette deuxième période presque parfaite du Barça ?
Il est toujours important. Busquets, c'est un milieu de terrain qui sait organiser le jeu. À partir du moment où un ou deux joueurs étaient éliminés, le décalage se créait là. D'un seul coup, on l'a beaucoup plus vu, même chose pour Iniesta.
«Potentiellement, le Real est la meilleure équipe»
Parlons du Real : pourquoi n'y arrive-t-il pas en Liga cette saison ?
Je crois qu'il y a une réaction humaine : quand on est sous pression pendant un long moment, humainement, on relâche. Ils viennent de faire deux saisons exceptionnelles, en gagnant tout. Il y a l'aspect tactique, technique, mais surtout mental, qui est à la base de tout, qu'on ne sent pas, mais qui est toujours là. Quand on a autant donné, autant gagné, c'est inévitable qu'il y ait un peu de relâchement à un moment. C'est évident. Car, sinon, potentiellement, le Real est la meilleure équipe des deux. Actuellement, le Barça est trop diminué devant.»