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Accorte avec McCourt
Depuis son passage sous bannière américaine il y a quasiment deux ans jour pour jour, l'équipe phocéenne a connu un bel essor. DE NOTRE ENVOYÉ SPÉCIAL PERMANENT
MATHIEU GRÉGOIRE MARSEILLE – Le 17 octobre 2016, dans un cabinet d’avocats à deux pas des Champs-Élysées, Frank McCourt a officiellement racheté l’OM à Margarita Louis-Dreyfus, l’ancienne propriétaire. Pour quel montant ? Selon plusieurs sources, il a déboursé près de 45 M€ pour 95 % des parts, la famille Louis-Dreyfus conservant des actions via Kyril, le fils au cœur ciel et blanc. Contrairement à plusieurs repreneurs potentiels, l'Américain offrait de solides garanties et pouvait payer dans des délais rapides. Surtout, il faisait peu de cas d’une garantie de passif et reprenait ainsi toutes les casseroles de l’équipe précédente, à charge pour lui de les récurer, par ses propres moyens.
Le prix de vente qu’il a assumé ne peut être ainsi déconnecté des risques financiers et de réputation pris sur des dossiers juridiques (Michel, José Anigo, un possible procès des comptes de l’OM, etc.), des dettes à régler jusqu’au plus petit fournisseur, du déficit d’exploitation à venir, de certains prêts avec option d’achat à honorer (Florian Thauvin, Clinton Njie), des coûts de restructuration de l’entreprise et autres indemnités de départ de dirigeants (Franck Passi, Luc Laboz…). « Le rachat de l’OM, ce n’est pas 45 M€, sourit un proche du dossier. Vous pouvez rajouter plusieurs dizaines de millions. Pour moi, le club a presque coûté le double à McCourt, qui a exaucé le vœu de Margarita : il a acheté la maison sans broncher et pris en charge tous les vices cachés. Il a ainsi lancé un plan social et la grille salariale de l'OM est plus souple chez les administratifs. »
Des ventes de maillots prometteuses et 38 000 abonnés
Comme l’ont souligné à plusieurs reprises l'entraîneur Rudi Garcia et le président Jacques-Henri Eyraud, il a fallu reconstruire un effectif, les principales forces vives ayant été vendues ou libérées à l’été 2016 (Batshuayi, Mendy, Lemina, Nkoudou, Mandanda, Nkoulou, etc.).
Cette problématique, intégrée d’ailleurs dans le prix de vente, a limité la marge de manœuvre de l’OM lors des derniers mercatos, avec une seule grosse vente réalisée (Frank Anguissa, en août dernier, à Fulham, pour 30 M€). L’OM dispose aujourd’hui d’un groupe solide et compétitif, qui lui permet de respecter ses temps de passage sportifs, mais l’actif joueurs n’est pas très liquide. « Autrement dit, quel joueur a de la valeur en ''trading'', pour un éventuel repreneur intéressé par l’OM ? Il y a Thauvin, Bouna Sarr, Morgan Sanson, Boubacar Kamara, Maxime Lopez et, dans une moindre mesure, Hiroki Sakai, qui peuvent dégager des plus-values conséquentes dans les comptes, illustre un fin connaisseur du club. Pour les fruits de la politique de formation, un de leurs credo, il faudra encore attendre quelque temps. » Le reste de l’effectif, composé de cadres trentenaires et généreusement rémunérés, n’attirera pas le potentiel investisseur.
Acheter le Vélodrome fait plus que jamais partie des objectifs
Pour l’instant, cette politique de l’expérience a permis à l’OM de redresser la barre, même s’il n’a toujours pas retrouvé le goût de la Ligue des champions, un vrai boost dont il est privé depuis la saison 2013-2014. La finale de Ligue Europa (perdue contre l'Atlético de Madrid, 0-3), en mai, a permis de restaurer l’image de marque du club, passablement écornée sur la fin de l’ère Louis-Dreyfus. « Le démarrage de Puma est beaucoup plus fort que prévu, confie un cadre du club. Les ventes de maillots sont au-delà de leurs prévisions, et même des performances d’Adidas sur les belles années de leur dernière décennie de contrat. » L’OM compte aujourd’hui 38 000 abonnements au Vélodrome, un chiffre qui se rapproche des grandes époques. Il a augmenté tous les tarifs et prévoit une hausse de ses recetets billetterie de 20 % sur la période 2018-2020 (+ 35% pour les hospitalités cette saison). Il dispose désormais d’une précieuse base de données commerciales pour ses partenaires et lui-même avec le programme « OM Nation », dont les supporters fichés ne maîtrisent pas forcément l’importance.
Au rayon immobilier, l’OM a aussi modernisé la Commanderie, son actif principal en 2016, et obtenu la location exclusive du stade Paul-Le Cesne pour cinquante ans auprès de la mairie, rebaptisé l’OM Campus par des communicants fans de séries US. Il a investi 6 M€ dans ce lieu dédié aux féminines et à l’école de foot. Il s’apprête à récupérer l’exploitation exclusive jusqu'en 2045 du Stade-Vélodrome, qui va subir un lifting prononcé. Il espère en dégager, d’ici quelques saisons, une quinzaine de millions d'euros de recettes qui permettront, par exemple, l’achat d’un bon joueur chaque été. Le club s’est aussi positionné sur le parc Chanot, aux abords de l'enceinte, qui permettrait de lancer un Village OM. Et l’achat du Vélodrome, qui ferait grimper la valorisation de l’OM ? Dans le clan McCourt, où la culture du foncier est dans les gènes, certains en rêvent. Plusieurs successeurs présumés de Jean-Claude Gaudin ont été sondés, car ce ne sera pas possible avant le terme du mandat de l’actuel maire de Marseille, en 2020. En attendant, la prochaine étape concerne le développement international (boutiques à l’étranger, détection de jeunes talents sur tous les continents), où l’OM a du retard à rattraper.
L'Equipe