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Il a œuvré dans le domaine du spectacle mais n’aime pas les projecteurs. Nommé directeur général adjoint en charge du marketing et des ventes en fin d’année 2016, Jean-François Richard occupe un poste clé à l’OM. S’il a refusé d’apparaître en photo, il s’est en revanche livré longuement hier matin au sujet de la première campagne estivale d’abonnements. Il est aussi revenu sur les relations avec les groupes de supporters et sur les prochains chantiers du club. Entretien.
La campagne d'abonnements a pris fin le 2 septembre. Pourquoi avoir attendu 3 semaines avant de communiquer ?
Jean-François Richard : Parce que je n'ai pas eu tellement le temps avant. Ça n'a pas très bien marché sur la fin août. On a plutôt fait autour de 80 % avant le 14 juillet. Ça a très bien démarré en revanche, avec de très fortes rotations les premiers jours. Ensuite, on fait entre 15 et 20 % selon les types d'abonnements sur les 15 derniers jours d'août.
Quel est le nombre d'abonnés ?
Le chiffre exact est de 32 861 abonnés. Pour comparer des pommes avec des pommes et des poires avec des poires, l'an dernier, le chiffre communiqué était de 20 225 abonnés. Ça correspond à 62 % d'augmentation. Quand on le compare aux années précédentes, on a plutôt une meilleure progression en tribunes qu'en virages. La comparaison avec 2016-17 n'a quasiment pas d'intérêt : on était à 8 925 abonnements vendus en virages, contre 21 500 aujourd'hui. Ce qui fait un taux de remplissage, tous virages confondus, de 83 % ; avec un remplissage un peu plus faible dans le virage Nord.
Quel bilan tirez-vous de cette première campagne de l'ère McCourt ?
C'est très positif, d'autant plus que les progressions en volumes sont bonnes et les progressions en valeurs sont encore meilleures. En tribunes Ganay et Jean-Bouin, en réétageant l'offre, on est arrivé à un meilleur remplissage. Ce qui n'est pas anormal car il y avait 29 tarifs avant, c'était extrêmement complexe. On est redescendu à 9 tarifs, virages compris. On a aussi fermé Ganay haut et Jean-Bouin haut pour avoir une marge de manoeuvre sur des affiches un peu moins sexy et pouvoir mieux gérer le stade. Ça permet de mieux gérer les coûts aussi, car ouvrir Ganay haut, par exemple, représente entre 7 000 et 11 000 € de frais par match. L'objectif est vraiment de piloter au mieux le remplissage du stade.
32 861 abonnés, c'est un chiffre en deçà ou au-delà de vos objectifs ?
C'est à peu près pile-poil au milieu. Après, c'est compliqué de savoir ce qui est l'idéal en termes d'abonnés. Je ne saurais pas vous le dire, et je pense qu'il n'y a pas grand monde pour le dire. Il y a tellement de variables : les horaires de match, les jours, l'affiche, la météo, le résultat précédent, le match suivant... Si on prend l'exemple de la réception du Vitoria Guimaraes, qui tombe trois jours avant le PSG, ça ne va pas être ultra-simple à remplir. Mais on essaie de trouver les solutions. Une fois que tout cela sera stabilisé, on reprendra de temps à autre des offres spéciales, comme on l'a fait la saison dernière. Notamment pour les enfants pendant les vacances scolaires, ce qui avait très bien marché. Mais pour cela, il faut de la billetterie disponible. A priori, le chiffre parfait est entre 30 000 et 40 000. Mais ça peut être aussi ce qui se fait à Barcelone ou au Bayern Munich, où l'idée de s'abonner oblige à se mettre sur une liste d'attente. On n'y est pas encore, loin de là.
Quelles ont été les difficultés rencontrées durant cette campagne ?
La principale a été le fait de se mettre en place et de satisfaire sept groupes qui ne veulent pas tous la même chose. Je suis arrivé le 10 décembre, c'était déjà tard, mais il a fallu faire une première réorganisation, puis une deuxième. On a fait beaucoup de choses en même temps, donc on est arrivé tard auprès des groupes et des potentiels clients. Le plus dur a été de mettre en place un outil qui marche et qui serve, notamment ces sept groupes de supporters, qui ont chacun des exigences particulières. Au final, on a trouvé un mode de fonctionnement qui convenait à tout le monde, avec le plus petit discriminant commun. Ce ne sera pas du tout fait comme cela l'année prochaine.
C'est-à-dire ?
