Le PSG, s’il n’atteint pas l’objectif de ventes nécessaires d’ici au 30 juin, peut encore être puni dans le cadre du fair-play financier pour la Ligue des champions 2018-2019. ALBAN TRAQUET ET ARNAUD HERMANT
En milieu de semaine dernière, quand la direction parisienne a pris connaissance de la notification de l’UEFA sur le fair-play financier (FPF), elle a fait grise mine. Son mécontentement s’est vite doublé d’un étonnement à la lecture des commentaires disant que le club était non sanctionné par l’instance. Pour le Paris-Saint-Germain, il l’est bel et bien en raison de la décote de ses contrats qatariens (QTA, QNB, Ooredoo, beIN) – la saison même où il peut compter sur la présence de Neymar dans son effectif – et aussi par la nécessité de vendre entre 40 et 60 millions d’euros (voir par ailleurs), selon les sources, d’ici au 30 juin, afin de respecter les exigences du fair-play pour cet exercice.
Retour sur les raisons qui placent le club de la capitale dans une situation délicate et le laissent toujours sous la menace d’une sanction de l’UEFA pour la saison à venir.
UNE DÉCOTE TARDIVE ET RÉTROACTIVE
L’enquête ouverte le 1er septembre par l’UEFA, sous la pression de plusieurs grands clubs européens, faisait suite aux transferts records de Neymar (222 M€) et Mbappé (prêt avec option d’achat de 145 M€ + 35 M€ de bonus), pour vérifier si le Paris-Saint-Germain pouvait rester en conformité avec le fair-play financier. L’instance de contrôle financier des clubs (ICFC) s’inquiétait de certaines rumeurs, notamment venues d’Espagne, selon lesquelles le Brésilien pourrait être acheté et/ou payé via le Qatar et un rôle d’ambassadeur. Lorsque l’ICFC, via sa chambre d’investigation, a demandé au club parisien comment il allait financer ces deux contrats, ce dernier a mis en avant l’ensemble de ses recettes, en particulier ses contrats de sponsoring qatariens. Il a aussi produit un comparatif (voir notre édition du 13 juin 2018) avec les recrutements de Luis Figo et Zinédine Zidane au début des années 2000 par le Real Madrid, pour prouver qu’avec ses revenus actuels, il était en mesure d’assumer ces deux arrivées. Cette analyse n’a pas convaincu l’ICFC, en désaccord, particulièrement avec les montants avancés par le club pour ses deals qatariens, jugés surévalués alors que l’instance les avait validés jusqu’alors, notamment celui avec Qatar Tourism Authority (QTA) à 100 M€, depuis 2014 et une première dévaluation.
Après plusieurs mois de discussions et d’échanges de notes juridiques, ces partenariats ont été diminués, dont le plus important, QTA, est basé sur le concept de nation branding (marketing national). Mais malgré la décote de ces contrats, l’UEFA a décidé de clore son enquête le 13 juin, signifiant que « le résultat relatif à l’équilibre financier du club reste conforme à l’écart acceptable (30 M€ de dépassement) pour les exercices financiers s’achevant en 2015, 2016 et 2017 (au 30 juin dernier) ».
Pourtant, le PSG n’a pas crié victoire. Parce qu’avec la décote du contrat QTA actée rétrospectivement et de manière assez surprenante par l’ICFC dès les comptes 2016-2017, le club parisien, avec son exercice 2017-2018 hors norme clôturé dans neuf jours, sortirait de la « déviation acceptable » autorisée par le FPF sur les trois dernières saisons. Et comme au fil de son enquête, l’ICFC a pu observer, en temps réel, les flux de trésorerie du club parisien pour la saison 2017-2018, au lieu de procéder à l’évaluation des bilans financiers avec environ une année de décalage (cette règle évoluera en 2018-2019) comme cela se fait d’ordinaire, c’est bien dans l’urgence que le PSG doit trouver entre quarante et soixante millions d’euros pour rester dans les clous cette saison. Et donc vendre des joueurs.
L’ICFC VEUT LES COMPTES AVANT MI-JUILLET
Selon nos informations, l’ICFC a demandé au PSG de lui communiquer ses résultats non audités de la saison 2017-2018 au plus tard mi-juillet (les chiffres audités ne devraient pas parvenir à l’UEFA avant début septembre). Afin d’avoir une « vue précise sur les efforts produits pour atteindre les objectifs fixés au club », dit un proche du dossier. C’est à partir de cette base que la chambre d’instruction de l’instance va poursuivre son travail.
Le PSG demeure donc sous haute surveillance. Depuis le 1er juin, le règlement du FPF a évolué et installe un « contrôle prudentiel » des clubs par l’ICFC. À l’image du déficit maximum de 100 M€ à ne pas dépasser entre les dépenses et les ventes sur le marché des transferts. Cette nouvelle contrainte oblige désormais les plus dispendieux à fournir à l’UEFA leur budget prévisionnel.
