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LAURENT COLETTE; "Ne pas dilapider l'essence de l'OM "; Le DG, ex du Barça et de la Roma, assure qu'il ne fera pas n'importe quoi pour faire rentrer de l'argent
Un CV long comme le bras, des références à faire pâlir les recruteurs et les dirigeants, et une riche expérience acquise à l'international : Laurent Colette a débarqué à l'OM, l'été dernier, précédé d'une sacrée réputation. Nommé directeur général, cet ancien du Barça et de la Roma, né à Besançon d'une mère originaire du Haut Var il y a 56 ans ("Je parais moins, je sais", glisse-t-il dans un sourire), ne compte pas son temps et met à profit son épais carnet d'adresses pour gérer les multiples dossiers dont il a la charge. Polyglotte (il maîtrise sept langues), il a bâti sa carrière loin de la France, 27 ans durant. "Au club, on m'appelle Hibernatus car j'ai longtemps coupé avec mon pays et, de temps en temps, j'ai des références des années 80", s'amuse-t-il.
Bras droit de Jacques-Henri Eyraud, il s'est vite fondu dans son nouvel environnement. "Je me sens provençal, j'ai ça dans le sang", confie-t-il. L'ambiance du Vélodrome l'a surpris. "Les supporters créent quelque chose d'unique, ont une vraie créativité. C'est une force qui fait partie du patrimoine de l'OM et sur laquelle il faut travailler. Mine de rien, il n'y a pas forcément une énorme ambiance au Barça. On appelle le Nou Camp la cathédrale, peut-être parce que les gens sont habitués à voir beaucoup de victoires, peut-être parce que l'âge moyen du socio est supérieur à 55 ans." Colette fourmille d'idées pour développer la marque OM.
Son arrivée à l'OM
"Je travaillais à Barcelone, sur des projets de start-up. J'ai reçu un appel d'un cabinet londonien de chasseur de têtes me demandant si l'OM pouvait m'intéresser. Revenir en France ne figurait pas sur ma feuille de route, je ne voulais pas retrouver un club après être passé par deux beaux clubs. Mais il y avait ce côté provençal, j'avais entendu parler de Jacques-Henri et du Champions project. Rien qu'en prononçant Olympique de Marseille, j'ai la chair de poule, ça me fait vibrer. J'ai passé les entretiens, j'étais de plus en plus séduit par le projet. J'ai eu un très bon contact avec Jacques-Henri, rencontré des gens de l'entourage de Frank McCourt, puis McCourt pendant 2h45. Mon ambition est d'aider l'OM. C'est une très belle marque, qui a du potentiel et fait vibrer beaucoup de gens. Elle pourrait en faire vibrer encore plus. Je suis là pour ça, pour comprendre et écouter les supporters, voir ce que le club peut faire. On avance pas à pas."
Ses missions
"La première a consisté à connaître le club et préparer la reprise du stade. Le chemin était très précis. Il fallait être prêt à prendre les rênes le 1er janvier pour développer ce que l'on veut. J'ai aussi repensé le discours de présentation de l'OM, être plus international avec des arguments plus portés sur la vision et où on veut aller pour rendre le club plus attractif, moins dépendant des résultats. Je m'occupe de tout ce qui n'est pas sportif : les finances, le marketing, le commercial, les opérations, le protocole, la fondation... J'ai un gros objectif de (trouver des) ressources et des revenus avec le digital, le développement des sponsors, l'international. L'objectif est que l'OM, une très belle marque en France, devienne demain une très belle marque à l'étranger. Aujourd'hui, si un club n'est pas à l'étranger, ce ne sera pas un grand nom dans le football. 97 % des fans du Barça vivent en dehors d'Espagne. Le foot est universel. Et il y a ces pays avec une forte démographie comme la Chine, l'Indonésie, le Brésil ou la Turquie. Avec les droits TV, les sponsors, les réseaux sociaux, vous êtes obligés d'avoir une place à l'international. Notre base de données compte un peu moins de 50 % de citoyens français. Il y a beaucoup de francophones (Suisse, Belgique), une énorme présence dans les pays d'Afrique francophone. On commence à être apprécié sur certains continents. Au Japon, il y a un intérêt avec Hiroki Sakai. L'OM a une vraie légitimité dans le foot international."
l'exploitation du Vélodrome
"C'est la maison de l'OM, là où il y a un contact entre les joueurs et les supporters. On peut faire des tas de choses : un entraînement, une présentation commerciale ou d'un joueur. Un stade génère des revenus additionnels indispensables dans la course internationale. Le Barça, rien qu'avec son musée et sa boutique, gagne environ 100 M€ par an. Quand je suis arrivé, certains ont eu peur que je transforme le stade en Disneyland. Je ferai le maximum pour en garder l'esprit. Les supporters attendent qu'on donne un vrai avenir au club, ça passe par trouver des moyens qui ne dilapident pas l'essence du club. Il faut faire attention aux prix des abonnements pour nos fans les plus modestes. On cherche des choses en complément sans impacter le prix des places. Il faut être créatif pour trouver de l'argent. Je n'ai pas détruit le feeling au Barça, je ne le ferai pas à Marseille."
les futures ressources
"Les droits TV, en France, sont un peu plus élevés (environ 42 % du budget) qu'en Espagne. Ils vont augmenter, il y a aussi la billetterie, les hospitalités (les loges, les sièges entreprises, les conventions). À nous de trouver autre chose. Au Barça, on avait un accord avec une université on line qui donnait des cours de matières relatives au sponsoring. Pourquoi l'OM n'expliquerait-il pas le marketing sportif avec l'exemple du club ? Il y a une vraie demande. Pourquoi des entraîneurs présents dans d'autres pays ne pourraient-ils pas télécharger un tutoriel, une méthode d'entraînement de l'OM, expliquée par des coaches du club, pour l'appliquer aux gamins qu'il dirige ? L'OM peut aussi aider des sélections ou des fédérations étrangères à élever le niveau de leur coach, de leur médecin. N'oublions pas que Franck Le Gall, également en charge de l'équipe de France, a une certaine réputation et une certaine valeur. Pourquoi ne pourrait-il pas expliquer à d'autres médecins comment travailler."
l'international
"Il faut définir les territoires prioritaires car on ne peut pas être partout. Il vaut mieux privilégier ceux où on a des fondations et du terreau comme les pays francophones et l'Afrique. Il faut développer un carrousel d'initiatives en incluant le sportif. Ça crée un vrai lien avec un certain nombre de pays pour développer la marque qui nous aide dans le sportif, à accroître nos revenus et la force de la marque. Avec l'Afrique, on a de vraies relations, une vraie entrée."
La Provence