On a commencé à discuter avec les groupes, qu'on a vus jeudi. On a décidé de constituer un atelier de travail régulier sur la billetterie, dans lequel on va commencer tout de suite à discuter de la mise en oeuvre de la campagne d'abonnements 2018-19. Notre objectif est qu'à fin janvier-mi-février, on ait une campagne qui soit totalement cadrée pour commencer à tester les outils. Il y a des choses intéressantes à sortir : par exemple, on fait 65 % des ventes sur internet. Ça peut paraître énorme ici, mais ça nous paraît très peu. Ça nous semble beaucoup plus simple de prendre un abonnement de chez soi, mais j'entends le message délivré. Jeudi, il y a une idée qui est sortie du lot, celle du lien social entre le local, le supporter et son groupe. Ce n'est pas tombé dans l'oreille d'un sourd. Et ça me paraît légitime.
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Ils vous l'ont déjà dit par le passé...
Oui, mais nous étions bloqués par rapport à ce système qu'on devait mettre en place en dernière minute. Nous avons vraiment été confrontés à des problèmes techniques. Mais je crois très honnêtement qu'on a fait un énorme pas en avant au niveau technique dans le service offert aux groupes de supporters et aux supporters. L'objectif est de faire encore mieux l'an prochain. Ça veut dire entendre les groupes qui disent ne pas vouloir perdre le lien avec le supporter qui vient au local. OK, c'est entendu et on va en tenir compte. On va mettre en place des solutions pour avoir un outil qui fonctionne dans ce sens. C'est important pour eux.
Vous avez dû gérer leur mécontentement. Certains estiment que le club ne veut plus des groupes...
Je ne sais pas quoi vous répondre. L'OM ne veut plus d'eux ? C'est intéressant, ça nous interpelle. Non, l'OM veut ses groupes de supporters. La preuve en est, on leur redonne des quotas historiques, on remonte les tarifs en Ganay et Jean-Bouin pour favoriser les abonnements en virages... Ce sont des faits, pas des impressions. Mais qu'il y ait un malentendu parce qu'on fait bouger les lignes, ça se comprend. J'entends des questions sur le fait de ne plus vendre de place en virages au match. Pourquoi le fait-on ? Jusqu'en 2012-13, il y avait 100 % de remplissage en virages.
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Le début de la baisse coïncide avec les travaux de rénovation. Ce qui est intéressant, c'est qu'on a une capacité plus faible en virages que dans l'ancien stade - 27 500 contre 25 748 aujourd'hui -, avec une progression de prix - de 140€ en 2010-11, 145€ en 2011-12, 12-13, 13-14, 14-15, 155€ en 2015-16, 16-17, à 160€ aujourd'hui - inférieure à l'inflation... Avec, au milieu de tout ça, un changement de taux de TVA qui passe de quasi 0 à 5,5 %. Ça nous positionne sur des prix de virages parmi les plus faibles d'Europe, le plus faible de France.
Vous avez vendu 83 % d'abonnements en virages, il reste donc 17 % de places libres. Concrètement, vous n'allez pas les vendre contre le PSG ?
Pour l'instant, non.
Vous prenez le risque d'avoir des zones vides ? Ou vous avez une idée derrière la tête en disant "pour l'instant" ?
Non, non, non (sic). (Il réfléchit) Pour le coup, c'est délicat. Le message principal est de dire qu'il n'y a pas de position unie et claire des groupes là-dessus. On doit discuter avec eux. C'est délicat car ça fait appel à deux arguments qui sont recevables aussi bien l'un que l'autre. Le premier, pour préparer 2018-19 et faire en sorte de revenir à un taux de remplissage de 100 %, est de dire que pour être en virage, il faut être abonné. Si vous voulez voir OM-PSG, OM-Lyon, abonnez-vous ! C'est un message clair, une stratégie partagée avec tous les groupes, sauf les Ultras. Là, on bascule sur le deuxième argument recevable, qui est de dire que l'objectif est de remplir les virages. C'est vrai. Mais aujourd'hui, on est encore en train de discuter, ce qui est nouveau car on va au contact.
Nouveau par rapport à l'ancienne présidence, mais il y a déjà eu du dialogue avant cela...
Peut-être, mais l'idée est d'avoir un pacte stable de fonctionnement dans lequel tout le monde se retrouve. On doit se connaître mieux. Le club ne peut pas tout faire pour les groupes de supporters. Il y a des limites. Il faut être plus clair sur ces limites. Vous l'avez vécu à plus d'un titre, mais nous, on n'est plus dans les petits arrangements... C'est fini ce temps-là ! Et ça vaut à tous les niveaux, pas seulement avec les groupes de supporters. Par exemple, on a séparé les appels d'offres des prestataires extérieurs avec les prestations marketing.
On ne comprend pas de quels arrangements vous parlez...