DES CONSÉQUENCES PLUS OU MOINS LOURDES
À l’UEFA, on est clair : « Il y aura des conséquences » si le PSG n’est pas rentré dans le cadre défini par le FPF au 30 juin. À ce titre, Paris ne comprend pas que l’on puisse dire qu’il n’a pas été sanctionné. Dans les faits, il peut encore l'être pour la prochaine campagne de Ligue des champions, c’est-à-dire celle de la saison 2018-2019 qui débutera début septembre. « S’ils ne remplissent pas les conditions exigées, ils savent que ce sera très dur pour eux », confirme une source avertie. Selon les règles de l’instance européenne, les mesures disciplinaires vont de la « mise en garde », pour la plus clémente, au « retrait d’un titre », pour la plus sévère. L’éventail des sanctions prévoit également une amende, « l’interdiction d’inscrire de nouveaux joueurs à des compétitions de l’UEFA », une « restriction de joueurs inscrits pour participer à ces compétitions » et « la disqualification de compétitions en cours et/ou l’exclusion de compétitions à venir ». Sanctionné en 2014 (*), le club connaît le barème.
Si Paris n’atteint pas les objectifs fixés par l’UEFA, le suspense d’une éventuelle punition accompagnera son début de saison. Selon ses procédures, la chambre d’instruction de l’ICFC devrait attendre le mois d’octobre pour intervenir à partir des comptes certifiés mis à sa disposition par le club. Mais la chambre de jugement de l’instance peut également se saisir du dossier plus rapidement, en vertu de « l’examen approfondi » et du « suivi attentif » du cas parisien. Et donc sanctionner avant la fin de l’été…
Au PSG, si on a conscience de la problématique et des risques, on se montrait, ces dernières heures, assez confiant pour réussir à être dans les clous au 30 juin.
(*) Amende de 60 M€ (dont 20 M€ ferme), restriction de son enveloppe de transfert, encadrement de sa masse salariale et limitation à 21 joueurs (au lieu de 25) en Ligue des champions. La sanction avait été levée l’année suivante.
L'Equipe
La vente rapide du Portugais, après celles d’Édouard et de Pastore, permettrait au PSG de répondre aux exigences du fair-play financier pour cette saison. Guedes, la variable d'ajustement ?
La vente rapide du Portugais, après celles d’Édouard et de Pastore, permettrait au PSG de répondre aux exigences du fair-play financier pour cette saison. ARNAUD HERMANT
Demain, sauf revirement, le Paris-Saint-Germain aura franchi un pas de plus vers son objectif : empocher de 40 à 60 millions d’euros, selon les sources, d’ici au 30 juin. En effet, la cession de Javier Pastore à l’AS Rome devrait être effective dans la journée, comme annoncé dans notre édition de mardi. Si cela ne devait pas être le cas, il ne s’agira plus que d’une question d’heures.
L’Argentin, arrivé dans la capitale en 2011, devrait rapporter un peu plus de 20 millions d’euros au PSG (24, selon certains). Ajoutés aux presque 10 millions d’euros d’Édouard, transféré au Celtic Glasgow, Paris aura engrangé entre 30 et 35 millions avec ces deux opérations. Une dernière vente et la mission aura été un succès. Un certain optimisme règne en interne, où on n’imagine pas qu’Antero Henrique échoue, lui qui est en charge et joue très gros sur ce dossier capital. Et quand on imagine un nouveau départ, on pense à celui de Gonçalo Guedes, le Portugais, prêté à Valence cette saison, et qui a joué hier son deuxième match de Coupe du monde. Comme L’Équipe l’avait révélé le 20 décembre dernier, le PSG dispose d’un accord avec les dirigeants valencians pour que leur attaquant soit transféré avant le 30 juin, fair-play financier oblige, dans le sud de l’Espagne. Si ce deal est toujours d’actualité, le prix réclamé par Henrique semble avoir quelque peu, si ce n’est compliqué, au moins retardé sa finalisation.
Encore plus d’argent à trouver en 2018-2019
Le directeur sportif a demandé 80 M€ pour son compatriote. En privé, auprès de sa garde rapprochée, il avançait même parfois le chiffre de 100. Un tel montant semble aberrant, en dépit des liens forts qui unissent Peter Lim, Jorge Mendes, respectivement président de Valence et conseiller de ce dernier, et Nasser al-Khelaïfi. Si Paris peut déjà récupérer entre 40 et 50 M€ pour un élément acheté, il y a un an et demi, 30 M€ à Benfica, ce sera une très belle opération.
Une fois cette étape validée, le club n’en aura pas fini avec les besoins en cash. Pour le prochain exercice, c’est plus de 100 M€ qu’il lui faudra trouver afin d’amortir les recrutements et salaires de Neymar et Mbappé et compenser la décote de leurs contrats qatariens décidés par l’UEFA. Il devra trouver de nouveaux partenaires et/ou également vendre encore des joueurs. Trapp, Kurzawa, Jesé, Krychowiak et, dans une moindre mesure, Di Maria ont le profil.
Cette obligation va limiter l’action du PSG sur le marché des transferts. À ce jour, les supporters ne doivent pas rêver à un transfert à trois chiffres comme la saison dernière.
L'Equipe