Je veux parler des charbonneurs qui tournent autour du stade les jours de match. Ce qui fait qu'on essaie de trouver des solutions, mais ce n'est pas simple. Mais à un moment donné, on veut que ce club, d'une certaine manière, soit géré de façon transparente et irréprochable. On va construire sur trois, quatre, cinq ans, on va reconstruire un club sur des bases saines, avec des revenus multipliés par 2-2,5, on va recréer un groupe sportif solide pour participer à la lutte pour les premières places en championnat... Je pense qu'on est dans les bons temps de passage. Mais il faut qu'on arrive à mettre en place une relation plus harmonieuse avec les groupes.
Des abonnés Jean-Bouin nous ont aussi fait part de leur colère car ils ont été impactés par la création du "Club 1899", zone très haut de gamme inaugurée dimanche. Certains, qui s'étaient engagés sur trois ans (2017-2020, pour 1550 € HT la saison), ont été déplacés. Leur accès à la tribune et les prestations ont aussi changé. Ils se sentent lésés. Qu'en est-il de leur cas ?
On a eu une réunion avec eux vendredi. Le message a été clair : ce qu'on fait est légitime par rapport à la politique générale du club. Après, cela a été extrêmement mal exécuté et mal annoncé auprès d'eux. Je suis le manager, j'aurais dû faire en sorte d'être sûr que les équipes communiquent correctement. On se retrouve dans une situation où les gens sont mécontents, on va leur faire une proposition. Je leur ai dit : "Vous pouvez m'accuser d'être dur, mais pas d'être un menteur. Bravo, vous avez tiré parti d'une bêtise de l'équipe précédente. Prenez-le plutôt comme un compliment de ma part."On leur garantit des places dans la même catégorie et on va leur proposer ce mardi (aujourd'hui) une alternative en termes de salon, avec une meilleure qualité que ce qu'ils avaient jusqu'à présent. Ils ont aussi tous eu la proposition de rejoindre le "Club 1899" (commercialisé à 12 000 € la saison, ndlr). Dans ce domaine-là, aussi, bouger les lignes crée forcément du mécontentement. Mais cela n'a pas été bien fait avec eux. Je leur ai donc présenté nos excuses très humblement.
Qu'en est-il de l'avenir d'OMtv ? Les programmes sont désormais réduits au strict minimum.
On va conserver la chaîne. Mais OMtv, qui était, on va dire, 97 % de la préoccupation de l'équipe médias, va devenir un des supports de diffusion des contenus de l'OM. Un format comme le "12e homme" a sa raison d'être sur OMtv, mais aussi sur Twitter, Facebook live, OM.net. L'idée, c'est de réorganiser le club autour d'une distribution des contenus qui soit beaucoup plus moderne. Pour assurer la visibilité des activités de l'OM et les monétiser, il faut qu'on augmente drastiquement leur diffusion, et pas qu'en France. C'est une politique globale : un contenu va demain être traduit en anglais, en espagnol, en japonais, en arabe, et être diffusé via tous les types de réseaux sociaux. L'objet, c'est d'augmenter l'aura et la notoriété du club dans le monde entier.On a très fortement réorganisé les médias, on remet tout à plat. On est en train de revoir le conducteur d'OMtv. Les choses vont se remettre en ordre de marche d'ici mi-octobre.
Quels sont vos prochains chantiers ?
C'est de travailler sereinement, dans des timings normaux, aussi bien avec les groupes de supporters qu'en ce qui concerne les offres en tribunes Ganay et Jean-Bouin. C'est donc d'être prêt, fin janvier, pour la saison d'abonnements 2018-19. Au niveau des partenariats, on a fait en sorte de les renouveler quasiment tous et d'en trouver des nouveaux. Cela nous permet de préparer un plan 2018-21 en sponsoring, qu'on va bientôt mettre en oeuvre. Il y a un point important, qui est évidemment le partenaire maillot, sur lequel je pense qu'on aura des choses à vous dire assez rapidement. On est revenu sur une approche très professionnelle, avec une vision internationale. Hasard du calendrier (il sourit), la totalité des partenariats se terminait le 30 juin... On s'est retrouvé avec onze partenariats à renouveler, avec trois mois devant nous. On a un nouveau partenaire magnifique en terme d'équipementier (Puma, à compter de 2018-19), on finit bien avec notre équipementier actuel (Adidas).
Des chantiers, il y en a des tonnes. L'un des chantiers majeurs a pour nom de code le musée OM. On est totalement dessus, on y travaille en impliquant les groupes, comme pour la billetterie. Avec Thierry (Aldebert, directeur de l'organisation, de la sûreté et de la sécurité du club), on veut également mettre en place avec eux un atelier sécurité-sûreté, qui concerne aussi les déplacements et les conditions dans lesquelles ils se déplacent.
Alexandre Jacquin et Jean-Claude Leblois